Publicité
TikTok: à la rencontre d’Arjoon et Deepti, victimes de cyberbullying
Par
Partager cet article
TikTok: à la rencontre d’Arjoon et Deepti, victimes de cyberbullying
Depuis le début de la semaine, les vidéos d’Arjoon ont été massivement partagées sur Facebook. Pour les bonnes ou mauvaises raisons, les phrases de ce Muser de 15 ans sont désormais sur toutes les lèvres. «Kaméra sirveyaz», «churel dan boutey délix» ou encore «pizza déviré», il n’a laissé personne insensible. Mais qui est ce jeune homme qui est devenu célèbre bien malgré lui ?
Sur le parcours de santé de Roches-Noires, Arjoon marche pieds nus. Il n’a pas mal. Depuis tout petit, il aime sentir la terre et les cailloux. Avant que le parcours de santé n’apparaisse sur le seuil de sa modeste demeure, c’était son terrain de jeu.
Sa cousine, Deepti, âgée de 28 ans, qui figure dans pratiquement tous ses clips, le suit comme son ombre, de même que les deux enfants de cette dernière – elle en a quatre. Loin de son téléphone portable et des réseaux sociaux, Arjoon n’est pas différent des autres ados. Piercing à l’arcade sourcilière, voix en pleine mue, un peu trop grand pour son âge et presque timide, le jeune garçon revient sur sa soudaine popularité.
Blagues
Le ton est celui de la gêne. Il n’a pas l’habitude de parler de lui. «Cela fait trois mois que je suis sur TikTok. Au début, ma cousine et moi utilisions les sons d’autres Musers. Nous avions environ 15 likes à l’époque.» Puis, les deux ont décidé de créer leurs propres sons, et c’était le début de la gloire. Leur spécialité n’est pas la danse et les chants, mais les blagues. «Des fois, ce sont nos propres blagues. Ou encore, nous traduisons les blagues des Musers indiens, qui sont très populaires.»
Puis vient le jour lorsque la video «3 fason pou kit to ex» apparaît sur Facebook. En une nuit, le nombre de followers d’Arjoon explose. Mais cette nouvelle popularité a un revers. Les commentaires sur son accent pleuvent. Le lendemain, la situation se répète avec sa video «kaméra sirveyaz». Puis, «churel dan boutey» apparaît aussi sur Facebook.
Arjoon et Deepti sont victimes de cyberbullying. Les gens commencent à les reconnaître dans la rue. Si certains les encouragent, d’autres se moquent. Mais les deux compères ne se laissent pas démonter. Les vidéos continuent, les plaisanteries parfois de mauvais goût aussi. Arjoon, qui suit des cours en hôtellerie, commence à s’absenter, de peur de ce que diront ses camarades.
Leur bonne humeur n’est pas entamée jusqu’au jour où la pub de Fair & Lovely est détournée…
«To nwar ta!»
Sur cette pub, les internautes ont pris la photo de Deepti et l’ont «blanchie». La marque de la crème éclaircissante y figure. Facebook-sphère rit, la photo attire les milliers de likes et de commentaires. Mais Deepti est loin d’être de bonne humeur. «Donk, kan ou nwar, ou pa zoli dan sa péi-la ?» demande-t-elle, fustigeant l’hypocrisie de ceux qui affirment que Maurice est un pays arc-en-ciel, mais derrière les écrans, les masques tombent. La peau noire est raillée.
C’est la goutte de trop. Autant les moqueries sur les accents ne les ont pas gênés, l’attaque physique les a poussés à porter plainte. «Même si au début, les policiers se moquaient aussi de nous, ils ont fini par prendre notre déposition», explique Arjoon. La suite ? «Bah, on va continuer !» La gêne a disparu de sa voix.
Avant de finir, il a fallu quand même demander d’où vient le maintenant fameux «kaméra sirveyaz». Arjoon rit. Deepti aussi. «Ou krwar mo pa koné ki védir kaméra sirveyans ? Zot ti pé riy mo kozé la vey, monn dir sa kouma enn joke mem…»
Publicité
Les plus récents