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Malade en quarantaine: une Mauricienne raconte «son calvaire» à l’hôpital SSRN

1 décembre 2020, 10:00

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Malade en quarantaine: une Mauricienne raconte «son calvaire» à l’hôpital SSRN

Sophia (nom fictif) poursuit sa quarantaine dans cet hôtel du Nord. Mais elle est traumatisée par le traitement qu’elle aurait reçu pendant 24 heures à l’hôpital SSRN. C’est la gorge nouée par l’émotion qu’elle nous raconte, au téléphone, ce qu’elle a vécu. 

Elle a débarqué à Maurice le mardi 24 novembre. Son premier test PCR effectué à l’étranger était négatif. Le test qui lui a été fait à l’aéroport s’est également révélé négatif. Elle a donc été envoyée en quarantaine à l’hôtel. Dans la nuit du samedi 28 au dimanche 29 novembre, elle a eu des douleurs nécessitant un examen clinique. 

Elle voulait se faire admettre à la Clinique du Nord mais les fonctionnaires du ministère de la Santé présents à l’hôtel ont refusé et ont même éconduit l’équipe de la Clinique du Nord qui s’était présentée à l’hôpital par la suite, pour la récupérer. «Le dimanche matin, on m’a transportée d’urgence à l’hôpital SSRN, m’expliquant qu’il n’était pas possible de m’envoyer en clinique à cause du protocole sanitaire en vigueur. J’ai fini par l’accepter. Mais je n’oublierai jamais le traitement que j’ai reçu dans ce centre de soins public», explique Sophia. 

À l’hôpital SSRN, la trentenaire dit avoir été humiliée par le personnel hospitalier. «On m’a d’abord soumis à une échographie. Sauf que j’étais nue et que je devais marcher sans culotte devant un autre patient, un homme. Cela m’a choquée. Je m’en suis plainte mais c’était comme si je n’avais pas mon mot à dire.» 

À l’issue de ce test clinique, elle est admise en salle. Elle tombe des nues en voyant l’absence d’hygiène qui y prévaut. Les draps du lit qu’on lui donne sont sales et comme tâchés de sang. Elle note aussi la présence d’excréments d’insectes sur la table de chevet et à terre. Elle est stupéfaite quand, à l’issue d’une prise de bec avec une femme médecin, elle reçoit la visite d’un policier. «Une femme médecin est venue me voir. Elle restait tellement à distance que lorsqu’elle s’adressait à moi, je n’entendais rien. J’ai dû lui dire “Sorry madam mo pa pe tann ou”. Je n’ai rien dit de mal mais c’était comme si je l’avais insultée. Elle s’est mise à me menacer en disant “Ki madam ? Dokter ! Ou mank mwa du respect ? Mo pou apel lapolis” et elle a appelé un policier parce que je l’ai appelée Madame. C’était à n’y rien comprendre.» 

Selon Sophia, il a fallu qu’un autre médecin «bien plus gentil» intervienne pour calmer les choses. À l’heure du repas, une autre surprise l’attendait. En ouvrant la boîte en polystyrène, elle a découvert un cafard mort bien en évidence sur le poulet. «J’étais si dégoûtée que je n’ai rien mangé. D’ailleurs, ce matin (NdlR: lundi matin), ils sont venus me dire que vu que j’ai refusé de manger, on ne me servirait rien. Je suis restée ainsi sans manger pendant 24 heures.» 

Une expérience bouleversante 

Bien qu’elle ait regagné l’hôtel lundi, elle est préoccupée par son état de santé, d’autant plus qu’avant de la laisser quitter le centre de soins, un médecin venu l’ausculter n’a fait que lui tapoter le ventre. On ne l’a même pas mise au courant des résultats de son échographie. «Il m’a tapoté le ventre avant de me demander si j’allais rester sous observation ou retourner à l’hôtel. Je lui ai dit que ce n’était pas à moi de prendre cette décision car je n’étais pas médecin. Il a tourné les talons et a quitté la salle. Quelques minutes plus tard, on est venu me chercher pour me reconduire à l’hôtel.» 

Si elle se sent davantage rassurée d’avoir retrouvé sa chambre d’hôtel, Sophia s’inquiète toujours pour sa santé et ne se remet pas de ce qu’elle qualifie de «plus de 24 heures de calvaire à l’hôpital. Tou letan monn tann enn bann zistwar, monn lir enn bann lartik lor bann lopital moris, mé zamé mo ti pou pansé mo pou viv enn sityasion parey. Si monn vinn moris tou sel san mo mari ek mo bann zanfan se deza pou enn problem privé dan la fami ki pe trakas mwa. Ek sa lesperians la inn boulvers mwa plis ankor…» affirme Sophia. 

Pour le Dr Dawood Oaris, président de l’association des cliniques privées, ce refus des préposés du ministère de la Santé de laisser une personne en quarantaine se faire soigner en isolement en clinique pour un mal autre que le Covid-19 est «incompréhensible» car à sa connaissance, le ministère a officiellement dit que deux cliniques, à savoir la Clinique du Nord et la clinique Wellkin, avaient le droit de faire admettre de tels patients. «Ti deza éna sa lanons pou dir ki sa dé klinik la gagn drwa tret enn pasian an karanten ki pa pozitif o Covid-19, an izolman. Maintenant, je ne sais pas si le protocole a changé sans que nous en soyons informés.» 

De son côté, le directeur de la Clinique du Nord, le Dr Mukhesh Sooknundun, le confirme et déclare que son équipe s’est rendue à l’hôpital où la malade se trouvait en quarantaine pour la récupérer. «L’ambulance et l’équipe médicale sont restées sur l’aire de stationnement pendant deux heures. Ce n’est qu’après qu’on nous a expliqué que nous n’avions pas le droit de la récupérer et l’équipe a obtempéré.» 

Mise au courant du cas de Sophia, une source autorisée au ministère de la Santé a déclaré qu’une enquête sera initiée pour situer les responsabilités. «En attendant, cette patiente doit faire une plainte officielle par écrit au Senior Chief Executive du ministère dans laquelle elle relate tous les faits. Après enquête et si les faits sont avérés, nous prendrons les mesures qui s’imposent.»