Publicité
Pêche hors lagon dans le Sud-Est: dans les filets des mécontents
Par
Partager cet article
Pêche hors lagon dans le Sud-Est: dans les filets des mécontents
La réouverture de la pêche hors lagon ne signifie pas la fin du calvaire pour les pêcheurs de la région du Sud-Est car beaucoup d’entre eux n’ont jamais eu d’expérience du grand large.
Rouvrir la pêche hors lagon. Mais fermer des portes. Celle des cœurs de ces pêcheurs qui se plaignent de ne pas être équipés pour la haute mer. C’est une vague de mécontentement qui a accompagné, le samedi 12 décembre, la réouverture de la pêche hors lagon, dans le Sud-Est de l’île. Une région où ce secteur est particulièrement sinistré depuis l’échouement du vraquier japonais MV Wakashio, le samedi 25 juillet, sur les récifs de Pointe-d’Esny et le déversement d’hydrocarbures qui a suivi.
Samedi, jour de réouverture de Mahébourg à Rivière-des-Créoles, des pêcheurs interrogés disent tous qu’ils ne sont pas sortis. Principale raison avancée : «Lamer pa bon.» Le bulletin météo prévoyait ce jour-là des «vagues de plus de deux mètres». Mais le vague à l’âme est ailleurs.
Judex Rampaul, président du Syndicat des pêcheurs, constate d’emblée «qu'il y a bien peu de pêcheurs de haute mer dans les régions de Mahébourg, AnseJonchée, Grande-Rivière-Sud-Est, Pointe-aux-Feuilles, Trou-d’Eau-Douce». Avec le ton du professeur de géographie, il ajoute : «Ces régions ont de grands lagons. Cela vous prend une à deux heures avant d’arriver jusqu’aux récifs.»
Le cours se poursuit. Judex Rampaul rappelle que le MV Wakashio est «tombé» à Pointe-d’Esny ; alors que le MV Benita était, lui, «tombé» au Bouchon en 2016. «Sa montré ou ki sé pa enn ti lamer sa. Li enn lamer ‘rough’. Il faut vraiment être bien équipé pour sortir hors du récif là-bas.» Autre caractéristique de cette partie du Sud-Est : «Bann péser zot laz inpé for.» Ce qui explique aussi pourquoi, selon le syndicaliste, la majorité d’entre eux pêchent dans le lagon. «Ils n’ont pas les bateaux appropriés pour sortir en haute mer. Éna péser pa konn lamer andéor ditou.»
Remonté contre les «experts bidons», le président du Syndicat des pêcheurs s’insurge contre «sa bann dimounn ki pa konpran lamer-la». Sa thèse, qu’il défend bec et ongles : l’observation a montré que les hydrocarbures déversés à Pointe-d’Esny ont été charriés en direction des côtes. «Ce qui veut dire que ces produits n’ont pas dérivé vers la haute mer. Donc, depuis longtemps, on aurait pu autoriser les pêcheurs hors lagon à exercer leur métier. Ti kapav les zot al deryer résif.» Le syndicaliste n’en démord pas : «Les hydrocarbures flottent au-dessus de la mer. Pa fer mwa krwar sa finn anvayir bann profonder 25 met ziska 100 met.»
Qu’y a-t-il à pêcher hors lagon ? Judex Rampaul cite les vieilles, les capitaines, les berry qui vivent «deryer résif». «Il aurait fallu un planning pour que les pêcheurs de haute mer puissent sortir.» Pendant ce temps, si «lamer déor» a rouvert samedi, «lamer andan», celle où la majorité des pêcheurs de cette région gagne leur vie, est toujours interdite à la pêche.
«Manque de préavis pour les pêcheurs»
Il aurait fallu donner un plus long préavis aux pêcheurs avant la date de réouverture de la pêche hors lagon. C’est ce qu’affirme Christian Hang Hong, pêcheur. Après le contrecoup du confinement et de l’échouement du Wakashio, les pêcheurs «n’avaient plus de casiers», explique-t-il. «Les autorités ont promis un remboursement. Ziska zordi pankor trouv nanié.» Il poursuit : «Les pêcheurs à la ligne ont tout ce qu’il faut à domicile. «Tou so bann zafer dan so tan.» En revanche, celui qui utilise des casiers a besoin de temps pour se préparer à sortir. «Pour fabriquer une quinzaine de casiers, il faut environ un mois et demi. Que font les pêcheurs pendant tout ce temps ?» Selon lui, les pêcheurs «ki éna enn ti finans» ont pu se préparer à la réouverture. Mais nombre d’entre eux «zot dan lapenn». Combien coûte un casier «lamer déor» ? Christian Hanh Hong cite le chiffre de Rs 5 000 par casier, «fait et fourni». Si le pêcheur prend à sa charge l’achat des matériaux – fil, ferraille pour la structure etc. –, la main-d’œuvre lui revient à «Rs 2 000-Rs 2 500».
Publicité
Les plus récents