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Drame du «Good Hope»: 25 ans après, Jean Couronne, l’un des rescapés, raconte…
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Drame du «Good Hope»: 25 ans après, Jean Couronne, l’un des rescapés, raconte…
Treize personnes avaient péri dans le naufrage du bateau de pêche au large de St-Brandon, le 12 juin 1994 lors du cyclone Hollanda. Le chef ingénieur du bateau éprouve toujours la même tristesse. Il est le seul rescapé qui a accepté de se confier.
Il a difficilement accepté de partager ses douloureux souvenirs de ce triste jour de juin 1994. Jean Couronne nous a accueillis dans sa demeure à Baie-du-Tombeau. Assis dans son fauteuil, il nous montre des coupures de journaux qu’il a précieusement gardées, comme pour respecter la mémoire des 13 pêcheurs disparus lors du naufrage du Good Hope. Il occupait, il y a 25 ans, le poste de chef ingénieur sur ce bateau de pêche. Le jour du drame, il se rappelle encore avoir dit au capitaine qu’il valait mieux retourner sur la terre ferme. La mer était déchaînée. L’équipage venait tout juste de quitter St-Brandon.
«La mer pa ti bon ditou, ditou. J’ai dit au capitaine qu’il fallait faire demi-tour. Il était alors 23 h 55. Il m’a dit oui. Je suis descendu dans ma cabine, j’ai allumé une cigarette. À peine dans ma cabine qui était juste à côté de la salle des machines, j’ai senti une violente secousse. Je me suis précipité pour voir les machines. J’ai demandé à mon assistant, Clifford, de fermer trois valves et de remonter tout de suite. C’était la dernière fois que je voyais Clifford…», raconte Jean Couronne.
Le chef ingénieur explique que la coque du bateau avait été sérieusement endommagée. L’embarcation avait heurté des rochers et les houles n’ont pas aidé. Le bateau s’était retourné et Jean Couronne était coincé dans la salle des machines. Il a vu l’eau envahir le bateau.
«Mem si mo ti kriyé sa lerla, personn pa ti pu tann mwa ! C’était comme un ouragan. Il y avait beaucoup de bruit. J’ai donc attendu. J’ai essayé d’atteindre les escaliers. À un moment, j’ai entendu des voix. J’ai demandé qu’on m’envoie une corde que j’ai attachée autour de ma taille. Ils m’ont soulevé.» Jean Couronne se souvient aussi que des rescapés voulaient se jeter à l’eau. Il était 2 heures du matin. Le chef ingénieur, qui connaît bien la mer, leur demande de ne pas sauter parce qu’il fait très noir. «Je leur ai demandé d’attendre 5 heures du matin pour qu’on ait de la lumière. Heureusement qu’ils m’ont écouté», dit péniblement Jean Couronne.
Au fil de son récit, l’homme âgé de 69 ans, arrive à peine à retenir ses larmes. Il se remémore ces longues heures d’angoisse qui ont suivi le naufrage. Pendant ce temps le bateau Indocéanique avait quitté Maurice pour les retrouver. «Lorsque ce navire est arrivé, nous avons compté les rescapés. Il manquait 13 personnes… J’ai été le dernier à quitter le bateau. La mer n’était toujours pas praticable. Le capitaine était blessé.» Un de ses plus grands regrets : celui de n’avoir rien pu faire pour sauver ceux qui sont tombés à l’eau. Il dit regretter que l’accident se soit produit au milieu de la nuit. «Si ti lizour, ti pu kapav trouvé kot zot été ! Mo déza konpran lamer, ti pu rési fer kitsoz… bé pann kapav fer nanié. Zamé mo pu bliyé sa», conclut-il en serrant ses journaux un peu plus fort contre lui.
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