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Chagos: Pravind Jugnauth joue la carte de la provocation
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Chagos: Pravind Jugnauth joue la carte de la provocation
«Zot pé protesté kifer mo’nn servi sa term krim kont limanité. Zot éna mari toupé.» Le PM n’a pas mâché ses mots à l’encontre des Britanniques, dimanche, lors de la cérémonie de commémoration de deux Chagossiens enterrés à Rodrigues. Un discours qui n’est pas au goût des Britanniques.
Nous avions l’habitude de voir sir Anerood Jugnauth sortir ses griffes lorsqu’il est interrogé sur la position des Britanniques dans l’affaire Chagos ou lorsqu’il tient des discours. Le Premier ministre (PM), Pravind Jugnauth, quant à lui, a toujours affiché un comportement différent. Mais son discours tenu à Rodrigues, dimanche, à l’occasion de la commémoration de deux Chagossiens enterrés à Rodrigues vient confirmer ce changement d’attitude qui a commencé depuis que Maurice a obtenu sa première victoire devant les Nations unies.
«Je pensais que le Royaume-Uni était le champion des droits humains. Les Anglais font toujours la leçon aux autres pays. Je pensais qu’ils prônaient la liberté d’expression, mais lorsqu’il s’agit de nous, nous n’avons pas le droit de nous exprimer ? C’est une question de faits et d’histoire. La Cour internationale de Justice nous a donné raison. À quel niveau le Royaume-Uni est-il en train de tomber ? Les Britanniques pensent-ils que nous sommes encore une colonie ? Ont-ils oublié que nous sommes un État libre, indépendant et souverain ?», a affirmé Pravind Jugnauth lors de son discours dimanche. Le PM a d’ailleurs invité le chef commissaire de Rodrigues, Serge Clair, à se joindre au prochain voyage que compte organiser Maurice sur l’archipel des Chagos.
«Nou bizin pa per ein! Parski nou konba lézitim ek zis!» a soutenu Pravind Jugnauth, au cas où certains se demandent ce qu’ils encourent en participant à ce voyage. Le PM a ajouté que des personnalités et des journalistes étrangers seront de la partie. Oui, mais nous n’avons pas de bateau capable de faire ce trajet et Pravind Jugnauth l’a reconnu. Il a expliqué que les choses viendront en temps et lieu et qu’il ne sera pas le capitaine lors de ce voyage mais bien «divan divan».
Le PM s’est aussi indigné du fait que le Royaume-Uni ait contesté l’usage du terme «crime contre l’humanité» dans un de ses discours. C’était devant les tribunes des Nations unies. Pravind Jugnauth avait par la suite, souvenez-vous, qualifié le pays de la Reine d’«occupant illégal des Chagos», dans un communiqué qu’avait sorti son bureau le 12 juin.
«Zot pé protesté kifer mo’nn servi sa term krim kont limanité. Zot éna mari toupé. Je leur demande d’aller voir la définition de crime contre l’humanité. Cela démontre leur attitude à notre égard et à l’égard des Chagossiens», a rajouté le chef du gouvernement dimanche.
Même si dans l’entourage du PM, il est difficile d’avoir une réponse franche à la question : «Qui a écrit le discours qu’a lu Pravind Jugnauth ?», il nous revient que le discours prononcé à Rodrigues n’est pas uniquement l’œuvre du PM. Ses conseillers ? Pas forcément. Mais aucune autre indication ne sera donnée.
Ce qui est sûr, pour l’heure, c’est que le discours n’a pas plu aux Britanniques. Nous avons sollicité, par mèl, la British High Commission. La réponse qui nous a été donnée : «Aucun commentaire.»
Chagossiennes: hommage à celles qui sont descendues dans la rue
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<figure class="image" style="display:inline-block"><img alt="" height="330" src="/sites/lexpress/files/images/article/chagos_1.jpg" width="620" />
<figcaption>(De g. à dr.) Lindsey Collen et Ragini Kistnasamy se font arrêter, en 1981.</figcaption>
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<p style="text-align: justify;">Trainées à la rue La Chaussée par des policiers. Arrêtées par des agents qui n’hésitent pas à faire usage de la force. À l’époque, Ragini Kitsnasamy, 23 ans, est la plus jeune du groupe de huit femmes interpellées pour avoir manifesté au jardin de la Compagnie, sous les fenêtres du haut-commissariat britannique.</p>
<p style="text-align: justify;">C’est à la mobilisation des femmes et à leur rôle de premier plan dans la lutte chagossienne que Lalit veut rendre hommage. Une demi-journée d’activités – avec exposition de photos, musique, poésie et discours – est prévue le samedi 13 juillet, au jardin de la Compagnie, pour se souvenir du 28 mars 1981. Ce jour-là, huit femmes ont été arrêtées. Elles participaient à une manifestation de soutien à huit autres Chagossiennes qui en étaient à leur neuvième jour de grève de la faim.</p>
<p style="text-align: justify;">Il y a 38 ans, on sait seulement le nom des femmes arrêtées et leur âge. La plus âgée est Charlésia Alexis, 46 ans. Une artiste qui, aujourd’hui, n’est plus là pour dire sa vérité. Trois autres encore ne sont plus de ce monde : Marie Louise Armoogum, Philine Frivole et Lilette Goyaram Tatayah.</p>
<p style="text-align: justify;">Les survivantes sont Roselee Pakion, 37 ans au moment des faits, Merline Lamb, qui a alors 34 ans et qui vit aujourd’hui en Grande-Bretagne, et Lindsey Collen. La militante explique qu’avec l’aide du Group Refugiés Chagos, des démarches ont été entreprises pour retrouver ces femmes ou des membres de leur famille.</p>
<p style="text-align: justify;">Selon Lindsey Collen, la manifestation de samedi remet en perspective la longue lutte. <em>«Avec les grandes victoires, c’est les hommes politiques comme sir Anerood Jugnauth qui sont à l’avant-plan. On a tendance à oublier que des citoyens ont participé au combat.» </em>Des actions ont été menées <em>«dépi lor bato»</em>, affirme-t-elle. Référence à une <em>«rébellion»</em>, un <em>«sit-in» </em>à bord du Norvaer quand des Chagossiens en provenance de leurs îles natales ont refusé de débarquer à Maurice.</p>
<p style="text-align: justify;">Les années 70 à 90 ont été marquées par une série de grèves. Avant que la lutte ne soit «amarrée» au plan légal, dans les années 2000. L’hommage aux Chagossiennes rappelle également que «pour des raisons historiques, ces femmes ont appris à ne pas courber l’échine devant le patriarcat. Ce sont les femmes qui ont mené la lutte, avant que n’arrive Olivier Bancoult».</p>
<p style="text-align: justify;">Les huit femmes arrêtées avaient alors pour homme de loi Kader Bhayat. Même quand elles passent en cour, «la Riot Police et les chiens sont présents», se souvient Lindsey Collen. Accusées d’avoir troublé l’ordre public, sous la <em>Public Order Act</em>, elles seront acquittées, en novembre 1981. Leur procès a débuté le 13 juillet.</p>
Ragini Kistnasamy: «La Haye nous a donné raison d’avoir manifesté»
<p style="text-align: justify;">En 1981, Ragini Kistnasamy travaille dans une usine textile à Coromandel. Elle est membre du Muvman Liberasyon Fam et de Lalit de Klas, qui n’est pas encore un parti politique. Elle a déjà donné un coup de main lors des veillées et des grèves de la faim de Chagossiens. Elle se souvient : la veille de son arrestation, le 28 mars 1981, elle avait refusé de faire des heures supplémentaires à l’usine. Le lendemain, en guise de représailles, on lui dit de rentrer chez elle et de ne revenir que lundi. <em>«Mo dir li bon mem.»</em> Parce qu’elle savait qu’une nouvelle journée de manifestation était prévue par les «kamarad» à Port-Louis. «Je n’étais pas préparée à être arrêtée.» Direction l’Hôtel du gouvernement; où a lieu une première confrontation avec la police. Les agents repoussent les manifestants vers le jardin de la Compagnie, là où huit Chagossiennes font une grève de la faim. Les manifestants se dirigent vers le haut-commissariat britannique. Nouvelle confrontation avec les forces de l’ordre. <em>«Les policiers avaient fait une chaîne en se tenant par le coude. </em>‘Bann madam Sagosien ti konn riposté’.» Suite à quoi la Riot Police est intervenue. Ragini Kistnasamy et les autres passent cinq jours au cachot, aux Casernes centrales. Avec le recul, la militante affirme <em>: «La Cour internationale de justice et les Nations unies nous ont donné raison de</em> ‘dibout dan lari’. <em>S’il y a eu toutes ces avancées, c’est grâce à la contribution de ces femmes.»</em></p>
<h3 style="text-align: justify;">Trésor à Rodrigues. des policiers de la SMF surveillent les lieux depuis samedi</h3>
<p style="text-align: justify;">Depuis samedi, plusieurs policiers de la <em>Special Mobile Force </em>(SMF) surveillent le lieu à Rodrigues où deux randonneurs ont découvert un coffre rouillé avec son système de poulie et en contrebas une chimère. Le tout présumé être un trésor caché il y a environ 250 ans par un pirate qui pourrait bien être Olivier Levasseur, dit <em>«La Buse». </em>Cette présence policière fait suite à la requête d’un des randonneurs auprès du bureau du PM. Ces policiers, qui montent la garde, ne laissent passer aucune personne. La paternité de ce coffre et son contenu ont occasionné des frictions entre le gouvernement mauricien et l’administration rodriguaise, cette dernière estimant qu’une part du trésor doit lui revenir alors que selon l’article 716 du Code civil mauricien, la moitié du contenu appartient à l’État mauricien et l’autre moitié du butin à ceux qui l’ont découvert. La question du devenir de ce trésor devrait être à l’agenda du prochain Conseil des ministres. Si, jusqu’alors, on ne peut savoir s’il s’agit bien d’un trésor, c’est parce que ses découvreurs doivent attendre l’autorisation du bureau du PM pour le sortir de là où il se trouve.</p>
<h3 style="text-align: justify;">Le «Coconut chaos» menace les plantes natives de l’archipel</h3>
<p style="text-align: justify;">Les Chagossiens regrettent toujours leur archipel bondé de cocos. Si le peuple a été déraciné, les cocotiers, eux, y sont bien restés. À ce jour, ces arbres représentent même une menace sérieuse pour la flore des îles de l’archipel. C’est ce qu’a démontré une étude menée par le <em>Chagos Conservative Trust</em>. Les premières conclusions de ce travail ont été publiées dans sa newsletter, début juillet. Ils appellent le phénomène le<em> «coconut chaos».</em> En gros, il est question d’une <em>«invasion»</em> de cocotiers sur l’archipel résultant de la culture de cocotiers. Ces sites ont été <em>«abandonnés»</em> lorsque les Chagossiens ont été forcés de quitter leurs îles. Les cocotiers sont tellement nombreux qu’ils créent de l’ombre, empêchant la lumière du soleil d’atteindre d’autres plantes. Ce qui encourage, par la même occasion, la prolifération de nuisances. <em>«La lumière naturelle n’arrive pas jusqu’au sol et les moustiques et les rats sont abondants. En comparaison, dans les endroits où la végétation native de l’archipel domine, il y a davantage d’espèces», </em>souligne la newsletter. Le Barton Point et des endroits autour du Simpson Point sont considérés comme des zones prioritaires en matière de préservation des plantes à Diego Garcia. C’est ce qu’ont conclu Sara Bárrios et Tim Wilkinson, une botaniste et un scientifique spatial du Royal Botanic Gardens de Kew.</p>
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