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De MedPoint au Privy Council: la question de la Capital Gains Tax devient inévitable à Londres
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De MedPoint au Privy Council: la question de la Capital Gains Tax devient inévitable à Londres
23 décembre 2010. Pravind Jugnauth, ministre des Finances, signe un mémo qui permet la réallocation de Rs 144 millions qui vont servir à acheter la clinique Med- Point, dans laquelle sa sœur détient 23,59 % des actions. Le 24 décembre, le dossier est envoyé au ministère de la Santé. Le 25 décembre étant Noël, jour férié, et le 26 décembre un dimanche, un «departmental warrant» – procédure officielle où l’Accountant General confirme l’autorisation de décaissement – est émis le lundi 27. Le mardi 28 décembre, le chèque de Rs 144 701 300 est émis par le ministère de la Santé.
Huit ans plus tard, après avoir été condamné à 12 mois de prison pour conflit d’intérêts, par la cour intermédiaire, après avoir été acquitté par la Cour suprême, l’actuel Premier ministre se retrouve en face du Judicial Committee of the Privy Council pour un ultime procès qui l’acquittera ou le condamnera définitivement. L’express a révélé ces deux derniers jours que l’ICAC, institution qui a enquêté, puis réclamé et obtenu la condamnation de Pravind Jugnauth, avant de s’opposer farouchement à son acquittement en Cour suprême, a fait un indécent virage à 180° pour, cette fois, s’opposer à l’appel du Directeur des poursuites publiques (DPP). Et ce, par l’intermédiaire d’un Queen’s Counsel (QC) britannique, Stuart Denney. L’express est en possession du Perfected Written Case que Denney a soumis au Privy Council et a souligné les contradictions entre cette présente position de l’ICAC et celle adoptée en 2015 devant la Cour suprême. Mais ce n’est pas l’unique élément frappant.
Dans le paragraphe 5 de ce document, Stuart Denney écrit, pour expliquer que Shalini Malhotra, la soeur de Pravind Jugnauth, n’avait aucun intérêt personnel dans cette signature de ce dernier : «Ce n’est pas comme ci cette réallocation qu’approuve le frère d’une actionnaire allait accélérer les procédures pour éviter que la compagnie paie une taxe qui allait entrer en vigueur.»
Mobile de la signature
Or, Stuart Denney ne croit pas si «bien» dire. Un des sujets ayant ponctué le scandale MedPoint a toujours été la Capital Gains Tax que MedPoint Ltd n’a pas payée, puisque cette taxe entrait en vigueur le 1er janvier 2011. La clinique a été vendue «in extremis» à l’État. Sinon MedPoint Ltd aurait dû s’acquitter de 15 % de ces Rs 144 millions, moins la valeur initiale des propriétés et moins la valeur des équipements (ceux-ci n’étant pas concernés car la taxe attrait uniquement à la vente immobilière).
La poursuite n’a cependant jamais pu établir que l’évitement de cette taxe était le mobile de la signature de Pravind Jugnauth, juste avant son entrée en vigueur. Car, lors des audiences en cour intermédiaire, les magistrats ont, dans un ruling à la suite d’une motion de la défense de Pravind Jugnauth, écarté l’élément «Capital GainsTax», puisqu’il ne figurait pas sur la liste des particulars (terme technique qui veut dire dossier à charge détaillé). La poursuite s’est débrouillée sans faire valoir et a obtenu la condamnation de Pravind Jugnauth, avant de perdre devant la Cour suprême, qui a estimé que la poursuite n’a pu prouver «l’intention criminelle » du leader du Mouvement Socialiste Mauricien.
Il ne faut cependant pas s’empresser de dire que cette «maladresse» de Stuart Denney ouvre une boîte de Pandore inespérée pour le bureau du DPP. Certes, sans cette phrase de Denney, le Privy Council n’aurait peut-être pas pu considérer la Capital Gains Tax (le Conseil privé ne se penche pas sur des éléments nouveaux), cette phrase permet au DPP d’avoir un droit de réponse et ainsi ressusciter le non-paiement de la Capital Gains Tax, mais Denney ajoute : «Même si c’était le cas, il n’y a jamais eu de preuves en ce sens.» Ce qui est techniquement vrai puisque les preuves, censées être démontrées en cour intermédiaire, ne l’ont jamais été.
Ce qui est cependant certain, c’est que dans son objectif de prouver le Mens Rea – l’intention criminelle de Pravind Jugnauth quand il signe – la poursuite tentera certainement, avec cette nouvelle donne, de faire de la Capital Gains Tax évitée, son cheval de bataille, mardi.
Exclusif: l'intégralité des arguments en écrit de l'ICAC au Privy Council
Denney, un spécialiste de la… défense des accusés !
L’ICAC a-t-elle poussé sa logique de se ranger dans le camp de Pravind Jugnauth jusqu’au bout ? Le contenu pro-acquittement du dossier soumis au Privy Council le prouve et on serait tenté d’observer que le choix de son représentant britannique n’est pas anodin. Stuart Denney est un spécialiste de la défense des accusés dans les affaires criminelles, allant des affaires de drogue, d’homicides, des délits de drogue jusqu’aux délits en col blanc, aux fraudes et au blanchiment d’argent. Son CV est impressionnant. Admis en 1982 au barreau, il monte au grade de QC en 2008. Il a paru dans les grands procès très médiatisés en Angleterre, par exemple, celui de la plus longue enquête jamais entreprise pour un meurtre, résultant en l’acquittement d’un condamné ayant passé huit ans derrière les barreaux.
Les Law Lords considéreront les soumissions écrites de l’ICAC
Si les Law Lords n’écouteront pas les plaidoiries de l’ICAC dans le procès MedPoint, ils vont prendre en considération ses soumissions écrites. La décision a été prise il y a quelques jours. Les Law Lords ont estimé que la position de l’ICAC est très similaire à celle de Pravind Jugnauth et, de ce fait, les plaidoiries de la commission anti-corruption ne seront pas utiles. Cependant, les soumissions écrites, rédigées par Stuart Denney QC, seront bel et bien prises en considération. De ce fait, seuls les avocats représentant le bureau du Directeur des poursuites publiques et de Pravind Jugnauth prendront parole.
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