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Livre: Quand Ananda Devi veut «Manger l’autre»

16 janvier 2018, 02:15

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Livre: Quand Ananda Devi veut «Manger l’autre»

Le nouveau roman d’Ananda Devi est sorti la semaine dernière. « Manger l’autre » (photo), publié chez Grasset, est disponible depuis le 10 janvier. Il a pour personnage central une adolescente obèse, sur qui le monde entier fait peser le poids de sa difformité, notamment via Internet. 

«Manger l’autre» s’ouvre avec cette phrase glaçante : «Je me dévore dans une exquise absence de souffrance.» La quatrième de couverture présente l’oeuvre comme un, «conte de la dévoration et roman de l’excès, Manger l’autre est une allégorie de notre société avide de consommer, obsédée par le culte de la minceur et de l’image conforme.» 

Dans un article intitulé «Ananda Devi joue gros jeu», daté du 11 janvier, Le Monde des livres est d’avis que la romancière, «trace un tableau terrifiant de notre présent à travers le corps d’une obèse». À sa naissance, vu son poids déjà plus élevé que la moyenne, l’adolescente se qualifie elle-même d’«éléphanteau rose». Plus tard, au collège, son surnom est «La Couenne». L’adolescente est, «constamment clouée au pilori sur la Toile par photos et commentaires interposés, et comme condamnée à un tourment éternel», écrit Le Monde des livres. Ses proportions effrayantes, la faim qui la tenaille sans cesse, ont fait fuir les nourrices. Jusqu’à sa mère partira. La laissant avec un père convaincu que dans le ventre maternel, elle a mangé sa jumelle. 

La critique souligne qu’«une telle mercuriale risquerait de s’enliser dans un discours pesamment démonstratif. Heureusement, l’humour lucide et grinçant de l’adolescente allège la prophétie de malheur». Pour Le Monde des livres, «en prenant pour sujet un personnage autodestructeur et obèse, le nouveau roman d’Ananda Devi s’inscrit dans une longue tradition littéraire du grotesque et de la déformation. 

Comment ne pas penser à Gargantua ou au Martyre de l’obèse, d’Henri Béraud (Albin Michel, 1922), mais aussi au Malone meurt, de Samuel Beckett (Minuit, 1951), terrible description d’un être immobilisé par son agonie, comme l’héroïne de Manger l’autre l’est par son extension de plus en plus monstrueuse. Ce qu’il y a de nouveau est l’application du procédé à la critique de l’“utopie-Internet”».