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Sabordage: la France nie toute décision
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Sabordage: la France nie toute décision
«La décision (quant au Wakashio) n’a pas été prise par le gouvernement mauricien au moment où je parle.» Cette déclaration vient du ministre des Outre-mer français. Il prend à contre-pied ce qui se dit à Maurice depuis lundi. Cependant, ce matin, la proue du MV Wakashio n’était plus visible car le remorquage a commencé lundi 17 août…
Interrogé sur l’avenir du MV Wakashio après un déjeuner de travail avec les acteurs économiques et sociaux de La Réunion, Sébastien Lecornu a répété qu’aucune décision n’avait été prise. Il a affirmé que «les experts français continuent leur travail sur place» et évaluent «deux types de scénarios : celui de remorquer la partie avant de l’épave vers un chantier de déconstruction, ou celui poussé par l’armateur, de couler l’avant de l’épave».
Il dit attendre le rendu des experts à Maurice, qui doivent voir d’une part si le navire doit être remorqué, quelle est la faisabilité, s’il n’est pas trop fragile et, d’autre part, «s’il doit être coulé, à quel endroit, selon quelle méthodologie et quel sera son impact sur la sécurité maritime». Les experts doivent notamment voir la propreté de la partie avant du vraquier échoué.
Le ministre français va donc à l’encontre du communiqué émis par le National Crisis Management Committee, tard dans la soirée de lundi, qui mentionne que des mesures sont prises pour remorquer la proue (partie avant) du vraquier à huit milles nautiques de la limite extérieure du récif et la couler à 2 000 mètres de profondeur. Et que ce plan a été validé par les trois experts du CEPPOL (Centre d’expertises pratiques de lutte anti-pollution, rattaché à la marine nationale) et CEDRE (centre de documentation, de recherches et d’expérimentation sur les pollutions accidentelles des eaux, organisme indépendant), envoyés à Maurice par la France. Or, ceux-ci continuent à être réservés sur le choix de couler l’épave.
«Ce que l’on peut redouter pour La Réunion, c’est la projection de boulettes d’hydrocarbures sur un certain nombre de nos côtes. (…) On se doit d’être vigilants, vigilance qu’il faut accroître en fonction des manoeuvres de remorquage qui pourraient être décidées par le gouvernement de Maurice sur deux morceaux de l’épave.» Sébastien Lecornu a parlé de ses appréhensions lundi, sur franceinfo. Selon lui, il faut s’assurer que les décisions prises sur l’épave soient les bonnes. Soit couler l’avant de l’épave au grand large, qui n’est pas «notre préférence», ou prendre le temps de le remorquer et le déconstruire ailleurs.
24 heures avant, le ministre des Outre-Mer maintenait toujours sa position lors d’une conférence de presse conjointe avec le ministre de l’Environnement, Kavy Ramano. «Je le redis une troisième fois. La position de la France n’a pas changé depuis dix minutes. Trois experts sont dépêchés ici pour vous permettre de regarder tous les scénarios. Nous devons nous assurer que la décision qui va être prise soit la meilleure.» S’il est conscient que la décision appartient au gouvernement mauricien, il souhaite que celle-ci soit prise dans les meilleures conditions.
Sauf que la décision de faire couler la partie avant du vraquier semble avoir été déjà prise. En effet, sollicité sur les mesures concernant les épaves du navire, Alain Donat, directeur du Shipping, a énuméré les instructions données à SMIT Salvage. Selon ses dires, les sauveteurs doivent remorquer le vraquier dans les eaux territoriales mauriciennes et le saborder à plus de 2 000 mètres de profondeur. «Avant cela, ils ont soumis le towing plan et ont fait des propositions. Ils voulaient emmener le bateau sur la côte est ou ouest pour le réparer et plus tard essayer de le tracter jusqu’à un chantier de démolition.» Pour la société hollandaise, la solution de transporter l’avant du navire jusqu’en Inde n’est pas viable, et celle de le déconstruire impossible car il n’y a pas de chantier navaal ici pour accueillir un tel navire.
Le comité a étudié le cas samedi et il a été décidé que la meilleure solution serait de le tirer et le saborder à cause de la situation d’urgence dans laquelle le pays se trouve. L’autre raison, c’est qu’il faut s’occuper de la poupe du vraquier qui est toujours encastrée sur les récifs de Pointe-d’Esny.
Lundi, le ministre Kavy Ramano, interrogé par les journalistes réunionnais de linfo.re, a aussi confirmé que l’avant du vraquier sera tiré vers le large à une distance de 14, 8 km du récif corallien et plongé à la profondeur indiquée dans le communiqué. Selon lui, cette partie ne contient aucun polluant.
Le remorquage de la proue brisée avait débuté lundi mais avait été freiné hier. Le communiqué d'hier du National Crisis Committee fait d’ailleurs état du fait que «the towing operation (...) is progressing slowly due to low water depths during low tide», mais ne dit rien de plus sur la manière de se débarrasser de l’épave ni ne précise si les études des experts sont toujours en cours.
Quant à la poupe, elle restera toujours immobilisée, du moins jusqu’à ce que les conditions météorologiques puissent permettre «de retirer la petite quantité d’huile résiduelle restante dans la salle des machines». Le Chief Salvage Master a indiqué que l’opération est toujours risquée et que le pompage d’huile lourde devrait reprendre dès que le temps sera plus clément.
MV Wakashio: le GM peut refuser de couler l’épave dans les eaux mauriciennes
<p>À qui revient la décision de faire sombrer l’épave du <em>«MV Wakashio» </em>? Ce, après que le vraquier de 300 mètres s’est disloqué, samedi, dans les eaux territoriales mauriciennes. Est-ce à l’État ou à l’armateur, <em>Nagashiki Shipping & Co. Ltd</em>, et l’assureur <em>Japan P&I Club ? </em></p>
<p>Le ministre français Sébastien Lecornu a parlé de ses appréhensions concernant l’épave du vraquier.<em> «L’armateur japonais a derrière lui des assurances qui veulent bien faire les choses mais le font dans une logique économique.»</em> Plus loin, il ajoute également que<em> «le Premier ministre a accepté d’entendre les arguments de nos experts pour s’assurer que les décisions prises sur l’épave soient les bonnes». </em></p>
<p>Du coup, pour y voir clair, la question a été posée à un professionnel maritime. Selon celui-ci, l’assureur, <em>Japan P&I Club</em>, et les <em>«salvors»</em>, soit <em>SMIT Salvage</em> et<em> Nippon Salvage </em>ainsi que le <em>Special Casualty Representative</em> (SCR), <em>«strike a deal»</em> mais le gouvernement est un <em>«watching brief». «Il faut l’accord du gouvernement. La décision est collégiale mais le gouvernement peut s’opposer et chercher une solution où il y a un accord.» </em></p>
<p>Comment se fait-il donc que les experts français puissent être d’accord pour couler l’épave si le ministre français des Outre-Mer a, lui, fait comprendre que cette méthode<em> «n’est clairement pas la solution qui retient la préférence de la France» </em>? Sollicités par <em>«l’express»</em> à cet effet, les conseillers et l’attaché de presse du ministère de l’Outre-Mer n’ont pas été joignables. Le premier conseiller de l’ambassade de France à Maurice, Jean Lohest, a, quant à lui, fait comprendre que les experts ont été dépêchés de France afin de prêter main-forte aux autorités mauriciennes dans la prise de décision. Mais la décision finale revient au gouvernement mauricien, dit-il.</p>
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