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Analyse: pour une «dé-fascination» du système de lauréats
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Analyse: pour une «dé-fascination» du système de lauréats
Jour de liesse pour ceux ayant atteint le haut du podium. C’était un concours qui ouvre sur une nouvelle étape de leur vie. Mais quid des autres qui n’ont pas démérité ? L’élitisme à outrance n’est-il pas une forme d’exclusion?
Comme chaque année, 45 élèves, dont quatre Rodriguais, sur 2 000 aspirants, ont été sacrés lauréats, hier. Tout en célébrant la réussite de cette élite, l’on affirme dans les milieux concernés que le système d’éducation ne devrait pas se cantonner à la fabrication des lauréats. Le taux de réussite au Higher School Certificate (HSC) pour la cuvée 2019: 75, 21 % à Maurice, 67, 92 % à Rodrigues; donc 74, 95 % pour la République de Maurice.
La proclamation des lauréats a été faite par la vice-Première ministre et ministre de l’Éducation, Leela Devi Dookun-Luchoomun, hier, au bâtiment du Trésor, à Port-Louis. Si, ces quelques dernières années, certains collèges avaient causé la surprise, tel n’a pas été le cas cette fois-ci. Les collèges Royal de Curepipe et de Port-Louis, le collège Queen Elizabeth et le collège Dr Maurice Curé ont raflé plus de la moitié, soit 28 sur 41, des bourses allouées.
Autre fait intéressant : un seul collège privé, en l’occurrence le Modern College, à Flacq, compte un lauréat. Sollicité, le président de l’association de la Fédération des managers des collèges privés, Basheer Taleb, estime «qu’on doit essayer de s’extraire de cette fascination que les lauréats exercent sur nous». Et de renchérir : «C’est au détriment de ceux qui font de leur mieux. L’élite est là et il y en aura toujours. Mais qu’advient-il du reste? Ce qui doit aussi nous intéresser, c’est la qualité des résultats, notamment de ces collèges qui n’ont pas produit de lauréats. Devenir lauréat est une motivation personnelle et familiale. Or, le système éducatif ne peut pas être destiné aux lauréats uniquement. L’élitisme à outrance exclut les autres.»
Cette année, 2 000 candidats ont concouru pour devenir lauréat. «Dans les collèges privés, il y a entre cinq et sept candidats qui le font. Raison : ils n’ont pas les qualifications de base. Soit l’âge, le nombre de credits et la combinaison qu’il faut», affirme Basheer Taleb. Sans compter que dans les collèges où il y a plusieurs postulants, il y a un esprit de compétition qui sert à les booster. «Il n’y a pas la même dynamique dans un collège où seul un candidat aspire à devenir lauréat.»
Également sollicité, l’ancien recteur du collège Rabindranath Tagore, le député du PTr Mahend Gungapersad se dit «ému et fier» par rapport à l’accomplissement de ses trois lauréats. «Cela a pu être réalisé grâce aux efforts des étudiants, la confiance des parents et le travail abattu par les enseignants et les différents recteurs qui se sont succédé au collège. Lorsque j’ai rejoint le collège en 2003, les parents ne voulaient pas envoyer leurs enfants chez nous. On n’avait pas de nom, mais de l’aspiration, certes. Maintenant, même les terrains des environs ont pris de la valeur», soutient le député du n°6 (Grand-Baie–Poudre-d’Or).
Et d’ajouter : lorsqu’il a fait ses adieux à ce collège en 2014 pour s’engager en politique (il en était le recteur depuis 2003), l’institution comptait six lauréats. Les deux premiers lauréats l’avaient été en 2011. Toutefois, Mahend Gungapersad estime que «la fabrication de lauréats n’est pas la finalité de l’éducation.» Il renchérit: «Si on en a, tant mieux car la société juge la performance d’un collège au nombre de lauréats qu’il produit et à la régularité de cette performance. Mais, il n’y a pas que cela. La culture de l’effort et du sacrifice est importante. À l’époque où j’étais le recteur du collège, on mettait beaucoup d’accent sur la discipline, le sport et les pièces de théâtre de Rabindranath Tagore.»
Lindsay Thomas, recteur du collège St.-Esprit, qui affiche deux lauréats cette année, abonde dans le même sens. «Si on a des lauréats, tant mieux. Au cas contraire, ce n’est pas grave. Notre rôle principal constitue à former nos garçons à devenir les hommes de demain. Responsables et aimables. Des citoyens qui œuvreront pour la société», affirme-t-il.
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