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Christopher Perrine: un serial cambrioleur gracié par la présidence

20 octobre 2018, 20:30

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Christopher Perrine: un serial cambrioleur gracié par la présidence

C’est à y perdre son latin. Christopher Perrine, 33 ans, celui-là même qui a commis un vol de bijoux et de carte bancaire, vendredi dernier, au domicile de la DCP Guneeata Aubeeluck, possède pourtant un casier judiciaire chargé. Cet habitant de la rue Boniah, à La Tour Koenig, a été arrêté à plusieurs reprises pour des délits commis dans divers endroits de l’île : vols avec violence, vagabondage, possession d’héroïne. Il a été condamné à la mi-2009 pour deux cas précis : vol avec utilisation d’une fausse clé et viol sur une touriste française de 16 ans à Blue-Bay. Ce dernier délit lui a valu d’écoper d’une condamnation de 18 ans de prison.

Selon l’article 51 de la Reforms Institution Act de 1988, toute personne ayant commis un délit sexuel sur un(e) mineur(e) ou sur une personne handicapée n’a pas droit à la remise de peine, ni d’être libérée sur parole. Emprisonné à la prison de Beau-Bassin d’abord en 2009, puis transféré à la prison de Melrose lors de son ouverture en raison du fait qu’il est un «high profile detainee», Christopher Perrine aurait dû recouvrer la liberté en 2027.

Or, après avoir purgé près de la moitié de sa peine, soit neuf ans, Christopher Perrine, qui a plus d’un tour dans son sac, a écrit en 2017 à la commission de pourvoi en grâce par l’entremise de son avocat, Me Erickson Mooneapillay, pour demander le pardon présidentiel. Dans sa pétition, il a argué qu’il avait laissé derrière lui sa vieille mère et qu’il fallait qu’il s’en occupe et qu’il avait aussi l’intention de se marier. Il a ajouté qu’à sa libération, il trouverait un emploi vu qu’il a appris un métier en prison.

Selon une source proche du dossier, un des responsables de la prison aurait objecté à cette demande. Et comme c’est le cas pour toutes les demandes de pardon présidentiel, tous les délits pour lesquels Christopher Perrine a été condamné, de même que ceux commis en prison, ont été mentionnés dans cette pétition soumise à la commission.

L’express a tenté, hier, vendredi 19 octobre, de joindre sir Victor Glover, président de la Commission de pourvoi en grâce, pour savoir si les antécédents judiciaires de Christopher Perrine avaient été considérés par les membres de la commission avant que celle-ci ne recommande son pardon à la présidence de la République ? Sir Victor Glover n’était pas libre pour un commentaire.

Pardon présidentiel

Interrogé sur les conditions menant au pardon présidentiel, Cassam Uteem, ancien président de la République, a fait savoir que la présidence n’a pas le choix. «Lorsque la Commission de pourvoi en grâce demande le pardon présidentiel, elle ne fournit que ses recommandations. La présidence n’a d’autre choix que d’y agréer. Si la présidence a eu préalablement vent du cas à travers la presse, par exemple, elle peut réclamer un réexamen de la demande de pardon. Mais la recommandation finale appartient à la commission», explique-t-il.

Il faut dire que Christopher Perrine sait se jouer de ses victimes. Selon certaines d’entre elles ayant requis l’anonymat, il est toujours bien habillé et s’exprime dans un français parfait. «Il est élégant tant dans la tenue que dans le propos, si bien que l’on peut aisément penser que l’on a affaire à un cadre de banque», déclare une victime.

À une autre personne prise dans ses filets, Christopher Perrine se serait exprimé posément et froidement en ces termes : «Je vous demanderai de ne pas vous retourner. Autrement, je vous tue. Je vais me rendre au distributeur automatique et si vous m’avez donné un faux code ou si le compte n’est pas approvisionné, je reviendrai et je vous éliminerai.» Il se déplace toujours à moto, avec son casque intégral.

Il a un modus operandi très particulier et n’hésite pas à commettre plusieurs vols le même jour. Par exemple, selon nos informations, après avoir perpétré le vol chez la DCP Aubeeluck vendredi dernier, il s’est rendu à Curepipe et est entré avec un double de clé chez une femme seule et l’a menacée avant d’emporter ses bijoux et sa carte bancaire. Le même soir, il a attaqué un vieux couple dans sa maison à Curepipe. Il leur aurait soustrait de l’argent en liquide.

Lors de son arrestation dans la soirée de lundi, il avait en sa possession un trousseau d’environ 200 doubles de clés de la marque Union, un faux revolver, une cagoule qu’il place généralement sur la tête de ses victimes et des outils pour forcer les serrures. Il écoulait le fruit de ses rapines et mettait l’argent recueilli sur son compte bancaire.

Christopher Perrine a l’art de se faire prendre en pitié. Mardi, lors de la reconstitution des faits chez la DCP Aubeeluck, il a imploré son pardon en pleurant. Lors de cet exercice, une des voisines l’a reconnu comme étant celui qui est entré chez elle avec un double de clé pour commettre un vol. Mercredi, lors de son interrogatoire par la Criminal Investigation Division de Curepipe, il a avoué trois cas de vols dans la région.

Plusieurs de ses victimes, surtout des personnes âgées, ne rapportent pas le cas à la police par crainte de représailles. Christopher Perrine ne fait aucune distinction entre ceux qu’il dépouille, s’attaquant tant aux femmes qu’aux personnes âgées. Il choisit généralement la mi-journée pour commettre ses forfaits en sachant qu’il n’y a qu’une personne âgée avec des enfants dans la maison ou que celle-ci est vide.

L’une de ses victimes se demande, au vu du nombre de récidives qui se montent à plus de 70 % dans les prisons, s’il n’est pas temps pour les autorités de faire publier la photo des récidivistes au casier aussi chargé que Christopher Perrine et qui sont remis en liberté ? Cela, afin que le public soit sur ses gardes.

Dans l’optique de brosser le portrait le plus fidèle qui soit de ce serial cambrioleur, l’express s’est rendu à son domicile de La Tour Koenig hier matin dans l’espoir d’y rencontrer sa mère ou l’un de ses proches, mais a trouvé porte close. On sait seulement qu’il n’a pas complété sa scolarité secondaire et qu’il se dit artisan.