L’Inde est le premier exportateur de produits de consommation vers Maurice. La baisse de sa roupie aurait pu avoir une répercussion directe sur le pays. Le recours au dollar américain change la donne.

37 %. C’est la baisse que la roupie indienne a enregistrée par rapport au dollar américain entre fin septembre 2012 et fin septembre 2018. Le dol- lar américain, qui valait à l’époque 52,65 roupies indiennes, s’échangeait à 72 roupies indiennes ven- dredi. Soit une baisse de Rs 19,35. En raison de la grande dépendance de Maurice aux produits importés de l’Inde, premier plus gros exportateur vers Maurice devant la République populaire de Chine, on aurait tendance à croire que cette baisse de valeur de la roupie indienne allait bénéficier au pays. Rien n’est moins sûr.

Cela aurait été peut-être possible si les échanges commerciaux avec la Grande péninsule se faisaient de roupie indienne à roupie mauricienne. Tel n’est pas le cas. La roupie indienne est une devise qui ne vaut son pesant d’or que sur le marché indien.

Ainsi donc, pour profiter de cette baisse de la roupie indienne par rapport au dollar américain, il faut obligatoirement faire comme les hommes d’affaires qui, pour investir en Inde, doivent convertir leur dollar en devises de ce pays. Il faut de moins en moins de dollars américains pour faire du business en Inde. Il en est de même des touristes qui vont y faire leur shopping.

<p>&nbsp;La baisse de la valeur de la roupie constitue une aubaine pour le Mauricien détenteur d&rsquo;un document cer- tifiant qu&rsquo;il fait partie des People ofIndian Origin vivant à l&rsquo;étranger s&rsquo;il veut investir dans un produit immobilier en Inde. Toujours à partir du raisonnement, aussi longtemps que la roupie indienne continue à se déprécier, il paiera le bien dont il veut faire l&rsquo;acquisition moins cher si on ne s&rsquo;en tient qu&rsquo;au taux de change dollar/roupie indienne. Mais l&rsquo;existence d&rsquo;autres éléments peut changer la donne. Par exemple, si la baisse de la roupie ne provoque pas une baisse du prix de l&rsquo;immobilier sur le marché. Phénomène tout à fait possible.</p>

<p>Sur le site en ligne de realestateindian.com, il est indiqué qu&rsquo;entre avril et juillet 2018, la valeur de l&rsquo;immobilier a enregistré une hausse à Delhi. Les prix par pied carré dans la région d&rsquo;Uttam Nagar oscillent entre 2 192 et 6 778 roupies indiennes contre une fourchette de 9 667 et 9 800 roupies indiennes le pied carré dans la région de Dwarka. La hausse y est de 4 % entre avril et juillet si on se fie aux indications fournies par le site en question. À Uttam Nagar, où le coût est moins élevé qu&rsquo;à Dwarka, la progression est de 5 %. Dans la région de Khirki Extention, elle est de 14 %. L&rsquo;investisseur mauricien peut recevoir plus de roupies avec son dollar, mais peut bien faire face à un phénomène de hausse susceptible d&rsquo;engloutir l&rsquo;avantage engrangé au niveau du taux de change roupie indienne/dollar américain.</p>

<p>Que se passerait-il si l&rsquo;investisseur mauricien est confronté à une situation familiale qui le pousse à vendre son bien immobilier ? Imaginons qu&rsquo;il bénéficie d&rsquo;un bon prix, mais au taux de change, il risque de constater que ses gains en dollar se réduisent comme une peau de chagrin. Et si au moment de changer son dollar en roupie mauricienne il est confronté à une situation où la roupie s&rsquo;est appréciée face au dollar ? Il touchera moins de roupies contre un dollar comparativement au moment où il les échangeait avant son départ pour la Grande péninsule.</p>

<p>Pour les touristes qui débarquent en Inde avec des dollars américains en poche, cela leur coûtera moins cher de loger dans les hôtels du pays. Avec le même budget, il leur est désormais possible de fréquenter des hôtels d&rsquo;une gamme supérieure.</p>

<p>Est-ce pour autant que le touriste mauricien qui y part en sortira gagnant avec ses dollars américains en hausse par rapport à la roupie indienne ? Pas si sûr, estime la directrice d&rsquo;une agence de voyages spécialisée dans la vente de billets d&rsquo;avion pour l&rsquo;Inde. Une baisse de la valeur de la roupie par rapport au dollar américain ne signifie pas que l&rsquo;attitude des hommes d&rsquo;affaires in- diens à l&rsquo;égard des Mauriciens a changé, de l&rsquo;avis de la responsable de cette agence de voyages.</p>

<p><em>&laquo;Les Mauriciens ont la réputation de marchander avec l&rsquo;objectif de faire baisser les prix, contrairement aux clients en provenance d&rsquo;autres pays. Leur tenue vestimentaire comparable à celle de la majorité des Indiens et leur apparence ne suffisent pas. Ils sont trahis par l&rsquo;utilisation du kreol, langue dont se servent les Mauriciens lorsqu&rsquo;ils sont à l&rsquo;étranger&raquo;</em>, explique-t-elle. Elle ajoute <em>: &laquo;Les Mauriciens sont repérés de loin et il n&rsquo;est pas interdit de croiser des hommes d&rsquo;affaires qui augmentent les prix par dix, voire plus, justement pour se prémunir de l&rsquo;astuce des Mauriciens à marchander dans le seul but de casser les prix. Il est révolu le temps où l&rsquo;on pouvait fermer les yeux et acheter les produits fabriqués en Inde à prix bas.&raquo;</em></p>

<p>Dès qu&rsquo;un projet d&rsquo;exportation de produits fabriqués en Inde est envisagé, la parité entre la roupie indienne et la devise du pays importateur, par exemple, Maurice avec sa roupie, n&rsquo;entre pas en jeu. Car les transactions se font en dollars américains.</p>

<p><em>&laquo;Il ne faut pas faire de conclusions hâtives&raquo;, </em>explique un importateur de riz basmati.<em> &laquo;Les transactions sont négociées en dollars américains.&raquo;</em> Pour l&rsquo;homme d&rsquo;affaires Aslam Kathrada, une baisse de la valeur de la roupie indienne par rapport au dollar américain ne signifie pas que le prix des produits fabriqués en Inde va baisser proportionnellement et automatiquement. Il est d&rsquo;avis qu&rsquo;il n&rsquo;est pas impossible que des producteurs d&rsquo;un même produit prennent les devants pour vendre leurs produits à moins cher face à la perte de la valeur de la roupie indienne.</p>

<p>Conséquemment, si parallèlement à la baisse de la valeur de la roupie indienne par rapport au dollar américain il y a une baisse du prix de vente de produits destinés à l&rsquo;exportation, il n&rsquo;est pas impossible que le consommateur mauricien en tire avantage. Encore une fois, tout cela dépend de l&rsquo;opérateur qui, ayant bénéficié de ces faveurs du marché indien, veuille bien en faire profiter le consommateur. Toutefois, il est bien rare qu&rsquo;un facteur, tel que la baisse de la valeur d&rsquo;une devise par rapport à une autre, suffise à lui seul pour aboutir à une baisse du prix lorsque le produit entre dans la maison du consommateur mauricien.</p>

<p>Pour l&rsquo;économiste Eric Ng, un dollar renforcé face à la roupie indienne permet d&rsquo;acheter à moins cher les produits fabriqués en Inde. D&rsquo;ailleurs, une baisse de la valeur de la roupie indienne par rapport au dollar n&rsquo;est pas pour déplaire à l&rsquo;économie indienne. Le Made in India coûtera moins cher. Un phénomène qui contribuera à booster l&rsquo;exportation indienne tant sur le marché des exportations que sur le marché local.</p>

<p>Pour l&rsquo;homme d&rsquo;affaires mauricien qui a débarqué en Inde avec ses dollars afin d&rsquo;y investir, la baisse de la roupie indienne peut constituer un avantage. C&rsquo;est le cas du groupe Ciel, qui a installé une unité de production en Inde. &laquo;35 % de notre production sont pour le marché local&raquo;, explique Harold Mayer, Chief Executive Officer de la filière textile. Les deux tiers de sa production en Inde, c&rsquo;est pour l&rsquo;exportation. Harold Mayer voit dans la baisse de la valeur de la roupie indienne par rapport au dollar américain un élément pouvant donner des ailes à la compétitivité des produits en provenance de l&rsquo;Inde. Le groupe peut envisager une baisse de ses coûts de production. Ce qui devrait séduire les acheteurs.</p>