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Maurice, 50 ans d’arc en fiel

7 mars 2018, 10:02

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Maurice, 50 ans d’arc en fiel

Le dessinateur Pov et le directeur des publications de La Sentinelle, Nad Sivaramen publient «Maurice 50 ans et un jour : Ce que cache l’arc-en-ciel mauricien». La construction d’une nation, croquée sans complaisance, dans le cadre des 50 ans de l’indépendance.

Maurice 50 ans et un jour .

L’invitation : suivre un petit personnage nommé Amina. Une quinqua au chignon et à la robe rouge-bleu-jaune-vert est née à Port-Louis le 12 mars 1968. «C’est la fille de toutes les cultures. Elle est joliment naïve et ne voit pas les lobbies sectaires et autres forces occultes à l’oeuvre derrière l’arc-en-ciel mauricien.» Avec elle, nous traversons 50 ans d’histoire croquée par le dessinateur Pov et racontée sans complaisance par Nad Sivaramen, directeur des publications de La Sentinelle.

Ensemble, ils publient Maurice 50 ans et un jour, à paraître bientôt. Mais c’est le sous-titre qui annonce vraiment la couleur : Ce que cache l’arc-en-ciel mauricien (1963- 2063). Un siècle qui s’ouvre avec la création de l’express en 1963, «un acte de foi en un pays qui n’existe pas encore».

Cent ans dont la moitié reste à écrire, à la lumière du demi-siècle qui vient de passer. En s’appuyant sur des parallèles : «De Rault à Lam Shang Leen», en matière de commission d’enquête sur le trafic de drogue. En voyant dans Rezistans ek Alternativ, les «héritiers barbus du MMM d’hier». Sauf que l’espoir vacille : «ce n’est pas demain la veille que nous aurons notre Obama mauricien», prévient l’auteur.

Une fois les couleurs de façade estompées, que reste-t-il de l’arc-en-ciel mauricien tant vanté ? Nad Sivaramen tranche : une île «sous la domination de quelques patronymes dynastiques et de lobbies sectaires. Ceux qui sont au pouvoir refusent de changer les règles du jeu démocratique (…) Notre passé colonial nous refuse de rentrer dans l’ère moderne, où le mérite de l’individu est prioritaire». 

Pour autant, les auteurs se défendent d’avoir fait un ouvrage historique, un essai politique ou satirique. «C’est un survol journalistique et artistique, parfois poétique. Une sélection subjective de faits liés à la laborieuse construction de la nation mauricienne».

Ces 100 pages illustrées (outre Pov, il y a un hommage appuyé à Rog, nom de plume de Roger Merven, caricaturiste de l’express aujourd’hui disparu. Ainsi que des dessins de Laval Ng) font partie des publications de La Sentinelle, pour marquer les 50 ans de l’Indépendance. «On a cru utile de nager à contre-courant des louanges qui sont déversées pour pareil événement», précise le directeur des publications.

Ainsi, il rappelle au lecteur : «Nous n’avons pas eu à nous battre pour arracher notre Indépendance des Britanniques. Mais on n’a pas su préserver l’archipel des Chagos, déraciné illégalement». Chaque page de ce livre est une page d’histoire avec plusieurs lectures possibles. Le texte principal bien sûr, au ton marqué. Le dessin de Pov qui en dit tout aussi long, voire plus.

Et puis, il y a Amina, notre conscience dans ce récit rempli de rebondissements pas toujours heureux. Comme nous, Amina n’en pense pas moins et ne se prive pas de le dire.

À l’épisode de la coalition, après une campagne où l’on a entendu entre autres slogans : «Anvlope nou nou pa oule», Amina s’écrie : «Nous sommes tous enveloppés dans le quadricolore». Au 25 novembre 1971, date de l’assassinat du sympathisant mauve Azor Adelaïde, alors que les cibles sont en fait Paul Bérenger et Dev Virahsawmy, Amina en larmes se demande : «Qui s’est soucié de la famille d’Azor ?»

Amina ne manque pas d’humour grinçant. Au moment des élections d’août 1983, elle lance : «Harish Boodhoo est un homme de la nature qui aime la montagne». Gros clin d’oeil à la déclaration de Boodhoo marquant le «début du noubanisme», chacun doit «protez so montagn ek ras move zerb.»