Attendre que des bâtiments en mauvais état soient rénovés. Attendre des éventualités. C’est au conditionnel qu’il faut prendre la majorité des mesures concernant les arts et la culture, dans le Budget 2018-2019. Des projets qui, pour la plupart, ne se matérialiseront que dans un futur indéterminé, s’ils se concrétisent un jour. En attendant, les artistes n’ont plus qu’à espérer.

Musée de l’esclavage - Des fonds oui, mais nul ne sait quand 

Dans le discours du Budget 2018- 2019, le Premier ministre, Pravind Jugnauth, déclare : «I am also providing funds for an Intercontinental Slavery Museum at the Ex-Labourdonnais Military Hospital in Port Louis.» Il ne cite aucun chiffre. Une vérification des annexes et des comptes du ministère des Arts et de la culture ne fournit pas plus d’indications.  

Interrogé, Pradeep Roopun, ministre des Arts et de la culture, explique : «Le Premier ministre a réitéré son engagement pour réaliser le projet, à l’Hôpital militaire. Cela après ce qui s’est passé avec l’Unesco et la buffer zone de l’Aapravasi Ghat.» Pour rappel, deux experts de l’Unesco ont été dépêchés sur place, le mois dernier, pour réexpliquer les règles en vigueur dans cette zone, ainsi que leur impact sur l’urban terminal de la Place de l’Immigration.  

Où est la somme accordée au musée de l’esclavage ? Pradeep Roopun rappelle qu’un appel d’offres pour l’étude préliminaire concernant la faisabilité du musée de l’esclavage, a été lancé en début d’année. Cinq soumissionnaires y ont répondu. Les offres sont actuellement devant un comité d’évaluation. «Les experts diront comment réaliser le projet et combien il va coûter. Une fois l’évaluation terminée, la demande de fonds sera envoyée au département des Centrally Managed Expenses of Government.»  

Qui va gérer ce musée ? «C’est prématuré de se prononcer à ce stade», affirme Pradeep Roopun. Il souligne que son ministère comprend le Mauritius Museums Council et que dans le cas du Beekrumsing Ramlallah Interpretation Centre, c’est l’Aapravasi Ghat Trust Fund qui le gère. «Valeur du jour, cette question n’a pas été posée, mais ce n’est pas le ministère qui va le gérer.»

Le concept du musée intercontinental de l’esclavage figure dans le rapport de la Commission Justice et Vérité soumis en 2011. À l’époque, le projet avait été évalué à Rs 80 millions. L’hôpital militaire, construit durant le mandat du gouverneur Labourdonnais, a été choisi pour sa portée symbolique et historique, pour rendre hommage aux esclaves au cœur de la capitale. 

Patrimoine national  

Rénovation de huit sites La rénovation de huit sites classés patrimoine national est annoncée. Parmi : la Tour Koenig, qui se trouve dans l’enceinte du centre Nelson Mandela pour la culture africaine. L’institution, en manque d’espace, espère l’aménager pour abriter ses services.  

Les travaux devraient aussi concerner les bâtiments sur l’île de La Passe, la batterie française à Pointe-du-Diable, le cimetière des Hollandais à Vieux-Grand-Port ou encore le Fort-Albert à Baie-du-Tombeau. Dans le cas du Fort Albert, la rénovation était déjà à l’ordre du jour, pour l’année financière qui s’achèvera le 30 juin.  

Au ministère concerné, on explique que la première étape consistait à nettoyer le site. La rénovation proprement dite aura lieu durant l’année financière à venir. 

Changement d’adresse - La National Art Gallery dans l’ancien hôpital à Borstal 

L’ancien hôpital de Grande-Rivière-Nord-Ouest (ex-Borstal) devra d’abord être rénové avant d’accueillir la National Art Gallery (NAG) et le National Heritage Fund. Ce qui signifie qu’il faudra passer par une série de procédures administratives avant que les deux institutions puissent s’y installer.  

Il s’agit d’un changement d’adresse pour la NAG. En 2011, le store de l’hôpital militaire avait été identifié pour abriter la galerie d’art nationale. Une inauguration officielle avait eu lieu, en présence du Premier ministre d’alors. Sauf que les travaux de rénovation de ce bâtiment délabré n’ont jamais eu lieu. La cour du bâtiment est aujourd’hui un parking géré par Landscope Mauritius. 

Aides financières - National Arts Fund : Critères toujours inconnus 

Le National Arts Fund fait durer le suspense. Dans le Budget, le Premier ministre a repris ce qu’il a annoncé le mois dernier, lors de la cérémonie des National Awards. À savoir que le National Arts Fund, doté d’un budget de Rs 50 millions, accordera le : Emerging talents grant, qui va jusqu’à Rs 300 000; le Production grant, qui monte jusqu’à Rs 800 000; le Capacity building grant, qui plafonne à Rs 300 000 et le Research grant qui va jusqu’à Rs 500 000.  

Mais les critères d’obtention de ces subventions restent secrets. Sollicité, Gaëtan Abel, président du managing committee du National Arts Fund, déclare : «Ce sera probablement dans les jours à venir, peut-être dans les 10 jours qui viennent. Je suis sans doute aussi impatient que les artistes.» 

Cinéma - Le Film Promotion Fund financera le Film Rebate Scheme 

La création du Film Promotion Fund a été avalisée par le conseil des ministres le 4 mai dernier. Il est géré par l’Economic Development Board (EDB). Le Budget 2018-2019 l’a doté d’un fonds de départ de Rs 500 millions. «Ce fonds sert à financer le Film Rebate Scheme», indique Nanda Narrainen, Head Creative Industries à l’EDB. En sus du fonds de départ, ce sont toutes les taxes payées par les équipes de tournage (Corporate tax, airport tax, income tax, TVA, etc.) qui seront canalisées vers le fonds, précise-til. Ce qui va aussi per- mettre de «mieux mesurer la contribution de ce secteur à l’économie».

Subvention musicale - Rs 10 000 additionnelles pour réaliser un album 

Le ministère des Arts et de la culture accorde une aide à la création, à ceux souhaitant réaliser un album. Une subvention qui passe de Rs 30 000 à Rs 40 000. La TVA sur l’achat d’instruments de musique sera remboursée aux artistes membres de la Mauritius Society of Authors (MASA). 

En chiffres 

Comment l’investissement dans la culture «double»  

Un chiffre fait tiquer. Celui de l’investissement dans le secteur des «arts et du divertissement». Le chiffre passe de Rs 571 millions en 2017 à Rs 1,7 milliard en 2018 à cause de la… construction du Multi-Sport Complex à Côte-d’Or. Entre 2016 et 2017, la contribution du secteur des arts et du divertissement est passée de 3% à 3,1%. En 2016, le nombre d’employés dans ce secteur est passé d’environ 11 600 à environ 12 200.