Publicité
Jamil Ampomah: «Nous ne sommes qu’au début de la transformation que les technologies vont occasionner»
Par
Partager cet article
Jamil Ampomah: «Nous ne sommes qu’au début de la transformation que les technologies vont occasionner»
Quel est l’impact des technologies innovantes sur la profession d’expert-comptable ? Le directeur de l’ACCA pour le continent africain fait le point sur les changements que cette association a apportés à ses stratégies.
Votre responsabilité n’est plus limitée aux pays faisant partie de la zone subsaharienne, mais a été étendue à l’ensemble du continent africain. Quelle est la motivation derrière ce changement ?
La raison est d’ordre stratégique. Cette initiative découle d’une révision de la stratégie pour reconsidérer notre mode de fonctionnement. Des responsabilités clés ont été identifiées pour la région. Jusqu’ici, les activités de notre association étaient réparties dans les régions subsahariennes, du Moyen-Orient, de l’Afrique du Nord, de l’Asie du Sud, l’Europe et les États-Unis, les marchés émergents et l’Asie-Pacifique.
Il y a un réalignement de notre stratégie. La Chine, par exemple, est devenue une entité à part entière. L’objectif vise à nous permettre de nous concentrer sur le dynamisme qu’une planification régionale pourrait nous apporter. Ce réalignement va occasionner l’émergence de nouvelles opportunités.
Nous allons nous rapprocher davantage des principaux acteurs de notre clientèle. J’ai développé d’excellentes relations de travail avec nos partenaires de l’Afrique du Nord, des organismes nationaux, de la Fédération panafricaine d’expertscomptables. Bref, une excellente occasion pour créer plus de synergie entre nous.
Avec cet exercice de réalignement de votre stratégie, la famille s’est agrandie. Combien de membres africains compte votre organisation ?
L’ACCA compte plus de 200 000 membres dans le monde entier. 95 000 membres viennent de 44 pays. Nous avons bien peu de membres dans la région de l’Afrique du Nord. Car la majorité vient des pays africains anglophones. Nous avons pas mal de membres dans les pays africains francophones, tels le Cameroun ou la Côte d’Ivoire, en raison de la présence de la Banque africaine de développement dans ces pays.
Nous nous sommes concentrés dans les 12 pays où nous disposons d’un bureau. De par ce réseau, nous sommes en mesure d’assurer un service auprès de nos membres. Notre hub basé en Afrique du Sud nous permet d’assurer un service auprès de nos membres des pays tels que la Namibie, le Lesotho, le Swaziland où nous ne sommes pas présents physiquement. À partir de Nairobi, nous sommes en mesure de toucher nos membres basés au Rwanda, au Soudan et en Erythrée.
Un des phénomènes qui risquent de bouleverser lemode de fonctionnement de la profession d’expert-comptable est l’infiltration fulgurante des technologies innovantes dans les opérations. Quels sont les nouveaux outils de travail sans lesquels les nouvelles technologies pourraient constituer un véritable handicap pour les experts comptables ?
Hier, tout comme aujourd’hui, la technologie a toujours été et sera toujours d’actualité. La confrontation avec les nouvelles technologies n’est pas un phénomène exceptionnel pour les experts-comptables. La profession a toujours su s’adapter aux exigences de toute nouvelle technologie, que ce soit par rapport aux calculatrices, aux ordinateurs, au logiciel d’analyse des données, aux tableurs. Les experts-comptables ont toujours été très réceptifs aux nouvelles technologies susceptibles de les aider à mieux faire leur travail et à être plus efficients et efficaces.
La façon dont les technologies vont évoluer aura un impact considérable sur la profession des experts-comptables. Bien des tâches qu’exécutent aujourd’hui les experts-comptables seront automatisées. Ce qui va les inciter à répertorier les nouvelles valeurs à ajouter à leur profession. Ils vont devoir développer de nouveaux talents en vue d’apporter le soutien nécessaire à nos parties prenantes. L’accent n’est pas tant sur la capacité à se familiariser avec les technologies nouvelles que de développer sa capacité à s’adapter aux changements.
Dans quelle mesure les technologies innovantes vontelles impacter la profession des experts-comptables ?
Si on creuse davantage au niveau de l’implication des changements qui vont impacter la profession d’expert- comptable, on se rend compte que certains aspects spécifiques de la profession seront repris par la machine. Le temps jusqu’ici passé à l’exécution des tâches reprises par les technologies innovantes devra être redéployé vers d’autres sphères d’activités.
Les innovations technologiques vont fondamentalement influencer la façon dont les affaires sont conduites. Plusieurs facettes de la profession vont subir des changements comme par exemple, l’audit, l’exécution des transactions numériques. Ce qui signifie que les experts-comptables doivent tout mettre en oeuvre pour maîtriser et comprendre le mode de fonctionnement des technologies innovantes.
Nous ne sommes qu’au tout début de la transformation que les technologies innovantes vont occasionner. Cette tendance ne va pas fléchir. Avec le temps, certaines de ces technologies seront une réussite, d’autres non. Les avancées technologiques sont en marche. Les experts-comptables doivent tout le temps mettre à jour les connaissances acquises. Les principales institutions doivent être à même d’intégrer les changements dans leur mode d’opération. Des mesures appropriées doivent être mises en place. Ces institutions doivent s’assurer que les développements technologiques appropriés sont réalisés et que soient mises en place les structures devant s’assurer que la technologie fournisse à la société ce qu’il lui faut pour satisfaire ses besoins.
Qu’est-ce qui a été prévu dans le programme de formation afin de mieux armer les futurs experts-comptables face aux implications des changements occasionnés par les technologies ?
L’étape où les changements ont été les plus marquants concerne l’étape finale que l’étudiant doit amorcer avant d’opérer comme un véritable professionnel. Ces changements interviennent à deux niveaux. Il s’agit d’abord de savoir comment les étudiants vont réagir par rapport aux différents types de questions. Les réponses écrites ne suffisent pas. Les examens se font maintenant beaucoup sur ordinateur. Pour pouvoir répondre à certains types de questions, les étudiants vont devoir se visualiser dans un milieu de travail précis.
L’autre aspect de la formation qui sera touché par les changements technologiques est le contenu. Les étudiants ne seront pas jugés sur le seul critère de compétence technique. D’autres critères seront davantage pris en considération comme la compétence professionnelle et d’autres compétences que l’ancien système d’évaluation ne considérait pas autant. L’évaluation des compétences devrait être la plus complète que possible.
Il nous est impossible d’effectuer tous les changements que nécessite l’intégration d’une nouvelle technologie dans les opérations. Nous apportons un soutien à nos membres et à nos affiliés grâce à un programme de formation professionnelle continue.
Nous mettons en place toute une série d’initiatives dont l’objectif consiste à veiller à ce que nos membres soient à jour par rapport aux changements que les technologies innovantes ont occasionnés. Nous voulons être une organisation orientée vers l’avenir, déterminée à innover afin que nos membres ne soient pas en déphasage avec leur environnement de travail.
Les experts-comptables les plus à risque sont ceux qui sont réfractaires aux changements. Qu’est-ce qui a été prévu pour atténuer ce genre de risque ?
Nous avons comme objectif d’être à la pointe de la recherche. Une équipe spécifique est dédiée à la réalisation de cette mission. C’est ce qui nous permet de disposer d’outils nécessaires pour une remise à jour permanente des connaissances.
Outre cet aspect de recherche, il existe un programme de sensibilisation de nos membres grâce à la tenue régulière de conférences où interviennent des experts, tant du privé que du public. Nous devons faire comprendre à nos membres qu’ils doivent toujours se préparer à changer. Nous leur offrons les moyens et les outils nécessaires pour y parvenir.
Nos membres ont toujours fait preuve de leur capacité d’adaptation aux changements. Nous sommes confiants que la transition sera négociable. Nos membres ne doivent pas être complaisants. Ils doivent comprendre que le changement fait partie intégrante de leur profession, faute de quoi ils risquent de ne pas pouvoir progresser.
En mai l’Union européenne a promulgué le règlement général de protection des données. Comment a-t-il impacté la profession ?
Ce règlement aura d’importantes implications pour la profession. En tant qu’organisation, nous avons pris les mesures appropriées pour que nos membres puissent être en mesure de mettre en application les dispositions de ce règlement. Ses implications ne seront pas limitées aux pays de l’Union européenne, mais également au niveau des experts-comptables des autres territoires. Nous faisons de notre mieux pour disséminer les informations concernant ce règlement afin que nos membres augmentent leur capacité pour s’y conformer.
Comment la profession s’est-elle acquittée de l’obligation fiscale dictée par les États- Unis et l’Union européenne par rapport à la «Foreign Account Tax Compliance Act» et l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices ?
Nous évoluons dans un cadre économique global. Aucune organisation ne peut opérer en isolement. En tant qu’organisation pour qui l’éthique de la profession préconisée par les Européens est une référence, elle a le devoir d’inciter ses membres et ses parties prenantes à se conformer à ces obligations fiscales. Il faut examiner leur implication et tout mettre en oeuvre pour être en mesure de les appliquer. La première réaction que l’existence de telles obligations peut susciter est son impact au niveau du coût des opérations. Cet aspect est, certes, important mais il faut également tenir compte des opportunités que de telles obligations peuvent occasionner.
Publicité
Les plus récents