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Ils ont du métier, Eshan Bappoo: le marchand de bomli nous met au parfum

22 septembre 2018, 11:00

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Ils ont du métier, Eshan Bappoo: le marchand de bomli nous met au parfum

Port-Louis. Les gens courent, les marchands déambulent. Commerces et rues grouillent de vie, ça sent bon la ville. D’autres fragrances se mêlent à l’air ambiant. Un délicieux fumet de bomli sek titille les narines des passants et le museau d’un toutou, errant sur le trottoir, arborant un air de chien battu.

Dans la petite boutique d’Eshan Bappoo, 49 ans,  la «pile» de bomli saute aux yeux, enfin au nez. Cela fait des décennies que le bombay duck séché, importé d’Inde, y est vendu. «Dépi 35 an nou fer sa. Gran fami, papa, aster mwa ek mo frer.»

Il fut un temps, il y a longtemps, où il fallait débourser Rs 30 ou moins pour pouvoir déguster un satini ou enn rougay bomli. Mais ça, c’était avant. Désormais, il faut payer Rs 130 pour pouvoir agresser le pif des voisins.

Des clients défilent, ils ont le sourire. Le chiffre d’affaires sent bon, pas vrai ? Faux. «Travay inn bien tonbé, sirtou dépi ki éna bann travo partou dan Porlwi. Apré lépok inn sanzé, pa pou kapav mat ek sipermarsé.»

Après lui, il n’y aura plus personne pour prendre la relève. «Mo dé gran garson inn fini al Canada, lot la oussi pa pou vinn fer mo travay, pé al mor sa.» La tradition s’effrite comme du bomli grillé avoue Eshan, d’un air résigné. Ça pue la fin des plats d’antan.

D’où vient l’odeur si particulière de ce poisson ? Se délecte-til vraiment des cadavres dans les eaux de la Grande péninsule ? «Sa manti sa. Monn déza al l’Inde ek manz bombay duck fré. Li résamblé enn angui koumsa. Bien bon, pa pou krwar sipa bomli.» De toute façon, argue Eshan, si un bateau fait naufrage, les corps se feront bouffer par les poissons, quelle que soit l’espèce.

Quand il n’est pas en train de défendre son bomli, Eshan aime passer du temps en famille, avec son épouse ou devant la télé. Sa spécialité à lui, c’est la cuisine chinoise. Pour ce qui est de l’avenir, pas la peine d’en faire tout un plat, advienne que pourra. Le tout, c’est d’en profiter pendant qu’on en a l’occasion, avant de finir comme un bomli sous terre ou dans un four crématoire.

Pause. Avant de se laisser prendre en photo, il tient à se recoiffer. Ça sent la coquetterie à plein nez.