Publicité
Fonctionnaires suspendus: les procédures appelées à changer
Par
Partager cet article
Fonctionnaires suspendus: les procédures appelées à changer
Il s’agit d’un cas concret: celui du Dr Abdul Yusuf Boodhoo. Ancien fonctionnaire, il avait été suspendu de ses fonctions lorsqu’une première enquête a établi qu’il était coupable de négligence médicale. Il y a quelques jours, ce gynécologue, qui depuis a pris sa retraite, se retrouve condamné à purger une peine de prison de six mois. Selon des chiffres obtenus par l’express, 175 fonctionnaires font l’objet d’une enquête et d’une suspension depuis des mois, voire des années. Mais ils touchent toujours leurs salaires.
«Plus de la moitié de ces fonctionnaires sont des policiers. Même s’ils n’ont plus l’autorisation de travailler, ils sont toujours rémunérés», souligne-t-on à l’hôtel du gouvernement. En d’autres mots, ils sont payés… pour ne rien faire ! Combien ces interdictions coûtent-elles à l’État ? Le gouvernement dépenserait au moins Rs 60 millions par année pour ces salaires.
Au ministère de la Fonction publique, on dit être conscient de la situation. Et l’on souhaiterait réformer le système. «Des recommandations en ce sens ont été faites à la Public Service Commission (PSC). On attend», indique-t-on. D’ajouter toutefois qu’une cinquantaine de fonctionnaires ont été «recalled», c’est-à-dire appelés à reprendre du service, même s’ils font l’objet d’une enquête. «Un des moyens de ne pas gaspiller de l’argent public serait de muter ces fonctionnaires dans d’autres départements. C’est ce qu’on essaie de faire dans la mesure du possible. La situation s’est quelque peu améliorée un peu partout dans les ministères», fait-on valoir.
Toutefois, on explique que plusieurs obstacles se dessinent. Notamment les procédures judiciaires qui prennent du temps. «La loi est claire, les fonctionnaires doivent être payés même quand ils sont suspendus. Mais ils n’ont droit à aucun privilège. Pas de travelling grant ou de bonus de fin d’année par exemple», souligne-t-on.
Au niveau de la PSC, on avance vouloir revoir les règlements, estimant qu’il y a abus du système actuel. Car plusieurs de ces employés du gouvernement trouvent un second boulot ou profitent du fait qu’ils ne travaillent plus, même s’ils sont toujours payés, pour reprendre des études. «Le gouvernement est doublement pénalisé par ce système car il perd non seulement des ressources mais aussi de l’argent», fait-on valoir.
Au sein de la PSC, on recommande la mise sur pied d’un comité disciplinaire ou d’un tribunal qui pourrait être présidé par deux juges et deux assesseurs. Le tout, sous l’égide de la PSC, afin de «fast track» les cas qui impliquent la suspension des fonctionnaires. On soutient également que 80 % des employés du secteur public déjà suspendus sont interdits de leurs fonctions car ils font l’objet de cas criminels.
L’inspecteur Jaylall Boojhawon: «La présomption d’innocence doit primer»
<p style="text-align: justify;">Plus de 50 % des fonctionnaires suspendus sont des policiers. Selon l’inspecteur Jaylall Boojhawon, président de la <em>«Police Officers Solidarity Union»</em> (POSU), cette situation est occasionnée par le fait que les policiers constituent la majeure partie de la fonction publique. <em>«Nous sommes 13 000 au total.»</em> Selon la loi, avance-t-il, il faudrait qu’il y ait des <em>«criminal proceedings»</em> instituées contre des fonctionnaires, dont des policiers, pour qu’ils soient suspendus. </p>
<p style="text-align: justify;"><em>«Dans la pratique, ce règlement n’est pas toujours respecté. Dans plusieurs cas, dès qu’une accusation provisoire est établie contre un fonctionnaire, le “Supervising Officer” décide de l’interdire de ses fonctions»</em>, fait valoir l’inspecteur Boojhawon. Il affirme que dans de nombreux cas, des policiers sont suspendus pour des délits mineurs. <em>«La présomption d’innocence doit primer, même si les enquêtes durent des fois pendant plusieurs années»</em>, fait-il ressortir. À ce propos, le président de la POSU concède que les procédures sont longues. Ce qui entraîne un gaspillage des fonds publics, <em>«même si le fonctionnaire doit être payé»</em>. Il estime que ce serait mieux que les procédures disciplinaires puissent se faire plus rapidement, <em>«dans l’intérêt de tous»</em>.</p>
Qu’est-ce que les congés de préretraite ?
<p style="text-align: justify;">Si des spéculations allaient bon train quant à un <a href="https://www.lexpress.mu/article/352790/police-commissaire-mario-nobin-sur-depart">départ anticipé du commissaire de police</a> (CP), Mario Nobin, le mercredi 15 mai, le principal concerné a affirmé que <em>«ma retraite est prévue en septembre, et c’est à cette date-là que je partirai»</em>. Il n’a, ainsi, pas pris les congés de préretraite auxquels il a droit, pour continuer à travailler. Qu’est-ce donc ces congés de préretraite ?</p>
<p style="text-align: justify;">À l’approche de la retraite, tous les fonctionnaires ont droit à des congés, lesquels sont communément appelés<em> «vacation leaves»</em>. Soit des jours de congé auxquels l’employé de la fonction publique a droit, dépendant de ses années de service, mais qu’il n’a pas pris et qui sont se sont accumulés au fil des années (voir plus loin). Trois options sont offertes au fonctionnaire, explique le syndicaliste Rashid Imrith.</p>
<p style="text-align: justify;">Dans le premier cas, l’employé reste chez lui, et arrivé la date de sa retraite, on lui paie pour l’équivalent de ces congés non-pris. Deuxième option, on rémunère la personne pour ces congés et sa retraite prend effet immédiatement. Et finalement, l’option la plus rare, est celle où le fonctionnaire ne prend pas de congés de préretraite et continue à travailler. À terme, l’État lui paie l’équivalent des congés qu’il n’a pas pris. C’est le cas de Mario Nobin. Au préalable, ce dernier a dû obtenir l’aval du ministre mentor pour cette dérogation.</p>
<p style="text-align: justify;"><em>«C’est très rare qu’un fonctionnaire bénéficie de ce privilège. Si tous les fonctionnaires ont le droit de faire cette demande, ce n’est que très rarement qu’elle est agréée. Il s’agit d’une option qui s’applique surtout dans le cas d’un haut fonctionnaire, où l’exigence du travail fait qu’on ne peut pas le laisser partir tout de suite»</em>, explique Rashid Imrith. Quid du fait que, après son départ en septembre, Mario Nobin devra de toutes les façons être remplacé ? <em>«Suite au départ du CP, la hiérarchie devra être respectée. Et, de ce fait, c’est le Deputy Commissioner of Police, Khemraj Servansingh, qui devrait prendre la barre</em>», précise l’inspecteur Jaylall Boojhawon, de la Police Officers Solidarity Union.</p>
<p style="text-align: justify;">Sauf que dans la fonction publique, explique Rashid Imrith, ce n’est qu’en cas de poste vacant que la Disciplined Forces Service Commission entame des démarches afin de procéder à la nomination du nouveau titulaire. Ainsi, en attendant la nomination du successeur de Mario Nobin, c’est un adjoint au CP qui assurera l’intérim.</p>
<p style="text-align: justify;">Est-ce que Mario Nobin peut <em>«step-down»</em>, se retirer de son poste ? <em>«C’est un vocabulaire qui n’existe pas dans la fonction publique. Dans le cas des fonctionnaires, c’est soit la démission ou la retraite. Et il n’y a aucune raison pour laquelle une personne va démissionner alors qu’elle a droit à la retraite. Mario Nobin peut démissionner quand il le veut. Sa rémunération pour les congés non-pris restera la même»</em>, explique le syndicaliste.</p>
Publicité
Les plus récents