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La société d’arpentage: «Le document de Roshi Bhadain est vrai»

2 décembre 2020, 20:00

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La société d’arpentage: «Le document de Roshi Bhadain est vrai»

Depuis 2004 – et non 2008 quand Pravind Jugnauth commence à payer Govinden –, le couple Jugnauth semblait avoir des visées sur le terrain pour lequel Govinden avait déjà payé. Face au silence du Premier ministre, «l’express» a interrogé les auteurs de ce document.

2004 remonte à 16 ans. La société SDDS a entretemps changé de nom. L’arpenteur Eric Doger de Spéville, qui a préparé et si- gné le document, n’y est plus. Mais la direction confirme que le document brandi par Roshi Bhadain où figurent les signatures de Pravind et Kobita Jugnauth n’est pas un faux. Un de ses représentants, très sympathique au téléphone, nous a gentiment expliqué de quoi il s’agit.

«C’est ce qu’on appelle un site plan de vente. Le travail d’un arpenteur consiste à certifier la superficie d’un terrain à la satisfaction du vendeur et de l’acquéreur potentiel. Il va sur le site, prend les mesures et il demande à l’acheteur potentiel et au vendeur de signer le document s’ils sont satisfaits. Par la suite, à eux de décider quand et devant quel notaire ils vont procéder à leur vente», explique notre interlocuteur.

À la question, «l’ICAC vous a-t-elle contacté pour retrouver l’original ?», il rit. Avant d’ajouter : «Écoutez, ce document est généralement annexé au contrat de vente qui est enregistré au Registrar General. Chez nous, il se pourrait qu’il n’y ait qu’une vulgaire photocopie, mais un document qui quitte le Registrar General est une certified true copy. Et pour répondre à votre question, non, l’ICAC ne nous a pas contactés.» Ce site plan du terrain en vente est venu, samedi dernier, bousculer la rocambolesque explication de Pravind Jugnauth sur la raison pour laquelle c’est Alan Govinden qui a payé Bel Air Sugar Estate (BASE). La veille, en conférence de presse (NdlR, à laquelle l’express n’était pas invité), le Premier ministre a expliqué que Govinden avait, en 2001, fait un dépôt de Rs 20 millions pour ce terrain sans que BASE et lui ne procèdent à la vente officielle.

Or, toujours selon la version de Pravind Jugnauth, en 2008, Govinden n’est plus intéressé. Ce n’est qu’alors qu’il a voulu acheter le terrain. Pravind Jugnauth avoue que, lui, il n’a pas payé à BASE, mais il a remboursé à Govinden ses Rs 20 millions de 2008 à 2013. Ce prêt, assure-til, est sanctionné d’un acte notarié rédigé par le notaire Jérôme Koenig.

Or, cette version ne tient pas la route depuis samedi – et encore un peu moins ce matin avec la société d’arpentage qui écarte la théorie du «faux» – puisque le site plan de vente datant de 2004 trahit les intentions du couple Jugnauth sur ce terrain à l’époque. Dès dimanche, nous avions mis les conseillers du PM face à cette contradiction et ils nous ont répondu que la réponse à cette question se trouverait dans la plainte que nous allions recevoir lundi. Cependant, le papier timbré ne fait aucune mention de cette anomalie dans la version de Pravind Jugnauth.

Des anomalies décelées

Depuis vendredi, Roshi Bhadain ne fait que déceler des anomalies dans la version de Pravind Jugnauth. À chaud samedi, il a fait ressortir que le Premier ministre ayant avoué que c’est Govinden qui a payé BASE, l’acte notarié qui stipule que le couple Jugnauth paie BASE est un faux sur lequel signent toutes les parties.

Hier, le leader du Reform Party nous a fait cette nouvelle observation : «Pravind Jugnauth affirme que son prêt de Govinden était sanctionné d’un acte notarié rédigé par Jérôme Koenig en 2008. Or, subséquemment, ce même notaire sur l’acte de vente officiel signé la même année et déposé au Registrar écrit que le paiement a été fait ‘sans son concours et hors de sa vue’. Pourquoi le notaire ne précise-t-il pas que l’achat est financé par un prêt de Govinden ? C’est bien lui qui a sanctionné le prêt d’un acte notarié, d’après Pravind Jugnauth, n’est-ce pas ? Donc, selon Pravind Jugnauth, le notaire savait comment il payait, mais ce dernier écrit qu’il ne sait pas et que le paiement a été fait sans sa participation.»

Roshi Bhadain renchérit avec une de ses phrases préférées depuis qu’il a fait éclater le scandale :«Mo ti dir li met lord dan so manti, don’t get your knickers in a twist, ek linn mayé dan so manti.»

Parallèlement, à partir de maintenant, il faudra avoir les yeux rivés sur le bureau du DPP à qui Roshi Bhadain a demandé l’autorisation de procéder à une private prosecution. Le leader du Reform Party veut poursuivre Pravind Jugnauth pour conspiracy to commit an unlawful act, public official using office for gratification, et paiements en cash audessus de la limite autorisée. Au sujet de cette dernière accusation, face au démenti de Pravind Jugnauth sur la véracité de ces reçus, Roshi Bhadain réplique : «Bé si rési la fos, Pravind Jugnauth bizin dir kouma linn pey pou térin Rs 7 M! Linn rakont enn zistwar lor Rs 20 M Govinden et mo’nn prouv ou ki linn koz manti. Lor lot térin Rs 7 M li pé vinn dir rési la fos. Bé kou- ma linn payé ? Je demande à Pravind Jugnauth, où sont ses reçus à lui ?» Rappelons que l’express a publié une lettre de l’ICAC en 2013 où celle-ci cite ces reçus précis avec leurs numéros tels que circulés par Arvin Boolell sept ans après.

Le mode de paiement de ces Rs 7 millions était une des neuf questions écrites posées à Pravind Jugnauth par l’express le 22 octobre dernier. Nous n’avons jamais obtenu de réponse précise. Pravind Jugnauth jure juste dans sa plainte qu’il n’a jamais procédé à des modes de paiement illégaux.

Notons enfin que BASE, avec qui l’express a ouvert une ligne de communication il y a trois semaines, n’a jusqu’à l’heure pas démenti la véracité des reçus. Et d’après nos sources à l’ICAC, celle-ci n’a toujours pas interrogé Philippe Yuen Zing, le signataire allégué de ces reçus.