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Ils ont du métier - Eugène Moussa: l’âme du cimetière

26 août 2018, 12:15

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Ils ont du métier - Eugène Moussa: l’âme du cimetière

Vendredi en milieu de matinée. Un silence de mort règne du côté des Salines. Au milieu des tombes muettes, un homme pas très bavard. C’est le gardien du «cimetière chinois». Il ressemble à une statue en pierre, s’appelle Eugène Moussa, a 68 ans. Qu’en est-il de sa vie ?

Les souvenirs du temps d’avant le hantent. Dans sa jeunesse, quand il en avait encore le courage, il était «débarder». Non, il ne se contentait pas de montrer les muscles dans un haut moulant. «Mo ti pé saryé bal lafarinn, marsandiz tousala dans lépor.» Il a raccroché son débardeur quand il avait 63 ans.

Il y a quelques années, son coeur a failli le lâcher. Mais son heure n’était pas encore venue. Ça tombe bien, Eugène n’est pas pressé de partir. L’oisiveté, il lui fait la peau, pas question de rester là comme une âme en peine, à ne rien faire. «Lerla mo’nn gagn sa ti travay-la isi, mo bat-baté.»
 
Eugène se réveille tous les matins pendant que les morts dorment encore. «Mo vinn ouver 6-7er lerla mo resté ziska tanto 5 er parla.» Pour Rs 8 000, il doit faire le deuil sur des fêtes, dont celles de fin d’année, puisqu’il bosse tous les jours. Il ne s’en plaint pas. «Mo kontan séki mo fer. Mo gagn mo ti kas. Apré, kan mo res lakaz, bann ti zanfan fer tapaz ! Kat-sink éna koumsa !»

Dans sa petite cabane en dur, la radio joue à tue-tête. Des bouteilles de soda jonchent la table. Il n’est cependant pas du genre à «bat enn grog» pour tuer le temps. «Lontan ti pé bwar, aster inn arété akoz léker-la. Fimé ousi mo pa fimé.»

Pendant la journée, quand il n’est pas en train d’arpenter le cimetière, il parle aux tourterelles, les nourrit. «Toulézour bann ti kamarad-la vinn get mwa…» Il regarde le ciel avec un sourire, se dit qu’un jour il volera également au-dessus des nuages. «Mo pou antéré simitier St-Georges mwa…» Mais il ne compte pas mourir de sitôt. De toute façon, il n’aime pas les grands voyages. «Mo’nn al Rodrig ek Sésel samem. Pa kontan pran avion.»

Pour faire voyager son esprit, il préfère aller à la mer, à Bain-des-Dames, avec sa dame et ses «ti tapazer», regarder un match de foot ou un bon film.

Histoire de profiter de la vie en attendant le clap de fin.