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Gina Jean-Charles: une chanteuse qui a du chien
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Gina Jean-Charles: une chanteuse qui a du chien
Après une longue pause, Gina JeanCharles annonce son prochain album, «Penn lavi an kouler» pour fin novembre. Engagée auprès des chiens en détresse, c’est grâce à eux que la chanteuse a repris goût à la musique.
Fifi et Tiboute ne la quittent pas d’une semelle. Au moment de rentrer dans leur enclos, c’est le mélodrame. Les deux toutous se roulent sur le dos, se traînent sur le ventre, quémandant une caresse. Mi-câline, mi-autoritaire, Gina JeanCharles se fait obéir.
C’est son nouveau rythme, à La Brasserie, Curepipe, au refuge de l’association Quatre ti lapat. Un quotidien auprès des chiens en détresse, abandonnés, maltraités, quand ils ne sont pas carrément jetés par des maîtres irresponsables. Il y a deux semaines, l’association lançait la campagne Lari pa enn labri (voir hors texte).
Concert d’aboiements. Fin novembre doit sortir Penn lavi an kouler, le nouvel album de Gina Jean-Charles. Huit titres au total. Elle en a écrit six et a coécrit Tiwawa avec Linley Mootien. Il y a aussi le single Mo sir, signé Linley Mootien, qui finance le projet. L’album, auquel collabore également le musicien Belingo Faro comprend six chansons en créole, une en français, une en anglais. Ce n’est pas un album qui parle de chiens, rassure Gina Jean-Charles. Mais d’amour. «Pran nou mem impe plis kont». Une tournée devrait suivre.
Pourquoi est-elle restée loin de la musique pendant plus de cinq ans ? Gina Jean-Charles lance : «J’avais oublié que j’ai déjà chanté, que je sais chanter.» Entièrement prise par son engagement en faveur des toutous en difficulté. Elle le dit sans détour : «C’est grâce à ces chiens que je reprends la musique. Sinon, c’est trop dur.» La musique, «il faut beaucoup de détermination pour en faire. Il faut aussi une bonne raison d’en faire». La sienne : utiliser son art pour conscientiser le public au sujet des chiens errants. C’est son message.
Il a fallu du temps pour que Gina Jean-Charles surmonte la «déception» de Fler mazik, son second album sorti en 2010. Il n’a pas marché comme elle l’espérait. «Je ne fais pas du séga pur, c’est plus difficile.» Dans une autre vie, elle a chanté dans des palaces sept soirs sur sept, pendant 10 ans. Au Dinarobin, au Morne ou au Prince Maurice, à Belle-Mare. «C’est surtout la route qui était épuisante. Bien souvent, on me déposait à la maison en dernier.»
Après une décennie comme Entertainer, survient la rencontre avec Ernest Wiehe, celui qui a jeté les bases du jazz à Maurice. Ernest Wiehe c’est son «démarrage» dans la création. Le pont vers le public. «C’est la personne la plus sage que j’ai rencontrée», témoigne la chanteuse à propos du jazzman disparu.
Gina Jean-Charles nous avait fait du bien aux oreilles avec sa reprise très personnelle d’Imagine de John Lennon. C’était en 2008. Elle s’était produite avec le quintet Ernest Wiehe, comprenant alors Noël Jean, Philippe Thomas, Kersley Pytambar et Jalill Auckbarallee. Depuis, deux de ces musiciens sont allés vers d’autres cieux. Gina Jean-Charles se moque bien des étiquettes jazz et blues qui lui collent à la peau. C’est juste sa manière de s’approprier un texte. De le faire exister.
Mordue… par le sort des chiens errants
<p style="text-align: justify;"><em>«Quand je voyais des chiens dans les rues, je disais, “ayo, get sa”. Je continuais ma route. Une fois rentrée à la maison, j’avais déjà oublié ce chien. Un jour, Linley Mootien m’a dit qu’il avait croisé un chien dans un état déplorable. Si on croise à nouveau ce chien, “bizin fer enn zafer”. Effectivement, on l’a vu. Ce chien avait une espèce de drap autour du cou, “inn fer enn lasenn avek enn tapi”. Ce chien était affolé. Quand je suis descendue de la voiture, il est venu vers moi. Et puis, il s’est sauvé. Rant dan lakour dimoun. On l’a rattrapé et ramené à la maison.»</em></p>
<p style="text-align: justify;">Ainsi commence l’histoire de Gina Jean-Charles avec les chiens. Si Misty, la première chienne sauvée n’est plus là, <em>«son âme est à La Brasserie</em>», affirme Gina Jean Charles. Viendront Zouline, Fifi et tous les autres.</p>
<p style="text-align: justify;"><em>«Au début, je n’étais pas une super “dog lover”. Cela s’est développé au fur et à mesure. C’est surtout beaucoup de détresse. Là où on va, il y a des chiens dans les rues. On en a tellement ramassé qu’à un moment donné, la cour à Sable-Noir était saturée.» </em>C’est au mois d’avril de cette année que l’équipe – avec Linley et Priscilla Mootien – trouve l’ancienne serre de La Brasserie. Loin de la scène, la chanteuse dit mener une vie «normal kouma tou dimounn». Mais qu’est-ce que la normalité quand on fait partie d’une équipe qui a recueilli près d’une centaine de chiens en détresse ? Parmi eux, celui qui, «<em>n’a pas de muscle parce qu’il était attaché tout le temps». </em>Celui qui a les deux pattes de derrière paralysées, à cause d’une méchante morsure<em>. «Chacun de ces chiens a une histoire.» </em></p>
<p style="text-align: justify;">Qu’en est-il de la sienne ? À 36 ans, Gina Jean Charles se dit officiellement sans emploi. Mais être bénévole c’est du boulot. Au point où elle s’était installée à Sable-Noir, pour être plus près des chiens. À terme, elle compte emménager à La Brasserie.</p>
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