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Retrait de Maurice de la CAN de futsal sur fond diplomatique: qui est responsable de ce gâchis ?
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Retrait de Maurice de la CAN de futsal sur fond diplomatique: qui est responsable de ce gâchis ?
Lundi 3 février, à l’ajournement des travaux parlementaires, Franco Quirin, porte-parole du Mouvement militant mauricien (MMM) sur le dossier sport, a voulu savoir du ministre de l’Autonomisation de la jeunesse et des sports, Stephan Toussaint, comment notre sélection nationale de futsal s’est retrouvée, fin janvier, à Laâyoune, ville principale du Sahara occidental (NdlR, pays du nord-ouest africain, contrôlé et administré par le Maroc depuis 1975 mais aussi revendiqué par le Front Polisario depuis 1976, sous le nom de République arabe sahraouie démocratique. Actuellement, ce territoire est contrôlé à 80 % par le Maroc et le reste par le Front Polisario), pour participer à la Coupe d’Afrique des nations de futsal.
Franco Quirin s’est intéressé au rôle du ministère des Sports dans le déplacement de cette sélection de Maurice, tout en cherchant à savoir qui a pu donner le feu vert à la Mauritius Football Club (MFA) pour la participation de l’équipe nationale de futsal à ce tournoi.
Toutefois, Stephan Toussaint a choisi de ne pas donner des explications. Il s’est contenté de demander à Franco Quirin de venir avec une question parlementaire spécifique à ce sujet, pour pouvoir lui répondre.
À noter qu’avant que Stephan Toussaint ne puisse se mettre debout pour répondre, le Premier ministre, Pravind Jugnauth, a cherché l’interprétation du speaker pour s’assurer que le député du MMM était en conformité avec les règlements, avec sa question à l’ajournement des travaux. Ce à quoi le speaker a indiqué qu’il comprend sa préoccupation avant de néanmoins demander au ministre des Sports de répondre.
Zones d’ombre
Interrogé hier, mardi 4 février, Franco Quirin a indiqué qu’il y a beaucoup de zones d’ombre entourant la décision de Maurice de participer à ce tournoi, puis de s’en retirer quelques jours plus tard. «C’était l’occasion pour le ministre Toussaint de faire le point, mais il a préféré ne pas fournir de réponse. Je me demande quand il y aura des séances parlementaires consacrées aux questions adressées aux ministres, pour que le pays connaisse toute la vérité autour de cette affaire. Et aussi, l’intervention du Premier ministre me fait penser que c’est une affaire diplomatique qu’on veut éviter de parler.»
Franco Quirin veut savoir qui a assuré les frais de déplacement de l’équipe de Maurice de futsal vers le Maroc et ensuite vers le Sahara occidental, et qui a pris en charge l’hébergement de toute la délégation. «Aujourd’hui, on se retrouve avec de lourdes amendes et même une disqualification pendant une période de deux ans!» (Voir plus bas).
Quant au ministre des Sports, nous avons fait appel à son conseiller en communication pour obtenir une réponse, mais il est demeuré injoignable.
République arabe sahraouie démocratique
Toute cette affaire tourne autour de la reconnaissance de la République arabe sahraouie démocratique (RASD). En 1982, Maurice reconnaît la souveraineté de cet État, s’alignant ainsi sur la position de l’Union africaine.
Toutefois, le 8 janvier 2014, sous le gouvernement de Navin Ramgoolam, Maurice fait volte-face et la décision est prise de ne pas reconnaître cet État. Mais, le 20 novembre 2015, revirement de situation, avec le gouvernement de sir Anerood Jugnauth, avec la reconnaissance, une nouvelle fois, du RASD par Maurice. L’Organisation des Nations unies ne reconnaît ni le RASD ni la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental, le considérant plutôt comme un territoire non autonome, en attendant un éventuel référendum sur la situation géopolitique parmi la population locale.
Le ministère des Sports botte en touche
Dans un communiqué émis le 31 janvier, le ministère de l’Autonomisation de la jeunesse et des sports fait comprendre qu’il est au courant de la participation de la sélection mauricienne de futsal à la Coupe d’Afrique des nations.
Toutefois, il maintient que la Mauritius Football Association (MFA), dans sa correspondance datée du 17 janvier, n’a pas déclaré où la compétition aurait lieu. La sélection a alors mis le cap sur le Maroc, le 24 janvier. Ce n’est que le 26 janvier que les officiers de la SADC font comprendre que, pour des raisons diplomatiques, il faudrait que le Club M se retire de la compétition.
Toutefois, l’ordre arrive trop tard et la sélection s’est déjà rendue au stade, à Laâyoune, au Sahara occidental, pour y jouer son premier match, qu’elle perd contre la Guinée Équatoriale (2-4). S’est ensuivi le retrait de la sélection et son retour à Maurice, hier. Toutefois, le ministère a eu à débourser 71 600 dollars, soit Rs 2 649 200, pour les frais d’hébergement et de déplacement, entre autres. Hormis cela, la Confédération africaine de football (CAF) a suspendu la MFA pour deux ans et celle-ci devra s’acquitter d’une amende de 75 000 dollars, soit Rs 2 775 000.
«La suspension de deux ans fait très mal»
La sélection mauricienne de futsal est rentrée à Maurice, hier. Les visages rencontrés à l’aéroport affichent un sourire quelque peu forcé. Ces joueurs laissent entendre qu’ils ont des sentiments partagés. Contents d’être allés en compétition mais déçus de la tournure qu’a prise leur participation. Avec une suspension de deux ans qui pèse sur leur tête, l’avenir semble soudain moins rose...
Des regrets, Mervyn Jocelyn, le capitaine de la sélection, en a des tonnes. «La situation par laquelle nous sommes passés est décevante. Surtout que c’est la première fois que nous allons jouer en Coupe d’Afrique des nations (CAN). Même si nous n’avons pas eu de grande préparation, nous avions tous envie de faire une bonne prestation.»
Mais, rien ne s’est passé comme ils le souhaitaient. «On nous a demandé de nous retirer.» En tout cas, cela lui a laissé un goût amer, tout comme à ses amis. «Que le fautif prenne ses responsabilités ! Car il a fait du mal au futsal mauricien.»
L’entraîneur de l’équipe, Theo Timboussaint, essaie tant bien que mal de relativiser. Même si la pilule reste dure à avaler. «Ce sont des événements qui nous dépassent.» Il raconte qu’à l’annonce de ce retrait forcé, tout le monde a été abasourdi. «On s’est expliqué auprès des joueurs. Quand la politique et le sport s’entrechoquent, c’est compliqué. Mais la suspension de deux ans fait très mal.»
Pas de visibilité
Face à cet incident, il a expliqué aux joueurs que, maintenant, il faut préparer l’avenir. «Nous allons redémarrer le championnat, il y a des formations qui vont suivre. Certes on n’aura pas de visibilité sur le plan international, on ne pourra pas se jauger. Il faudra alors organiser des compétitions amicales avec d’autres nations.»
Justement, en parlant de sanction, alors que dans un premier temps l’on a fait référence à une suspension de huit ans, soit deux éditions de la CAN, le président de la Mauritius Football Association (MFA), Samir Sobha, a tenu à apporter des éclaircissements sur le sujet à travers la presse marocaine. «Dans la lettre que j’ai reçue de la CAF, nous avons une amende de 75 000 dollars et, aussi, nous serons suspendus pour deux ans et non deux CAN.» En tout cas, la MFA a 60 jours pour faire appel de cette décision auprès d’un jury de la Confédération africaine de football (CAF).
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