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Maisons en amiante: silence, on tue à petit feu…

3 juin 2018, 14:16

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Maisons en amiante: silence, on tue à petit feu…

Il y a plus de dix ans qu’ils ont été informés de la présence d’amiante dans leurs maisons. La majeure partie des maisons de la Résidence La Mivoie, Grande-Rivière-Noire, que les villageois appellent simplement la cité EDC, ont été érigées entre les années 60 et 80, après le passage de cyclones. Il s’agissait alors de donner un toit aux personnes dans le besoin.

Sauf que depuis, la cité EDC de Garde-Rivière-Noire n’a cessé de croître. Génération après génération, les maisons se sont agglomérées les unes aux autres avec, au centre des constructions individuelles, un bâti en amiante.

«Nous sommes en contact avec une matière toxique et dangereuse, qui affecte mortellement la santé des habitants depuis de longues années.»

«Il y a un problème de place à la cité EDC et les maisons vieillissent. Cela fait des années que l’on nous parle des dangers de l’amiante, sans pour autant véritablement venir en aide aux familles qui vivent dans ces maisons», lance Jasmine Toulouse, qui a grandi au coeur de la cité EDC de Grande-Rivière-Noire. «Nous sommes en contact avec une matière toxique et dangereuse, qui affecte mortellement la santé des habitants depuis de longues années.»

Ce ne sont pas les visites qui ont manqué dans le village, au dire des habitants. Les gouvernements, qui se sont succédé, ont multiplié les visites, sans pour autant rectifier le tir. Même la Commission justice et vérité a étudié la question et a soumis son rapport au gouvernement d’alors. Qu’en a-t-on fait ?

«Quand il a fallu démolir celles-ci, tout a été bloqué parce que les techniques pour la sécurité et la santé des démolisseurs n’étaient pas respectées.»

«Nous avons déposé devant la Commission justice et vérité sur l’amiante partout dans Maurice», affirme Reeaz Chuttoo, de la Confédération des travailleurs des secteurs public et privé (CTSP). «Nous avons toujours voulu soustraire l’amiante de ces maisons. Après le rapport de cette commission, un High Powered Commitee avait été mis en place et un budget de Rs 100 millions avait été proposé pour enlever l’amiante des maisons. Mais quand il a fallu démolir celles-ci, tout a été bloqué parce que les techniques pour la sécurité et la santé des démolisseurs n’étaient pas respectées.»

Le problème du village et de l’amiante est double pour la cité EDC de Grande-Rivière-Noire. D’une part, la santé des habitants est en jeu, surtout avec la surpopulation dans le village. Plusieurs générations vivent sur le même terrain aux abords d’une maison érigée avec des panneaux d’amiante. D’autre part, les maisons ont pratiquement été construites les unes sur les autres. Les familles s’agrandissent et construisent sur ce même terrain par manque de solutions pour se loger. Ce qui rend complexe la destruction de ces maisons.

Plus d’une trentaine de maisons contiennent encore de l’amiante dans leurs murs. Malgré la prise de conscience, l’attente est longue pour ces gens qui n’ont pas les moyens d’éliminer l’amiante à leurs propres frais, ce qui exaspère le village.

«Ce n’est pas normal que nous en soyons toujours à vivre dans les maisons en amiante, surtout quand nous savons que ce matériau est mortel. Pourtant, il ne semble pas y avoir de réalisation concrète pour l’éliminer de la cité EDC», poursuit Jasmine Toulouse. «S’il faut s’asseoir et discuter pour trouver une solution, je suis prête à aller rencontrer et discuter avec les personnes concernées et voir ce qu’il faut faire. Mais une solution doit être trouvée.»

Parmi ceux qui cherchent des solutions, mentionnons le Kolectif Rivier Nwar (KRN), qui tente de débloquer la situation. «Lorsque la Commission Justice et Vérité est venue faire son travail, cela a permis de recenser les maisons où l’amiante était présente. Ce n’est pas impossible de mettre en oeuvre un projet. Au KRN, nous sommes prêts à mettre en rapport les personnes dans le besoin et celles pouvant financer ou aider à éliminer l’amiante», fait part le Project Manager Jean Daniel Marie.

Du côté du ministère du Logement et des terres, Mahen Jhugroo n’a pas voulu commenter le travail de ses prédécesseurs. Par contre, le ministre déclare que «le gouvernement prend le problème de l’amiante très au sérieux. Nous l’avons étudié pour pouvoir le résoudre dans toutes les régions du pays où ce matériau est présent».