Publicité

Olivier Mamet: «Investir sur le média numérique coûte moins que sur le classique»

7 novembre 2018, 21:30

Par

Partager cet article

Facebook X WhatsApp

Olivier Mamet: «Investir sur le média numérique coûte moins que sur le classique»

Olivier Mamet fait partie de cette jeune génération dont la carrière se conjugue au digital. Il a fait de l’accès des sociétés mauriciennes aux opportunités du marché numérique une de ses priorités.

Votre parcours est assez atypique. Après une brillante carrière en Australie, vous voilà revenu au pays avec en prime l’avantage d’avoir pu retenir des clients qui étaient les vôtres durant votre séjour australien. Comment réussit-on un tel exploit ?
Je ne pense pas forcément qu’on peut classifier cette démarche d’exploit, mais beaucoup plus comme la manifestation d’un des nombreux avantages associés à des avancées technologiques qui s’ouvrent à nous aujourd’hui. À l’époque où je démarrais ma carrière, je me souviens encore de la comptable qui devait venir un jour spécifique pour avoir accès à l’ordinateur où se trouve le programme de gestion de comptabilité. Aujourd’hui, ce même travail se fait à distance. Le programme de gestion peut être accessible d’un iPad ou d’un ordinateur, quel que soit l’endroit où se trouve la personne. Cette décentralisation permet d’optimiser les heures de service.

«L’île Maurice n’a pas à rougir devant les autres pays sur beaucoup de points.»

Avec le développement du monde virtuel, la notion d’espace et de temps est remise en cause. Avez-vous trouvé un pays suffisamment préparé pour faire face à un monde où, de plus en plus, la technologie va prendre une part décisive dans l’exécution des tâches, tant au niveau de la communication que de l’échange de données ?
Maurice n’a pas à rougir devant les autres pays sur beaucoup de points. L’île étant plus petite, il est tout naturel que les avancées et les changements sont plus progressifs par rapport à ce qui se passe dans certains pays étrangers. C’est une situation somme toute normale vu notre profil en termes de démographie et de superficie. Beaucoup de compagnies comprenant le management qui en fait partie, ont l’esprit très ouvert à ce sujet. C’est une prédisposition qui nous permet d’avancer plus vite dans le domaine virtuel. Elle nous offre également la possibilité ensuite de nous positionner comme un des pays phares du continent africain.

À votre retour à Maurice vous avez lancé Sandbox (www.sandbox.mu) qui se propose de montrer le chemin vers la création de revenus sur le marché du monde virtuel. Quels sont les facteurs à l’origine de ce choix stratégique
Ce choix était inévitable. Le numérique est partout. Toute personne ou presque aujourd’hui possède un smart- phone ou une tablette digitale. Ce sont des objets qui l’accompagnent partout, que ce soit lors de son déplacement dans les systèmes de transport en commun, sur le lieu du travail, au moment du déjeuner, le soir, pendant les weekends. Ce sont autant d’opportunités qui permettent à des compagnies de se faire voir et d’interagir avec des clients potentiels où qu’ils soient. De manière générale, les investissements sur les médias numériques sont moins élevés que sur les médias classiques. Les campagnes de communication sur les nouveaux médias sont à la fois plus simples, plus rapides. Les possibilités pour les optimiser sont plus nombreuses. L’organisation d’une campagne digitale permet de connaître une audience de façon quasi instantanée et de connaître également l’avis des clients. C’est un exercice qui offre également la possibilité de constituer des bases de données.

«Une bonne stratégie est le point de départ incontournable pour entrer sur le marché digital.»

En quoi le digital constitue-t-il un facteur de croissance ?
L’un des avantages qui sont associés au digital, c’est qu’il permet à un opérateur de se différencier de ses concurrents tant au niveau de la qualité des produits qu’à celui des services associés. Ainsi, la réactivité, la simplicité, la rapidité, l’accessibilité et la personnalisation sont autant des atouts inégalables du numérique. Au niveau de la gestion même d’une entreprise, les statistiques que génère le digital permet de repérer les messages qui ne font pas mouche par rapport aux messages percutants qui marchent bien auprès des consommateurs. Il est même possible de savoir à la roupie près combien rapporte une campagne, le mes- sage qui rapporte le plus, à n’importe quelle heure de la journée et sur n’importe quel appareil. Le digital a une puissance de frappe énorme. Rien n’est plus facile que de capter un maximum de personnes en un minimum de temps. L’élimination des frontières physiques, la vente de produits sur différents marchés sans se déplacer devient un jeu d’enfant, et ce 24/24 et 7/7. C’est un phénomène qui, en ce moment même, fait débat dans les médias à cause de ses répercussions politiques et de la prolifération des “fake news”.

Que faut-il à une entreprise mauricienne conventionnelle pour revendiquer sa part des opportunités sur le marché virtuel ?
Il faut au préalable une bonne stratégie. C’est le point de départ incontournable. Que ce soit un bon site Web, une super application mobile, une page facebook, un compte instagram, linkedin ou autre, il faut un plan d’attaque. Il faut mettre en place les bons dispositifs de suivi pour être en mesure d’étudier les statistiques et voir où les opportunités se font valoir le plus. Ensuite, arrêter ce qui ne marche pas et développer ce qui marche le mieux.

Le gouvernement a montré de bonnes prédispositions pour s’ouvrir aux technologies innovantes telles que le blockchain, l’intelligence artificielle ou encore la robotique. Dans quelle mesure, bien que nous soyons un marché éloigné des grands centres de développement, ne pouvons-nous pas échapper au développement alimenté par ces technologies innovantes ?
C’est une très bonne décision de la part du gouvernement. Nous évoluons dans un monde où la présence physique n’est plus aussi primordiale qu’il y a dix ans. Cette décentralisation du travail, couplée aux bonnes opportunités que le gouvernement offre, permet, à beaucoup d’innovateurs de venir s’installer à Maurice. Ce frottement permet à la popula- tion mauricienne d’avoir accès à des gens qui «think outside the box». C’est une situation qui offre la possibilité à notre population d’élargir sa vision de la technologie.

«Les investissements sur les médias numériques sont moins élevés que sur les médias classiques.»

Maurice a toujours souffert du phénomène de «mismatch» qui se manifeste par une disparité entre les études académiques et les besoins réels des industries. Nous voici confronté à une forme d’industrie qui n’a pas de frontière. Comment éviter que ce phénomène de «mismatch» nous empêche d’embrasser les développements que les technologies innovantes pourraient susciter dans le pays ?
C’est un état d’esprit qui requiert une envie d’apprendre. Dans certains domaines, l’académique n’arrive pas à s’adapter à la vitesse des changements en question. Il y a une part de responsabilité des étudiants d’essayer de penser au-delà de la sphère académique. Les besoins des industries restent des facteurs pour lesquels il va falloir chercher des solutions appropriées. Avec un accès infini au savoir-faire qu’offre l’Internet, il suffit souvent de ne poser qu’une question dans un forum ou de faire une recherche sur le Web pour trouver la réponse escomptée ou même être orienté dans la bonne direction.

Nous assistons, dans beaucoup de cas, à un essoufflement des secteurs traditionnels en termes de croissance. Quels sont les domaines du marché virtuel où il existe de véritables opportunités pour les compagnies mauriciennes d’accroître non seulement leurs revenus mais d’assurer une croissance constante de leurs activités respectives ?
Il y a plusieurs réalités. Le marché n’est pas infini. En conséquence, la croissance infinie ne peut pas exister. Le domaine d’activités importe peu. Il faut transformer ce qui existe déjà par la technologie, voire proposer des solutions nouvelles tout en relevant le défi d’améliorer l’expérience des consommateurs en réponse à leurs nouveaux besoins. L’opportunité supplémentaire aujourd’hui est de pouvoir s’attaquer à des marchés géographiquement éloignés et de cibler vraiment des démographies spécifiques.

On associe souvent les technologies innovantes à une perte d’emplois en raison de leur capacité de faire un certain nombre d’opérations à la place de l’homme. Faut-il établir une limite par rapport aux possibilités des technologies innovantes ?
Dans l’absolu j’aurais tendance à dire oui. Mais, dans la réalité, je ne pense pas que ce soit possible. Nous ne prenons pas de décisions en tant que collectif et pour établir des limites, il faut que tout le monde joue le jeu.