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Forex: un dollar moins attractif que l’euro fait chuter la roupie
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Forex: un dollar moins attractif que l’euro fait chuter la roupie
Face à l’envolée de la monnaie unique par rapport au billet vert, la roupie continue sa glissade sur le marché domestique.
Les cambistes s’excitent. La monnaie européenne explose. Elle poursuit sa marche haussière contre le dollar et pourrait dépasser 1,20 dollar. À Maurice, la monnaie unique s’échangeait hier à Rs 47,63 et atteindrait, selon les spécialistes, la barre de Rs 50 prochainement. Une aubaine pour les exportateurs du textile et les hôteliers mais qui ironiquement doivent attendre la réouverture des frontières pour bénéficier des retombées de cette envolée de l’euro.
Pourquoi l’euro gagne-t-il du terrain ? Les réponses divergent mais les spécialistes reconnaissent qu’il s’agit avant tout des espoirs découlant du plan de relance économique en Europe. Ce qui est venu rassurer le marché dans la zone euro et cela face à la dégradation conjoncturelle de l’économie américaine. Imrith Ramtohul, analyste financier, consultant en investissements chez AON Hewitt, remarque à cet effet que depuis fin juin 2020 l’euro a gagné 5 % vis-à-vis du billet vert. «Les longues périodes de confinement aux États-Unis ont fragilisé le dollar ces dernières semaines. De plus, les législateurs américains n’ont pas pu se mettre d’accord sur des mesures fiscales pour soutenir l’économie américaine alors même que la gestion hasardeuse du coronavirus par le président Trump n’a fait qu’empirer la situation et pourrait de ce fait affecter davantage le cours du dollar.»
D’ailleurs, l’office statistique américain a déjà annoncé que l’économie du pays de l’Oncle Sam a plongé de 32,9 % au deuxième trimestre de cette année, ce qui représente une chute de 9,5 % de l’activité par rapport au premier trimestre déjà en recul lié essentiellement à l’épidémie du coronavirus. «Avec un bilan qui vient de dépasser les 189 900 décès victimes, il est fort à parier que la reprise au troisième trimestre pourrait être lourdement hypothéquée», ajoute Imrith Ramtohul.
Une analyse que partage l’économiste Swadicq Nuthay qui attribue l’appréciation de l’euro sur le marché des changes international aux facteurs macroéconomiques. Notamment la réaction proactive de l’Europe face à la crise économique. «L’UE a mis sur la table un plan de relance de 750 milliards d’euros, doublé d’un budget chiffré à plus de 1,1 trillion d’euros pour la période s’étendant de 2021 à 2027. Ce qui contraste aux doutes exprimés par les économistes quant à la capacité des États-Unis de rebondir face à la crise.»
D’autres spécialistes estiment que l’approche du scrutin présidentiel ajoute aussi une couche d’incertitudes. Conséquence : ce climat n’a fait que perdre au billet vert son rôle de valeur refuge, qu’il avait largement tenu dans les premières semaines de la crise.
L’ex-Deputy Governor de la Banque de Maurice Vikram Punchoo, lors de sa première prise de parole, constate de son côté que sur toute la période 2005 à 2014 et malgré la grande crise financière, le taux de change euro-dollar US a évolué au-delà de USD 1.20. Et que depuis 2015, le taux de change eurodollar US a évolué en dessous de USD 1.15. «Pendant toute cette période récente, le taux de change a évolué entre USD 1.10 et 1.15.» Et d’ajouter que la montée de l’euro depuis fin mai 2020 est largement circonstancielle et que contrairement à d’autres d’analystes qui voient en cette montée de l’euro un début de tendance longue, il privilégie une stabilisation de la monnaie unique autour de USD 1.20 (voir en encadré son analyse de la dynamique du taux de change).
À Maurice, l’euro s’est apprécié de 15,5 % contre la roupie du 1er janvier 2020 au 6 septembre 2020 alors que l’USD a gagné 9,5 % contre la monnaie locale pour la même période. Jen Ramanah, Head of Treasury chez AfrAsia Bank, explique qu’un euro/dollar fort couplé à un dollar/roupie fort produit forcément un euro/roupie fort. «Les différentes interventions de la BoM sur le marché interbancaire portent sur un dollar à Rs 39,75. Je ne vois pas la Banque centrale intervenir à un prix plus bas pour le dollar.» D’autres spécialistes se demandent pourquoi la BoM laisse filer l’euro face à la roupie tout en sachant que les importations libellées en cette devise prendront de l’ascenseur. En même temps, un euro à plus de Rs 47 et probablement à Rs 50 fait sourire nos opérateurs exportant sur l’Europe.
La problématique du taux de change est souvent soumise à des intérêts économiques divergents, difficilement réconciliables et nécessitant un arbitrage de la Banque de Maurice.
La dynamique du taux de change vue par Vikram Punchoo
<p>Contrairement aux agents chartistes pour qui le cours du taux de change dépend des tendances passées des cours indépendamment de la situation économique, l’économiste-fondamentaliste ne se préoccupe pas autant des variations du taux de change au jour le jour ; il s’intéresse beaucoup plus aux variations sur le court terme et à la tendance sur les moyen et long termes . Le taux de change réel, en l’absence de chocs exogènes, a tendance à converger vers sa valeur de long terme, qui ellemême évolue en fonction du changement structurel de l’économie. Les chocs non anticipés par les agents économiques et l’incertitude sont les causes principales d’une déviation du taux de change de sa valeur de long terme. S’il existe des rigidités importantes et s’il n’y a pas d’ajustement des politiques macroéconomiques, la déviation temporaire peut se muer en une déviation longue ou permanente avec pour résultat un désalignement du taux de change réel par rapport aux fondamentaux économiques. Sur le très court terme, la volatilité du taux de change est exacerbée par le<em> «noise».</em></p>
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