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Commission drogue: le témoin mystère raconte sa descente aux enfers
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Commission drogue: le témoin mystère raconte sa descente aux enfers
Il se cache sous un manteau style Columbo. Il mène une double vie, son apparence n’a rien d’un parrain mafieux. Pourtant le «témoin mystère», qui a déposé devant la commission sur la drogue pour la première fois le 11 octobre, puis le 18 décembre 2017, trempait bel et bien, de son propre aveu, dans le business, avoue qu’il blanchissait de l’argent. Mais qui est cet homme ?
Le fardeau qu’il porte sur ses épaules ne l’empêche pas d’être branché mode. La coupe de cheveux est au poil, l’homme affiche un air décontracté et se prête volontiers au jeu des questions-réponses autour d’une table, en ce mercredi. Il est midi, l’endroit où a lieu le rendez-vous est bondé. Mais personne ne fait attention à celui que l’on a surnommé le «témoin mystérieux». Celui-là même qui aide la commission Lam Shang Leen à décortiquer le trafic de drogue à Maurice…
Bien calé sur sa chaise, il sirote une boisson gazeuse, avec nonchalance. Est-elle feinte ? Apparemment non. Après tout, il a côtoyé des caïds, des barons, des «personnalités» du monde de la mafia. Il en a vu des vertes et pas mûres. Il raconte sa vie, une longue descente aux enfers.
Il se confie sans retenue, raconte comment il est passé d’un jeune homme discret promis à un bel avenir à l’«ami» d’un trafiquant de drogue. Allant même jusqu’à couper les ponts avec ses proches.
«Je sais que tout ce que je dis semble sortir tout droit d’un film.» Mais il s’agit de la réalité, de son vécu. À l’époque, il a la vingtaine. Il prend de l’emploi comme gardien de prison. Très vite, il se lie d’amitié avec Curly Chowrimootoo, impliqué dans plusieurs transactions de drogue. Ce dernier lui fait des «propositions». L’appât du gain et l’argent facile l’attirent. Il accepte «d’aider» l’ami en question, se met à blanchir de l’argent.
Les souvenirs remontent à la surface. De fil en aiguille, il a fait la connaissance d’autres parrains, les plus grands trafiquants de drogue de l’île, devenant ainsi un des hommes de confiance des barons. Petit à petit, il se fait connaître, à tel point que Peroomal Veeren ou encore Siddick Islam le sollicitent à plusieurs reprises. Le «travail» ne lui fait pas peur, il mène sa barque sans rencontrer de problèmes.
«Procédures appropriées»
Ses parents, eux, ne se doutent de rien. «J’étais heureux, car je gagnais beaucoup d’argent. Mais tout cela allait être de courte durée, je ne m’en rendais pas compte…» Il avoue, entre deux battements de cil, que cette activité a «pesé» dans la balance par rapport à son mariage. Sa femme l’a-t-elle quitté ? Nous n’en saurons pas plus.
Son visage se ferme lorsque l’on aborde le chapitre concernant la commission d’enquête sur la drogue. Il avoue qu’il a pris la décision de témoigner devant Paul Lam Shang Leen et les assesseurs après avoir consulté ses avocats. «Nous avons fait la requête en passant par les procédures appropriées», lâche-til, tout en faisant part de son mécontentement car la presse aurait mal rapporté certains de ses propos.
«Je sais que les gens me jugent, surtout après ce qui a été rapporté sur moi dans les médias, mais je sais ce que j’ai vécu», admet-il, tout en s’efforçant de sourire.
Depuis ses deux auditions le 11 octobre et 18 décembre 2017, sa vie a basculé. Lors de sa première audition à huis clos, les membres de la commission sur la drogue ainsi que les enquêteurs ont pris le soin de cacher son visage. Mais la deuxième fois, il a tenu à témoigner à visage découvert, devant les journalistes présents…
Ce qui a frappé ceux présents, c’était cette assurance qu’il dégageait. Ses propos étaient cohérents, clairs, l’homme semblait étonnamment détendu, même s’il avait «de la drogue valant Rs 200 millions» en sa possession ce jour-là, selon ses dires. De la drogue qui s’est finalement révélée être du ciment, après des analyses policières.
Le début du vrai calvaire
Toujours est-il que cette audition marque le début du «vrai» calvaire pour l’ancien gardien de prison. «Mes proches ont su que c’était moi. Ils m’ont tourné le dos. Ils croient que j’ai consommé de la drogue. Cela n’a jamais été le cas mais je comprends leur réaction», avance-t-il, d’une voix basse, où l’on sent poindre de la tristesse. Il n’a même pas essayé de briser la glace depuis, même si la solitude le dévore. «C’est la première fois de ma vie que j’ai passé le réveillon seul. On ne s’est pas dit bonne année. Zot per ki mo frer perdi travay.» Même ses amis et cousins refusent de lui adresser la parole. «Avan, mwa ek bann kouzin nou ti pé zwenn pou zwé karom mé sa finn arété. Mo pa bizin démandé pou koné pou ki rézon.» S’il a décidé de vider son sac, c’est parce qu’il en avait assez de cette vie, de se faire du mal, ainsi qu’aux autres. Désormais, l’avenir, il le voit ailleurs. Il a enclenché des démarches pour partir à l’étranger. Mais avant, il veut en finir avec les «histoires» en cour tout en espérant qu’il pourra rester en vie d’ici là. Puisque des menaces de mort, il en a reçu pas mal jusqu’ici. Les auteurs ? Des trafiquants de drogue, ses amis devenus ennemis…
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