Publicité

À la rencontre de «Touni Midi»

16 décembre 2018, 21:00

Par

Partager cet article

Facebook X WhatsApp

À la rencontre de «Touni Midi»

Les questions ont fusé sur les réseaux sociaux cette semaine. Cela, après que la photo d’un homme nu comme un ver, déambulant dans les rues de Ste.-Croix, à proximité du poste de police d’Abercrombie, a fait son apparition sur Facebook. Faute de pouvoir l’identifier, certains l’ont surnommé «Touni Midi», en opposition au fameux «Touni Minwi». Qui est-ce?

Nous l’avons rencontré jeudi soir, 13 décembre, à proximité d’une station d’essence, dans la région de Ste.-Croix. L’homme ne semble pas être en possession de toutes ses facultés mentales. Il affirme qu’il s’appelle Christopher Naiko. Il dort à la belle étoile depuis un an. C’est en face de la station d’essence Shell qu’il passe la plupart de ses nuits.

«Wi, tou lé swar li dormi lamem», confirme le gardien. Ce dernier fait ressortir que Christopher n’agace personne. Une vieille cabine téléphonique, supplantée par les smartphones, lui sert de fourre-tout. «C’est là qu’il garde ses affaires parfois.» Même s’il n’a pas grand-chose à entreposer.

«Mo péna kamarad mwa. Mo pa bizin led. Mo korek mwa… Mo bien kontan ki kikenn vinn koz ek mwa. Mo péna personn mwa.»

Christopher n’est pas très loquace. Il n’a pas vraiment envie de faire la conversation. «Mo péna kamarad mwa. Mo pa bizin led. Mo korek mwa», répète-t-il sans cesse. Mais il finit quand même par baisser la garde. «Mo bien kontan ki kikenn vinn koz ek mwa. Mo péna personn mwa», confie-t-il, les larmes aux yeux.

Christopher assure qu’il a 30 ans. Il n’est pas marié, n’a pas d’enfant. Sa mère habite à Batterie-Cassée. Il a aussi des frères et sœurs, qui ne veulent pas de lui. «Mo pa lé nanyé. Mo lé zis viv ek mo mama. Ou pou koz ek li pou mo kav rétourné?» S’il a été mis à la porte, c’est parce qu’il a été happé par la drogue. «Mé mo’nn arété ek sa aster. Pa enn bon zafer sa. Mo sagrin…»

Il essaie, contre vents et marées, de redémarrer une nouvelle vie. Sauf qu’il n’a pas d’emploi, pas de maison, pas de soutien… Pourquoi se promenait-il tout nu dans la rue ? (NdlR, on lui montre une photo de lui nu sur Facebook). «Mo pa koné», se contente-t-il de dire, avec un sourire gêné.

«Mo anvi met enn soulié dan mo lipié», lâche Christopher subitement. De renchérir : «Mo pa kav dir ou kifer mo ti touni. Mo gagn onté. Mo’nn bliyé.» Serait-ce des séquelles dues à la consommation de drogue ? Il ne répond pas.

Il commence brusquement à s’éloigner. On le suit. Il nous montre son lit : un bout de carton posé à même le sol, en bordure de route. À côté, quelques morceaux de pain, que les chiens errants ont commencé à grignoter.

Comment fait-il pour obtenir de la nourriture ? Est-ce qu’il est tout de même capable de faire des petits boulots ? La réponse est floue. «J’ai eu un grave accident, je suis tombé. Je me suis grièvement blessé. Depuis, je ne suis plus le même. Je ne peux pas travailler», fait-il ressortir, en montrant les cicatrices qu’il porte à la tête et à la main.

«Éna fwa gagn enn ti zafer pou manzé, éna fwa non. Zordi mo finn gagn briani.»

Il passe ses journées, seul à errer dans les rues de Ste.-Croix. «Éna fwa gagn enn ti zafer pou manzé, éna fwa non. Zordi mo finn gagn briani», dit-il fièrement en montrant son take-away vide. Avant de s’éloigner rapidement et nous laisser en plan, prétextant qu’il a soif. «Démin ou vinn get mwa…»