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Marclaine Antoine, le griot déguisé en «nwar tcholo»

2 novembre 2017, 12:17

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Marclaine Antoine, le griot déguisé en «nwar tcholo»

Pour ceux qui n’ont pas le sens de l’orientation, le repère pour aller chez Marclaine Antoine à Camp-Levieux, c’est l’immense sapin. Après avoir tourné en rond, il suffit de lever le nez pour se repérer. Marclaine Antoine, musicien, compositeur, arrangeur, défenseur du patrimoine oral et musical nous a quittés hier. Il avait 72 ans. Fatigué d’être mangé par le diabète, fatigué tout court, il a rejoint son mentor, le griot Nelzir Ventre. De lui, il avait appris le secret de pratiques traditionnelles.

Gardien zélé, Marclaine Antoine ne cachait rien de leur part d’occulte. Tous ces mystères qui font la richesse, la complexité et la beauté de la culture mauricienne. Avec cet air de défi qui le caractérisait, le musicien lançait même que cela lui arrivait d’être guérisseur.

Sa façon de parler avec autorité venait de sa longue expérience, nourrie par sa vie personnelle mouvementée, ses multiples carrières professionnelles. Conseiller au ministère des Arts et de la culture, témoin des premiers pas de la société des droits d’auteur, du centre culturel africain, Marclaine Antoine a contribué de manière durable à la musique.

Au nom de la culture, il a tout connu. Même la prison. La soixantaine bien sonnée, Marclaine Antoine avait été incarcéré en 2004 parce qu’il possédait des fusils de collection. La loi avait décidé que c’était illégal. De retour chez lui, Marclaine Antoine trônait au milieu de sa collection de masques. La maison était remplie d’instruments. Dans la cour, un makalapo. Que deviendront ces orphelins ? Nous ne pouvons qu’espérer que ce travail de patiente collecte ne soit pas dispersé.

Les barreaux n’étaient pas parvenus à calmer son agacement, quand il écoutait les paroles de certains segas contemporains. Pour lui, ces paroles utilisées à tort et à travers étalaient l’ignorance de certains artistes. Il avait la main leste quand il s’agissait de distribuer des claques verbales. Mais il avait aussi la main heureuse pour partager.

Depuis quelque temps, Marclaine Antoine n’était pas peu fier de livrer son savoir sur Facebook. Tous les jours, c’était soit la photo d’un objet inconnu, un masque, une sirandann... Dans l’interview qu’il nous a accordée en début d’année, il avait lancé : «À La Réunion, je suis considéré comme un ethnomusicologue. Aux Seychelles, je suis considéré comme un griot. À Maurice, je suis considéré comme un nwar tcholo.»

Les fauteuils verts de son salon sont usés. La porte de la maison toujours ouverte. Il y avait toujours du monde chez Marclaine Antoine. Pas seulement à cause du studio aménagé à domicile, mais surtout parce qu’il avait le sens de l’amitié. Toujours vert. Fier repère, comme le grand sapin.