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Ayesha Lutchigadoo: «Mon mari est en prison à cause de la politique»

6 octobre 2018, 18:07

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Ayesha Lutchigadoo: «Mon mari est en prison à cause de la politique»

La charge de trafic de drogue qui pesait sur son époux, Kusraj, a été rayée devant la Bail and Remand Court, mercredi. Ayesha Lutchigadoo donne sa version des faits de toute cette rocambolesque affaire.

Depuis quand êtes-vous mariée à Kusraj Lutchigadoo ?
Depuis 2012. On se connaît depuis 2006. J’étais élève dans un collège dans le Nord quand je suis tombée amoureuse de Kusraj. On fréquentait le même groupe d’amis.

Que faisait-il comme profession à ce moment-là ?
Il avait une scierie à Moka. Il livrait des copeaux de bois aux poulaillers. L’autre partie de son temps, il retapait et revendait des voitures endommagées ou accidentées qu’il achetait – dans les Rs 120 000 par véhicule – dans les ventes à l’encan. Ce qu’il faisait toujours jusqu’à son arrestation en avril. Il envisageait même d’ouvrir un showroom.

Votre époux est donc un mécanicien ?
Il n’a jamais été mécanicien (le ton monte) ! C’est l’Anti-Drug and Smuggling Unit (ADSU) qui, lors de l’enquête, a dit que celui qui retape des voitures est un mécanicien. Alors qu’à route Bassin, où on habite, tout le monde connaît mon mari comme un amateur de voitures de sport et de tuning depuis qu’il a 18 ans. Il en a 33 ans aujourd’hui. Il a aussi été pilote de rallye, de slalom.

Comment expliquez-vous votre train de vie, dont les grosses cylindrées que conduit votre mari ?
Mon mari a réussi grâce au tuning des voitures. D’ailleurs, nous avons produit les contrats de vente des voitures aux enquêteurs. Nous avons aussi vendu la scierie en 2016- 2017. L’erreur qu’il a faite, et ça je l’admets, c’est qu’il n’a pas toujours été en règle avec le fisc. Mais nous sommes en train de régler tout ça.

Combien de voitures possède la famille ?
Nous en avons deux. Une m’appartient. (NdlR, elle n’a pas souhaité préciser la marque des voitures). La BMW à bord de laquelle mon mari a été arrêté n’est pas à lui. Elle appartient à la compagnie d’événementiel avec qui il travaillait et qui avait un contrat avec une boîte de nuit à Grand-Baie. Il venait de démarrer dans ce créneau. Quant aux autres voitures, il les achetait avant de les revendre.

Est-il aussi propriétaire d’une salle de gym ?
C’est son frère Rajoo qui l’est. Ce dernier est également entraîneur de kickboxing.

Quand avez-vous rendu visite à votre époux pour la dernière fois ?
Mardi, à la veille de sa dernière comparution par visioconférence en cour.

Kusraj Lutchigadoo dans sa scierie, à Moka. Celle-ci a été vendue en 2016.

Est-il toujours incarcéré à La Bastille ?
Il a été transféré à Beau-Bassin hier (NdlR, jeudi) pour bonne conduite. Par contre, ce que je ne comprends pas, c’est pourquoi il a été incarcéré à La Bastille pendant six mois. Surtout qu’il n’a rien fait de mal.

Sortir «prendre l’air» pendant une heure en pleine incarcération. Ce n’est pas donné à tous les détenus…
Mon mari n’a rien fait. Ce sont des policiers qui ont ouvert sa cellule. Après tout, ce sont eux qui ont les clés. Lui, au contraire, il y est retourné alors qu’il aurait pu en profiter pour s’évader. Une personne qu’on qualifie de highly dangerous ne quitte pas la prison pour y retourner.

L’avez-vous rencontré hors de la prison ce fameux soir ?
J’ai déjà répondu à cette question. Non. Mais, j’aurais bien voulu.

Où est-il allé donc ?
Dans les alentours du centre de détention de Vacoas.

Est-ce la première fois que votre mari sortait «prendre l’air» ?
Je ne peux vous le dire. Je n’ai aucun contact là-bas.

Votre époux a dû vous raconter ce qu’il a fait pendant une heure hors de la prison ce soir-là…
Comme il l’a dit, il est allé prendre l’air car il est asthmatique et claustrophobe. Mais cela a duré moins d’une heure.

Connaissez-vous les trois policiers qui ont été suspendus dans cette affaire ?
Pas personnellement. Pour moi, ils se ressemblent tous lorsqu’ils sont en uniforme. Je me rendais au Vacoas Detention Center chaque semaine pour porter de l’eau, des biscuits et des vêtements à mon mari.

Dans quel état d’esprit est-il depuis que la charge de trafic de drogue a été rayée contre lui ?
Comme je vous l’ai dit, la dernière fois que je l’ai vu, c’était la veille de sa comparution. Il est toujours stressé depuis qu’il est enfermé car il sait qu’il est innocent. Le fait que le commissaire Vinod Appadoo vienne de changer les règlements à la prison n’arrange pas les choses. D’une visite par semaine, ceux en détention provisoire comme mon époux ont désormais droit à seulement deux visites par mois. Ce n’est pas évident, surtout avec un fils d’un an et demi qui réclame son père mais que je n’ai pas le droit d’emmener à la prison.

Deux autres charges, à savoir «holding materials for the purpose of using them for the unlawful production of dangerous drug» et blanchiment d’argent, pèsent toujours sur lui…
Je ne comprends pas. Si vous venez chez moi là, j’ai une douzaine de boîtes de thé en ce moment. Et de l’acétone dans ma chambre pour enlever du vernis à ongles. Cela signifie-t-il que ma maison est un laboratoire ? Il n’y avait ni éprouvette ni Bunsen Burner chez ma mère. Comment l’ADSU a-t-elle pu dire que c’était un laboratoire ? Pourquoi n’a-t-elle pas produit des photos de ce qu’elle décrit comme un laboratoire en cour ? Par contre, j’ai des photos des dégâts qu’elle a faits chez ma mère.

Ce n’est pas une douzaine mais bien 112 boîtes de thé, une certaine quantité d’acétone et du benzène que l’ADSU a saisis chez votre mère. Que faisait votre mari avec tout cela ?
Le thé se trouvait dans la cuisine. On avait fait provision pour ma mère qui est diabétique, en raison de la pénurie de thé qu’il y avait sur le marché. L’acétone était dans le store car on venait de rénover la maison. Il y avait aussi des pots de peinture et des pinceaux. De toute façon, nous avons l’esprit clair. Nous allons nous battre en cour.

Et les Rs 301 350 qui étaient en sa possession le jour de son arrestation ?
L’ADSU l’a arrêté dans la voiture un vendredi. Cet argent était dans le véhicule et pas dans la maison. Il allait quitter ce montant à la boîte de nuit à Grand-Baie. Personne n’habite dans la maison de mes parents. Ma mère est venue habiter chez moi depuis le décès de mon père. Des fois, Kusraj passe là-bas pour vérifier si tout est en ordre.

Personne n’y habite alors qu’il y avait 112 boîtes de thé dans la cuisine…
Quand il y a des événements dans la famille, on part là-bas.

Quelles sont les relations entre votre époux et Ashish Dayal ?
C’était que son compagnon de cellule. Moi, je ne le connais pas.

Quid des relations entre votre époux et des politiciens
C’est à cause de la politique qu’il est en prison et qu’on a tous ces soucis aujourd’hui. Mon époux n’est pas un trafiquant de drogue. Il a été piégé. J’ai plein de choses à dévoiler, mais j’ai peur pour ma sécurité. Je le ferai au moment venu.

Votre époux semble aussi avoir de très bonnes relations avec des policiers…
Il entretient de bonnes relations avec presque tout le monde, y compris dans la police. Mais il a aussi des ennemis, des gens qui sont jaloux de son succès à cause des voitures qu’il roule et la vie qu’il mène.

C’est vous qui avez alerté le Premier ministre sur le résultat négatif du «Forensic Science Laboratory». Comment avez-vous eu cette information ?
De gens honnêtes de l’ADSU. Nous avons pris nos précautions en informant le Premier ministre de peur que d’autres ne trafiquent n’importe quoi.