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Homicides involontaires: Ça vaut vraiment pas la peine

26 mai 2019, 19:12

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Homicides involontaires: Ça vaut vraiment pas la peine

Dix ans à l’ombre. Peine maximale pour homicide involontaire. Idem pour les attentats à la pudeur. Sauf que c’est rarement le cas. Les coupables s’en sortent souvent avec des amendes ou des travaux d’intérêt général, donnant l’impression d’une disproportion totale entre les conséquences de l’acte et la punition. Nous avons tenté de comprendre pourquoi la justice peut être indulgente, même lorsqu’il y a mort d’homme.

L’homicide involontaire peut coûter une peine maximale de dix ans de prison à son auteur. «L’article 239 du Code pénal, associé à la Road Traffic Act, stipule également qu’un coupable peut écoper d’une amende n’excédant pas Rs 150 000», explique un légiste. Le permis de conduire peut être suspendu pendant deux ans. On se souvient qu’un détenteur de learner a écopé de trois amendes de Rs 75 000, Rs 10 000 et Rs 10 000 sous les trois accusations, le 2 mai, pour homicide involontaire et violation des conditions attachées. Sew Kapoor, à bord de son «microbus», avait, le 2 mai 2013, à Argy, causé la mort de Khiat Sen Shi Shun lors d’un accident. Il n’avait qu’un permis de conduire provisoire, n’ayant pas encore passé le test pratique.

180 heures pour un skipper tueur

Autre cas qui a marqué les esprits : celui du couple tué en mer. Le skipper Rézéda Louis Curtis avait échappé à la prison, en effectuant 180 heures de travaux d’intérêt général. Le 27 avril, la magistrate a ordonné la suspension du permis de bateau de l’accusé pour un an.

Les faits remontent au 23 février 2015. Dominique Antoine et Ewa Mikulska Baudron faisaient la plongée en apnée dans le lagon de BelleMare lorsqu’ils ont été percutés par l’homme de 53 ans, qui était à bord de son bateau de plaisance.

Deux tués : Peine commuée

Il avait échappé à la prison bien qu’ayant tué deux personnes. Après le rapport du Probation Office, il avait été décidé que Mahmad Salim Mooradun ferait 140 heures de travaux d’intérêt général au poste de police de Trou-d’Eau-Douce au lieu de huit mois d’emprisonnement pour homicide involontaire. Il avait percuté, à bord de son véhicule, deux personnes qui se trouvaient à moto, le 1er juillet 2017, à Floréal.

Un mois pour avoir tué un cycliste et paralysé un autre

Dheeraj Takooree a eu une petite claque sur la main : un mois d’emprisonnement pour avoir tué un homme et paralysé un second. Le 10 mai 2012, à Nouvelle-France, le soudeur en voiture avait mortellement percuté le cycliste Jérôme Joseph Alain Tennant. Lors de cet accident, Philippe Barthémy Colin et David Bathfield, deux autres cyclistes, ont été blessés, le second se retrouvant cloué au lit jusqu’à la fin de ses jours. Le coupable de 39 ans n’avait pas rapporté l’accident à la police et avait bu. La magistrate lui a infligé plusieurs amendes. Soit Rs 120 000 au total pour avoir brisé la vie de deux familles.

Pourquoi peuvent-ils éviter la prison ?

Il y a mort d’homme. Et pourtant, ils échappent à la prison. Pourquoi cela ? Un homme de loi explique que si l’accusé, dès le début, a plaidé coupable, cela pourra jouer en sa faveur. La cour prendra également en considération les circonstances de l’accident et si l’accusé a un enfant en bas âge ou une famille à charge. «Les plaidoiries de la défense jouent un rôle avant la sentence. Elle cite des cas précédents relatifs au procès présent et peut même appeler son client à la barre pour présenter ses excuses à la famille des victimes.»

Toutefois, à Maurice, contrairement au Royaume-Uni, la loi ne se base pas sur un standard de «sentencing guidelines». Une sorte de grille de sentences standards. «Ce qui veut dire qu’à Maurice, on présente des cas précédents pour réclamer une sentence indulgente, alors qu’ailleurs, on se fie plus sur l’article du Code pénal.» Des règles existent pourtant pour classer la gravité des infractions. «Ce classement est généralement basé sur la définition du crime par la législature et non sur la manière dont un accusé a commis un crime particulier, mais cela ne s’applique pas vraiment à Maurice.» Pourquoi ne pas avoir une échelle de sentences calculée à l’aune du mal commis à autrui ?

Ces attentats et notre empathie

Qu’en est-il des attouchements sexuels ? Dix ans de prison. C’est la peine maximale en vertu du Code pénal. Mais la sentence prononcée récemment par la magistrate Niroshni Ramsoondar contre le pédocriminel Michel de Ravel de L’Argentière (photo), qui s’en est sorti avec des cautions de bonne conduite, bien qu’il ait été reconnu coupable sous 21 chefs d’accusation, a soulevé un tollé au sein de la population. «Outre l’état de santé du coupable, les faits remontent à peu près à 30 ans de cela. Du coup, ce laps de temps motivait la magistrate à infliger une peine minimale», confie une source proche du dossier. On parle là de huit victimes âgées de quatre à six ans au début des faits…

Travaux d’intérêt général pour un père incestueux

Plus loin dans le temps, en août 2016, la peine de neuf mois de prison infligée à Serge Alain Ducray a été convertie en travaux d’intérêt général. Le «Probation Office» avait livré son rapport à l’issue d’une enquête sociale sur l’homme d’affaires. Ce directeur de compagnie avait été condamné pour attentat à la pudeur sur sa fille de quatre ans. Il devait passer 180 heures au poste de police de Beau-Bassin.

Pas de prison pour un Arabe

On se souviendra également de ce Saoudien qui avait écopé, en septembre 2018, d’une «conditional discharge» assortie d’une amende de Rs 100 000. Salah Altasan, 64 ans, avait été reconnu coupable d’attentat à la pudeur sur une employée d’hôtel. La même magistrate que dans le procès de Ravel, Niroshni Ramsoondar, a pris en considération les plaidoiries de Me Yousuf Mohamed, qui avait demandé de prendre en compte l’âge et l’état de santé de l’accusé, après avoir présenté un certificat médical faisant mention d’interventions chirurgicales cardiaques et de futures interventions médicales. Le casier judiciaire vierge de Salah Altasan et le fait qu’il ait plaidé coupable au début du procès ont joué en sa faveur. Là encore, la maladie a eu bon dos.

«Il ne faut pas oublier que c’est à la discrétion de la cour de décider de commuer toute peine d’emprisonnement. Cependant, si le rapport du «Community Service Order» n’est pas favorable ou si l’accusé, lui-même, refuse de faire des travaux, il ne peut éviter la prison», explique un avocat. Pour cet homme de loi, si l’accusé n’a pas d’antécédent, il peut très bien échapper à la prison. Ce qui est bien moins le cas des petits fumeurs de gandia…