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Steve Sowamy: sa carte maîtresse, c’est Picasso

24 novembre 2018, 18:53

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Steve Sowamy: sa carte maîtresse, c’est Picasso

Marchand d’art d’origine mauricienne, Steve Sowamy est au cœur de l’exposition Picasso qui s’ouvre aujourd’hui au Blue Penny Museum. C’est lui qui a approché les collectionneurs qui ont prêté la quarantaine d’œuvres réunies au Caudan jusqu’au 15 janvier 2019.

Dans sa période bleue, Steve Sowamy a eu des sueurs froides. Marchand d’art d’origine mauricienne, il quadrille l’Europe depuis une trentaine d’années. Jusqu’au dernier moment, des Picasso ont bien failli ne pas faire le voyage vers Maurice. L’exposition consacrée à l’un des artistes les plus importants du 20e siècle s’ouvre aujourd’hui au Blue Penny Museum.

«L’île Maurice n’est pas connue comme une destination culturelle, mais pour les belles plages et les hôtels très luxueux. On n’a jamais entendu parler d’une exposition prestigieuse à Maurice.» La faute à une méconnaissance du pays et une «certaine condescendance». Des collectionneurs lui ont demandé si Maurice est un pays démocratique. «Plusieurs fois je leur ai dit que Maurice, ce n’est pas la bamboula.»

Steve Sowamy a, on le sent, déployé des trésors de diplomatie pour expliquer que «quand bien même je n’ai pas vécu à Maurice, cela reste mon pays. J’étais très vexé. On m’a même demandé une garantie d’État». Alors que l’exposition Picasso est une initiative privée du Blue Penny Museum, musée fondé par la Mauritius Commercial Bank. Son argument-choc auprès des collectionneurs: «Ce musée de Maurice a le timbre le plus cher au monde.» Sur papier, il y a surtout les précautions de City Brokers qui «est allé chercher Swan Insurance, qui s’est réassurée auprès de la Lloyds Bank»

Dans sa période rose, Steve Sowamy carbure à l’amitié. L’exposition Picasso est le fruit de six mois de travail, en étroite collaboration avec Emmanuel Richon, le conservateur du Blue Penny Museum. Après dix ans d’amitié.

«Les gens qui vous confient leur tableau, vous confient leur argent.» Beaucoup d’argent. Du bout de son accent frenchie, Steve Sowamy ne dit pas «client», mais «ami» quand il parle de ces privilégiés qui ont les moyens d’acheter de l’art. «On part en vacances ensemble, je suis invité sur leur yacht, dans leur résidence d’été en Corse. C’est une question de confiance.»

Dans le milieu, dit-il, on le surnomme «the exotic bird». Un drôle d’oiseau qui a convaincu Isabelle Duval Lemonnier, «l’une des grosses fortunes de France», à prêter des Picasso. Elle fait le déplacement pour voir l’exposition, affirme Steve Sowamy. Dans cet univers, la confiance passe aussi par l’intermédiaire des cabinets d’avocats, des certificats d’authenticité, catalogue raisonné àl’appui.

Pour la présente exposition Picasso, Steve Sowamy est catégorique. Toutes les œuvres exposées au Caudan sont des originaux. «La provenance est indiscutable», dit-il. Il y va de sa réputation, de sa crédibilité. Et de celle du Blue Penny Museum. «Si on commençait à dire qu’à Steve Sowamy, il ne faut pas faire confiance, il faudrait que je change de métier.»

Ce métier – Steve Sowamy préfère dire passion – lui est venu au hasard des rencontres. Né en 1963 à Pamplemousses, il quitte Maurice à l’âge de sept ans, avec ses parents, Tony et Damy. «Mes parents avaient du mal à gagner leur vie ici.» Son père vend des voitures, sa mère ne travaille pas.«Je ne suis pas né riche, je me suis fait tout seul.» Ils tentent l’aventure à Paris, dans les années 1970.

Aîné de cinq enfants, Steve Sowamy fait des études de droit parce qu’il veut être diplomate. Étudiant, il décroche un poste à la Bourse de Paris et s’apprête à se marier. Quinze jours avant la cérémonie, c’est la séparation. Pendant deux ans, Steve Sowamy se cherche. Il décide de se lancer dans le domaine artistique. Lors d’un vernissage, il rencontre Pascal Robinet, «qui travaille pour Francois Mitterand», alors président de la république française.

Steve Sowamy le suit à un rendez-vous avec un commissaire-priseur. «On m’enferme dans une pièce où il avait Picasso, Renoir, Degas. J’étais complètement fasciné. Je me suis dit : «C’est ça que je veux faire.» C’est comme cela que tout a commencé.» Il suit Pascal Robinet au Luxembourg, quand celui-ci s’y installe.

À la question où habitez-vous, Steve Sowamy répond : «Je suis un homme du monde.» Nous insistons. Il avance alors qu’il vit «à Genève, au Luxembourg et à Paris». Sa carte de visite, elle indique que Samskara, sa société de «fine arts», est à Londres.

Comment s’est-il formé aux beaux-arts ? Steve Sowamy fait valoir que son œil s’est affiné grâce à la fréquentation des musées. Pour ses ventes, il suit aussi les conseils de Bernard Depretz, restaurateur d’art.

 A-t-il une collection personnelle ? «Très peu, parce qu’un marchand de tableaux est toujours pauvre. Il achète tout le temps, il n’a jamais d’argent, mais je sais que vous n’allez pas me croire», répond Steve Sowamy.

 

Ventes prestigieuses

<p style="text-align: justify;">Quelles sont les œuvres de prestige que Steve Sowamy a vendues ? La discrétion d&rsquo;usage ne l&rsquo;empêche pas de raconter qu&rsquo;en 2012, il a vendu un Picasso <em>&laquo;très cher&raquo;.</em> Il cite le chiffre de <em>&laquo;2,7 millions d&rsquo;euros&raquo;</em>. Quelle est l&rsquo;œuvre la plus chère qu&rsquo;il a vendue ? Le marchand d&rsquo;art cite à nouveau Picasso. <em>&laquo;Ce n&rsquo;était pas l&rsquo;œuvre la plus chère que j&rsquo;ai vendue, mais probablement celle que j&rsquo;aime le plus.&raquo; </em>Douze ans plus tard, il vérifie toujours si l&rsquo;œuvre est à nouveau sur le marché. <em>&laquo;Je l&rsquo;ai vendue en 2006 à 2 millions de dollars. Aujourd&rsquo;hui, elle vaut dans les 6 à 8 millions de dollars. La cote de Picasso ne cesse de grimper.&raquo;</em> À son palmarès, il cite une collection de 29 sculptures d&rsquo;Henry Moore, un tableau de Pierre Soulage ou encore une sculpture de Prosper d&rsquo;Épinay.</p>

 

 

Une expo à Rs 2,5 millions

<p style="text-align: justify;">Combien coûte l&rsquo;organisation de l&rsquo;exposition Picasso ? Emmanuel Richon cite le chiffre de Rs 2,5 millions, <em>&laquo;fret compris&raquo;. </em>Les assurances font <em>&laquo;environ Rs 800 000 pour les deux mois d&rsquo;exposition&raquo;,</em> souligne le conservateur du <em>Blue Penny Museum.</em> La valeur totale des œuvres exposées tourne autour des <em>&laquo;Rs 200 millions&raquo;.</em></p>