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Renvoi de la réforme électorale: une porte de sortie pour Pravind Jugnauth ?
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Renvoi de la réforme électorale: une porte de sortie pour Pravind Jugnauth ?
Après sa décision de reporter le vote sur le Constitution (Amendment) Bill au Parlement, le mardi 11 décembre, le Premier ministre en a étonné plus d’un. Alors qu’il a insisté pour la présentation du projet de loi sur la réforme électorale et maintenu les débats parlementaires pendant quatre jours malgré le manque de consensus, il a décidé de renvoyer le vote à la dernière minute. Ce, sans pourtant s’engager à apporter des amendements au texte initial.
Pour les observateurs, Pravind Jugnauth évite ainsi un échec de son projet de réforme tout en s’offrant une porte de sortie vis-à-vis des Nations unies et du judiciaire. Sur le plan politique, cela lui ouvre la voix à des négociations avec le Mouvement militant mauricien (MMM). Car, depuis mardi, les spéculations ont repris sur d’éventuelles tractations d’alliance entre les deux «frères ennemis».
Le leader de l’opposition, Xavier Luc Duval, et le chef de file du Parti travailliste au Parlement, Shakeel Mohamed, ont tous deux promptement dénoncé les tergiversations autour de la réforme électorale pour un rapprochement. «Une nouvelle fois, la réforme sera utilisée comme prétexte pour discuter alliance», affirme l’opposition.
Que dit le Mouvement socialiste militant (MSM) ? «Même s’il y a des voix au sein du MMM et du MSM qui poussent vers ce rapprochement, le renvoi a aussi été décidé sur d’autres facteurs», confie un député du parti soleil.
Manque de consultations
Le gouvernement n’était pas assuré d’obtenir la totalité de 45 voix au sein de la majorité. Ce qui aurait grandement embarrassé le Premier ministre qui aurait été accusé de n’avoir pas su convaincre les élus dans ses propres rangs. D’ailleurs, le no 2, Ivan Collendevelloo, a reconnu hier : «Il y a eu des désaccords en interne.»
Si l’opposition déplore le manque de consultations au sujet de la réforme, du côté de la majorité aussi, certains se seraient plaints de cette absence de débats. «Nous avons découvert les grandes lignes en même temps que la population», raconte un backbencher. Ce dernier précise que les appréhensions portaient principalement sur la proposition de faire disparaître le Best Loser System (BLS). Anwar Husnoo, Bashir Jahangeer et même Showkutally Soodhun, entre autres, n’étaient pas contents.
Pour Jocelyn Chan Low, le BLS a une valeur symbolique pour une partie de l’électorat. «L’éliminer à un an des élections pourrait s’avérer désastreux pour le gouvernement. D’autant que cela pourrait l’affaiblir vis-à-vis d’une communauté spécifique, et au profit de l’opposition travailliste.»
Conscient de la sensibilité du BLS, Pravind Jugnauth aurait ainsi trouvé une face-saving device vis-à-vis des Nations unies et de la Cour suprême. Car pour sa défense, il pourrait dire qu’il a proposé un projet de loi mais que, malgré les efforts et sa bonne foi, sa réforme n’a pas été acceptée. Le gouvernement devait proposer un projet de loi qui supprime de facto la déclaration ethnique en éliminant le BLS et en introduisant une dose de proportionnelle. Ce, afin d’éviter des sanctions devant la Cour suprême ou le Privy Council, ou même une invalidation des résultats des prochaines élections générales.
Ainsi, Pravind Jugnauth opte pour une stratégie diplomatique visant à lui éviter des reproches sur le plan international ainsi qu’une décision défavorable de la Cour suprême. Ce qui fait dire à nombre de spécialistes que les chances que la réforme électorale aboutisse l’année prochaine sont quasiment nulles.
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