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Ces boutiques chinoises qui cherchent un nouveau printemps
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Ces boutiques chinoises qui cherchent un nouveau printemps
Ne pouvant rivaliser avec les supermarchés, une à une des boutiques chinoises disparaissent du paysage. Mais à Petite-Rivière, au moins cinq opèrent encore.
Ils ont réinventé leurs boutiques familiales afin de pouvoir rivaliser avec les plus grands commerces. C’était le bon moyen pour tenir tête à la concurrence. Eux, ce sont les gérants des boutiques chinoises à Petite-Rivière.
Le village peut se vanter d’abriter encore quelques-uns de ces magasins chinois d’antan, qui étaient autrefois une affaire de famille. Aujourd’hui, chacun de ces comptoirs offre différents services pour retenir leurs clients. Rien qu’à lui seul, le village de Petite-Rivière compte au moins cinq boutiques toujours en opération. Nous avons pu rencontrer les gérants de trois d’entre elles. Sur la route principale, on ne peut manquer la boutique d’Ah Fook Youn Shi. Tout comme à l’intérieur du village, celles de Wong Tung Lan et Hung Leung Sang y sont installées depuis des décennies.
Histoire identique
Tous trois racontent une histoire identique, à d’infimes différences près. Jadis, ces commerces représentaient le premier recours pour les articles de consommation courante, que l’on appelait grosses commissions.
Toutefois, nos interlocuteurs déplorent qu’actuellement les grandes surfaces attirent plus de clients. «Il ne reste plus rien de ce que c’était dans le passé… que de bons souvenirs», raconte Hung Leung Sang. Cette dernière gère la Boutique Léon, qu’elle rénove au fil des années. Elle est d’ailleurs connue comme Madame Léon.
Hung Leung Sang maintient avec assurance que son commerce est le plus ancien de la localité. Âgée de 73 ans, elle dit s’en être occupée depuis l’âge de 22 ans, lorsqu’elle s’est mariée à Monsieur Léon. Aujourd’hui, la santé de ce dernier ne lui permet plus d’en maîtriser la gestion. C’est ainsi que Madame Léon et son fils se chargent de la boutique. Notre interlocutrice explique qu’elle vend plusieurs produits afin de satisfaire la palette de sa clientèle. Depuis plusieurs années, la boutique Léon met à disposition des bonbonnes de gaz et des produits congelés. Le matin, on ne rate jamais de vendre des pains maison aux habitants.
Carnets ration
Hung Leung Sang confie aussi qu’une quinzaine de clients achètent régulièrement leurs commissions de fin de mois chez elle. «Il y a encore des clients qui apportent leurs “carnets ration” chez moi pour obtenir leurs provisions. Ils ont confiance en moi et surtout c’est une tradition familiale pour eux. Je m’assure qu’ils ne manquent de rien.» D’autant plus, ajoute Madame Léon, qu’il y a une relation très solide qui s’est tissée entre ses clients et elle, vu qu’elle a passé toute sa vie à les recevoir. Cette mère de famille ajoute que sa fille travaille en Australie, son fils est banquier et son aîné l’aide dans la boutique.
«Le travail est vraiment dur mais il faut s’y faire. J’ai pu élever mes enfants grâce à ce travail. Cette boutique est toute ma vie. Je ne la laisserai jamais tomber.»
Rouge sang
Impossible d’emprunter la route principale de Petite-Rivière, que ce soit en direction de Port-Louis ou de Rivière-Noire, sans remarquer la boutique d’Ah Fook Youn Shi tant la peinture rouge sang de ses murs impressionne. Au dire de Mike Youn Shi, le fils d’Ah Fook Youn Shi, la couleur rouge est une façon de rendre hommage à ses parents qui lui ont confié un patrimoine vieux de 80 ans.
Âgé de 40 ans, l’héritier de la boutique explique que celle-ci a toujours été une affaire de famille. Auparavant, c’est son grand-père qui gérait l’affaire. À présent, c’est lui qui est derrière le comptoir. Toutefois, il déplore que les boutiques chinoises soient maintenant de l’histoire ancienne… un patrimoine en voie de disparition. Aujourd’hui, pour faire marcher le commerce, Mike Youn Shi a introduit des services de photocopie et de photos de passeport. Il a aussi ajouté un petit coin où il vend des téléphones portables et d’autres appareils électroniques. «J’ai appris qu’avec l’évolution, il faut changer de tactique. C’est pour cette raison que j’ai introduit des services pour la photo- copie, tout comme pour les photos de passeport.»
Wong Tung Lan store
«C’est notre histoire qui s’en va, qui va disparaître», confie avec nostalgie Wong Tung Lan, 48 ans. Ce père de famille gère la boutique familiale depuis une vingtaine d’années. Dans le passé, c’est son père qui s’en occupait. Wong Tung Lan raconte que pour rivaliser avec les autres, il a aménagé un petit coin pour vendre des «gajack» comme le hakien, l’aile de poulet et d’autres snacks. Cela lui permet de gagner un peu plus.
«Le travail est loin d’être facile. Aujourd’hui, il y a les grandes surfaces et on a oublié les boutiques chinoises, qui étaient au service des travailleurs d’usines sucrières et autres journaliers. C’est le petit coin du snack qui m’aide le plus. Avec le soutien de mon épouse, on pré- pare des snacks typiquement chinois. Les gens aiment et en achètent régulièrement.»
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