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Médicaments périmés: comment se fait le contrôle ?
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Médicaments périmés: comment se fait le contrôle ?
Il y a peu, un sérum «expiré» aurait été «administré» à un patient, qui est décédé par la suite. Ce cas parmi d’autres attire l’attention sur le contrôle des médicaments périmés dans le secteur public. Quelles sont les conditions de stockage et de vérification de ces produits ? Le point.
Quel est le parcours des médicaments distribués par les hôpitaux et dispensaires ? Quelles sont les conditions de stockage et de vérifi- cation de ces produits ? Comment dispose-t-on des déchets médicaux au sein du secteur public ? Autant de questions qui se posent sui- vant plusieurs polémiques, dont le cas récent d’un patient décédé à l’hôpital de Flacq.
La famille du défunt a allégué, en septembre, qu’un sérum expiré avait été injecté au patient. Interrogé, l’in- firmier aurait affirmé que ce produit, bien que périmé, ne pouvait causer la mort. C’est du moins ce que sou- tient Ram Nowzadick, président de la Nursing Association.
D’autre part, Bambous devrait voir l’aménagement d’un incinéra- teur de déchets médicaux. Mais ce projet suscite des grincements de dents retentissants. Le conseil de village tente d’avoir des explications des autorités sur les implications de la création d’une telle infrastructure.
«Bambous n’est pas un dépotoir. S’il faut descendre dans les rues, nous le ferons. Nous devons défendre les droits des habitants», affirme John Anse- line, président du conseil de ce village. L’instance enverra bientôt une correspondance aux ministères de la Santé, de l’Environnement et des Collectivités locales pour solliciter une rencontre d’information.
«Nous avons besoin d’éclaircissements. A-t-on fait une évaluation des risques ? Déjà, un précédent projet de solid waste causait beaucoup de pro- blèmes de santé et des odeurs nauséabondes, souligne-t-il. On a pu faire arrêter cela après quelques années. On a gagné une bataille, mais pas la guerre. Maintenant, avec l’incinérateur, que vont-ils faire encore?» Nous avons sollicité les ministères concernés pour une déclaration, en vain.
Ces deux situations captent l’attention sur le traitement des médicaments périmés. Selon une source des autorités, tout stock de médicaments est entreposé à la Central Supplies Division (CSD), à Plaine Lauzun. Parallèlement, deux autres espaces sont sollicités : le Tobacco Board et l’Agricultural Marketing Board, à Moka.
«Dans ces espaces, on conserve principalement les médicaments nécessitant un contrôle de température», affirme notre source. Outre le thermostat, l’air, l’humidité et la lumière consti- tuent également des facteurs clés sur la conservation, estime Arshad Saroar, président de la Pharmaceutical Association of Mauritius (PAM).
Les conditions de stockage varient selon la spécificité indiquée sur le produit. Par exemple, la majorité des médicaments nécessitent une conser- vation à température ambiante. Ainsi, dans un entrepôt, la température ne doit pas être supérieure à 25°C, précise Arshad Saroar. Ce taux doit notamment être maintenu pour les sirops et les antibiotiques.
Contrôle régulier
Par contre, certains produits injectables, comme l’insuline, doivent être placés sous réfrigération, notamment entre 2 et 8°C, soutient le président de la PAM. D’autres néces- sitent une congélation variant entre -15 et 0 °C ou une conservation au frais à une température variant entre 8 et 15 °C, ajoute-t-il.
Par la suite, les médicaments sont transportés vers les centres de santé, selon le stock demandé. Ceux néces- sitant une conservation à une tem- pérature froide sont acheminés dans des boîtes réfrigérées pour éviter la rupture de la chaîne de froid. Ensuite, ils sont placés dans les établissements publics respectifs.
Notre interlocuteur affirme que la date de péremption des médicaments doit être vérifiée régulièrement. «Cela dépend du lieu de stockage. Au CSD, des techniciens contrôlent le produit trois mois avant l’expiration. À l’hôpital, cette vérification est effectuée par le Store Manager. Et en salle, c’est sous la responsabilité du Nursing Officer. Mais des contrôles doivent se faire à tous les niveaux», indique-t-il.
En dépit de ces précautions, cer-tains médicaments peuvent se dégrader avec le temps, prévient Arshad Saroar. Ce qui aboutit à la formation de substances plus dangereuses et à l’augmentation de la toxicité. «La tétracycline (NdlR, un antibiotique) en est le principal exemple. Elle contient une poudre jaune pâle qui devient brunâtre et visqueuse. L’usage est alors risqué et, ce, même quand la date de péremption n’est pas atteinte.»
Dans d’autres cas, la capacité allergène du médicament s’accentue. C’est le cas de la pénicilline. Parallèlement, certains suppositoires, crèmes et pommades peuvent fondre sous la chaleur. Leur utilisation est alors déconseillée.
Quant aux sels de réhydratation orale, ils sont efficaces sous forme régulière de poudre blanche. Toutefois, l’exposition à l’humi- dité les rend compacts, brunâtres et insolubles. Selon le responsable de la PAM, ils sont impropres à la consommation même si leur date indique le contraire.
Si les médicaments ne présentent aucune détérioration au fil de la conservation, la date d’expiration indique leur stabilité dans le récipient d’origine cacheté. Celle-ci dure entre 3 et 5 ans. Pour des produits fragiles, l’usage s’astreint à un an, voire 2 ans. «Quand les médicaments sont sur le point d’expirer, la Procurement Unit écrit à la maison mère pour demander quelle est l’extension audelà de cette date. Dans certains cas, on peut les utiliser entre un à trois mois», affirme Ram Nowzadick.
Zone centrale
Que se passe-t-il lorsque les médicaments sont périmés ? Une entrée manuelle est effectuée dans des ledgers des centres publics de santé, indique notre source. Tout stock détecté dans un dispensaire ou autre centre de soins périphériques est alors acheminé vers une zone centrale.
Par exemple, pour la région de Port-Louis, qui compte environ 26 centres de santé, les médicaments périmés sont canalisés vers l’hôpital Dr A. G. Jeetoo. De là, des Procurement And Supply Officiers procèdent à leur destruction.
Selon nos interlocuteurs, plusieurs méthodes sont employées à ces fins. Cela dit, la «plus recommandée par l’Organisation mondiale de la santé est l’incinération». Toutefois, il faut aussi prendre en considération le type de médicaments. Par exemple, l’insuline nécessite une incinération sous une température d’environ 1 200 degrés.
Une deuxième méthode est la décontamination des produits pouvant être toxiques, notamment ceux contre le cancer. L’enfouissement est aussi la solution pour certains médi- caments qui sont enterrés puis scellés sous le béton. Mais il est recomman-dé que ces derniers soient d’abord mis en capsule.
«Les produits sont conservés dans leur emballage primaire, comme des flacons. Puis, on les place dans un tonneau en acier ou en plastique à 75 % de sa capacité. L’espace restant est rempli par du plastique, du sable, du ciment ou de l’argile. Le tonneau est alors fermé puis enfoui ou mis en décharge», avance Arshad Saroar. Enfin, précise-t-il, on peut remettre certains médicaments périmés à une décharge. Cette méthode s’applique pour des solutions vitaminées, d’intraveineuses, des sirops pour la toux, des collyres, entre autres. Selon notre interlocuteur, ils peuvent être dilués dans un large vo- lume d’eau avant d’être éliminés.
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