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Alain Saverettiar: offrir une autre expérience du shopping

4 mai 2019, 14:45

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Alain Saverettiar: offrir une autre expérience du shopping

Après une vingtaine d’annéesdans l’industrie sucrière, Alain Saverettiar a écouté le chant des sirènes de la grande distribution, tout en évitant ses écueils, pour offrir une autre expérience de shopping aux Mauriciens. Désormais à la tête de quatre supermarchés, il se prépare à entrer dans la cour des grands avec l’ouverture prochaine d’un hypermarché.

Ce qui frappe le plus avec cet homme de 56 ans, qui mène quasiment une vie d’ascète, c’est son humilité. Pour Alain Saverettiar, point d’entrée par une porte dérobée pour gagner ses bureaux à l’étage du supermarché King Savers à Beau-Vallon. Il pénètre comme tout le monde par l’entrée principale du supermarché et avant de prendre les escaliers latéraux, il s’arrête pour dire quelques mots à ses connaissances et clients. Outre les prix abordables qu’il pratique à King Savers, il est clair que c’est son accessibilité et sa modestie qui le rendent si populaire. 

Si Alain Saverettiar a choisi de maintenir de petits prix, c’est qu’il sait ce qu’est de naître et de vivre dans une famille modeste. Son père, François, était gardien d’écoles primaires et sa mère, Lourdes, qui a fêté ses 85 ans hier, était une femme au foyer avec quatre enfants à charge. Après des études à l’école primaire de la région, Alain Saverettiar entre au collège du St Joseph, où il goûte à la discipline des frères irlandais. À la fin de sa scolarité, comme il a besoin de travailler, il prend le premier emploi venu et c’est dans le département de comptabilité de la sucrerie de Riche-en-Eau qu’il démarre dans la vie active.

Il se passionne pour les chiffres et en particulier les statistiques. Il fait son expérience dans deux autres sucreries, à savoir Mon Trésor Mon Désert et Savannah. Il aurait sans doute terminé sa carrière dans cette industrie s’il n’avait décidé d’aider sa belle-soeur en quête d’une activité génératrice de revenus. La famille Saverettiar possédant un bâtiment de 200 mètres carrés à Jaynarain Road, Beau-Vallon, Alain Saverettiar décide de le transformer en supérette. L’ouverture officielle de cette boutique a lieu le 12 décembre 1996, date de naissance de l’aînée de son inséparable ami Chand.

Le succès est immédiat car il n’y a pas de boutiques dans la localité et les prix qu’il pratique sont doux. Alain Saverettiar et son épouse, Sameela, qui est fonctionnaire, ont alors de longues journées de travail car dès qu’ils terminent leur premier emploi, ils rejoignent la supérette pour aider dans la vente et faire les comptes jusqu’à 20 heures.

«Lorsqu’on s’engage dans quelque chose, il faut s’y investir à fond.»

Ils sont vite victimes de leur réussite car ils se retrouvent à l’étroit dans la supérette. Sentant que les clients sont prêts à les suivre et grandement épaulé par Kavi Doolub, responsable de marketing dans une radio privée, qui devient son conseiller, bras droit et responsable de marketing et de communication, Alain Saverettiar prend la décision d’investir dans l’achat d’un terrain et la construction d’un véritable supermarché de 2 000 mètres carrés à Beau-Vallon. Pour ce faire, il contracte un emprunt de Rs 45 millions. «Je me suis endetté jusqu’au cou», reconnaît-il. Pour le nommer, il ne va pas chercher loin. Il prend les deux premières syllabes de son nom de famille, soit Saver auxquelles il ajoute un S et place devant le mot King pour envoyer comme signal aux clients qu’ils seront les rois de l’épargne en faisant leurs courses dans son supermarché.

Le notaire qui s’occupe de l’enregistrement du nom de la compagnie est dubitatif quant à l’acceptation de cette marque commerciale par le ministère du Commerce. Or, à la surprise générale, la marque est acceptée. Pour Alain Saverettiar, il n’y a pas d’autres explications que «la main de Dieu». Comme une de ses phrases fétiches est «Zoli sa», Kavi Doolub lui conseille d’adopter le slogan : «Zoli, zoli prix !» et l’affaire est adjugée. À quelques heures de l’ouverture du premier King Savers, le 23 mai 2008, 200 personnes font le pied de grue devant ses portes. 

Alain Saverettiar, qui s’est retiré de l’industrie sucrière trois ans plus tôt, se donne à fond dans le travail. Il cultive la proximité avec la clientèle et ne prend que deux ou trois jours de congés en famille par an. «On a un choix dans la vie. Lorsqu’on s’engage dans quelque chose, il faut s’y investir à fond. Je voulais rendre heureuses des familles de consommateurs et je voulais aussi assurer l’avenir de mes filles.»

Un pari réussi sur toute la ligne au fil des ans car le nombre moyen de clients qui fréquentent quotidiennement son supermarché est de 1 400. Ce qui fait qu’en l’espace de dix ans, Alain Saverettiar a été en mesure de rembourser l’emprunt initialement contracté. De plus, sa fille aînée, Axelle, 27 ans, a complété ses études de médecine et sa cadette, Gwenella, 23 ans, a terminé ses études en génie environnemental.

À force de gérer son supermarché, de prendre le pouls de la clientèle et dans l’optique de mieux lutter contre la concurrence, Alain Saverettiar se dit que son enseigne est sous-représentée. Il décide alors de saisir les opportunités qui vont se présenter. La première est une proposition de rachat de business de la part du propriétaire du supermarché VIPWay à Goodlands. Un challenge relevé après une sérieuse étude de marché. C’est le 25 juin 2014 que ce second King Savers, dont le slogan est You’re in Good Hands, voit le jour. Projet qui a porté ses fruits bien que l’établissement soit situé dans un centre commercial excentré. «Nous avons su positionner notre offre et mieux communiquer.» Bien que le centre commercial où se trouve ce second King Savers soit actuellement en liquidation, après deux ans, ce supermarché faisait 70 % du chiffre d’affaires de celui de Mahébourg.

Lorsque la compagnie Mon Choisy Mall Ltd approche Alain Saverettiar pour lui proposer de reprendre l’emplacement de 3 000 mètres carrés occupé autrefois par Pick n Pay, il n’a pas hésité en raison de la position géographique de ce centre commercial. Et ce, quoique ce Mall ait longtemps peiné à se tailler une réputation. Le 25 novembre 2016, le troisième King Savers ouvre ses portes au Mon Choisy Mall et à ce jour, il fait trois fois le chiffre d’affaires de Pick n Pay, soit l’équivalent de 50 % de celui de Beau-Vallon.

Une autre proposition est tombée dans l’escarcelle d’Alain Saverettiar. Le propriétaire du supermarché Value Max, occupant un espace en location dans un bâtiment situé sur la route principale de Goodlands, a voulu lui revendre son fonds de commerce. Plusieurs autres enseignes étaient intéressées par cette reprise, mais c’est Alain Saverettiar qui a été choisi. Son explication tient à «l’humilité a primé sur l’arrogance». Le mot Extra a été ajouté à cette deuxième enseigne King Savers pour Goodlands. Supermarché qui a démarré ses opérations le 14 décembre dernier. Le slogan de cette enseigne est You’re 2finitely in good hands. Alain Saverettiar a de quoi être satisfait car à eux deux, ces supermarchés de Goodlands font un meilleur chiffre d’affaires que celui de Mahébourg.

Estimant qu’il faut toujours rendre à la communauté une partie de ce que la vie lui a apporté, Alain Saverettiar a rejoint depuis 2010 le Rotary Club de Mahébourg, qu’il a présidé en 2013-2014. Pendant deux années consécutives, il a offert des bourses d’études supérieures à trois enfants méritants parmi sa clientèle et continue à faire du social. Ce végétarien à domicile, qui nage trois fois la semaine deux kilomètres dans le lagon de Pointe-d’Esny, est satisfait de sa vie car il a tout ce qu’il lui faut et il a assuré l’avenir de ses filles. Ses entreprises sont plutôt florissantes. Mais il n’en a toujours pas assez.

Dans six mois, il ferme le premier King Savers de Beau-Vallon pour investir un local deux fois plus grand dans le centre commercial d’Ascencia Ltd, à Mahébourg. On ne parle plus là de supermarché mais d’hypermarché. «Tout y sera différent et grâce à notre accord avec le partenaire français MDD, on proposera plus de 1 000 différents produits. Il y aura une section textile aussi. La seule chose qui ne changera pas sera nos prix, qui resteront abordables.»

D’ici novembre, il ouvrira un autre King Savers Extra à Souillac et il a prévu l’ouverture de deux autres enseignes en 2020. Serait-il devenu boulimique ? «Non», réplique ce décoré de la République en 2016. «Mais c’est en forgeant qu’on devient forgeron. Je me suis pris au jeu. Ensuite, j’ai 350 employés qui ont en moyenne 30 ans et qui ont des familles à charge. C’est en rendant ma clientèle et mes employés heureux que je peux l’être pleinement.»