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Nooresh Juglall: «Je pense que le concept de Club Jockey marcherait très bien à Maurice»
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Nooresh Juglall: «Je pense que le concept de Club Jockey marcherait très bien à Maurice»
Fraîchement auréolé du titre de Best Mauritian Jockey et de Champion Jockey 2020, Nooresh Juglall a reçu l’express à son domicile à SainteCroix, lors de la semaine écoulée. Dans l’entretien qui suit, le crack jockey se livre, d’une part, sur son parcours jusqu’ici. Un parcours qu’on pourrait bien qualifier de véritable success story. Et d’autre part, sur sa saison 2020 sous les couleurs de l’écurie Rousset au Champ de Mars.
Nooresh Juglall, vous êtes, depuis le 20 décembre, le jockey champion de Maurice. Comment vivez-vous ce statut ?
Je dois d’emblée dire que c’est un rêve d’enfant qui se réalise pour moi. Je suis aujourd’hui un jockey satisfait de mon travail et heureux pour ma famille qui m’a toujours soutenu. Je suis aussi très heureux pour la grande famille de l’écurie Rousset qui me fait confiance. Ma consécration leur donne en quelque sorte raison de m’avoir embauché. Je garde toutefois les pieds bien sur terre. Vous savez, les choses changent vite aux courses. 2021 sera une autre saison.
Outre le titre de Mauritian Champion Jockey vous remportez surtout le titre de champion toutes catégories, soit 29 ans après Anand Bundhoo en 1991. C’est un exploit car aucun jockey n’a réussi à s’approprier ce titre pendant si longtemps ?
Oui, le hasard fait si bien les choses. Savez-vous que je suis né en 1991, l’année même où Anand Bundhoo était sacré champion ? Cela fait un bon bout de temps non? (Rires). Je pense qu’il n’y a pas beaucoup de jockeys mauriciens qui ont eu la chance de monter pour les top stables pendant toute une année, ce qui explique ces statistiques. L’année dernière, j’avais déjà remporté le titre chez les locaux et ce n’était pas mon objectif pour 2020. Pour moi, le challenge était de remporter le titre de champion overrall. C’est un peu pour ces objectifs-là qu’on se réveille le matin. L’occasion s’est présentée et il n’était pas question de la laisser filer.
Revenons sur vos débuts dans le giron hippique. Pour avoir suivi votre parcours, nous savons que vous n’êtes pas né avec une cuillère en argent dans la bouche et le succès, vous avez été le chercher…
(Emu) J’ai toujours voulu être jockey depuis mon jeune âge. Ma famille étant très modeste, lorsque j’étais à l’école, j’avais dû prendre un emploi à mi-temps qui était l’arrosage des pistes au Champ de Mars. Je rentrais de l’école à 15 heures et je prenais mon job à 16 heures. On rentrait à 22 heures, voire 23 heures. Les dimanches, mon boulot était, en compagnie d’autres part-timers, de laver les locaux des bookmakers. Même pendant la période des examens, je travaillais dur sur les pistes. Par la suite, j’ai eu un job chez l’écurie Maingard et à partir de là, les choses ont bien évolué. Je ne peux que remercier les officiels du Mauritius Turf Club de m’avoir choisi pour faire mon apprentissage en Afrique du Sud. C’était un cadeau tombé du ciel.
Après vos premiers pas dans les vestiaires en Afrique du Sud, vous montez en puissance avec deux titres d’apprenti champion rehaussés par des victoires avec Cherry On The Top dans le Triple Crown. Cela a dû être une sacrée expérience, n’est-ce pas ?
Effectivement. Bien que j’eusse plusieurs choses qui jouent contre moi, j’ai pu me faire une place au soleil. Il y avait la langue anglaise que je ne maîtrisais pas trop et presque rien comme carnet d’adresses dans le giron, mais j’ai pu petit à petit mettre en avant mon talent et décrocher des montes valables jusqu’à remporter deux titres d’apprenti champion pour toutes les provinces d’Afrique du Sud. Je garde de très bons souvenirs de mon apprentissage et je peux dire d’ailleurs que je n’ai pas mis un point final à mon parcours au pays de Mandela.
Vous avez également bien fait à Singapour. Pourquoi cette décision de rentrer à Maurice alors que vous étiez parmi les meilleurs dans ce pays ?
Mon épouse rencontrait des problèmes pour décrocher un visa et comme nous venons d’avoir notre premier fils, il était plus judicieux pour moi de rentrer à Maurice pendant un moment. Et puis il y a eu la pandémie de Covid-19.
Avez-vous mis une croix sur votre carrière sur le plan international?
Non, pas du tout. Je pense toujours aller monter à l’étranger. Mais avec la pandémie de Covid-19, il serait plus sage d’attendre encore un peu avant de considérer cette option. Allons dire que ce sera sur les tablettes pour 2022.
Parlons de vos débuts chez Rousset. Vous avez dû faire face à des commentaires acerbes, voire inacceptables, dirigés contre vous dans le paddock lors d’une journée de courses…
(Se redressant sur sa chaise) C’est l’un des points noirs de la saison pour moi. Il est vraiment difficile de monter à Maurice même si je me suis habitué maintenant. Vous pouvez être un excellent jockey si vous remportez la deuxième course mais si vous perdez la troisième vous êtes tout d’un coup un jockey qui doit aller chercher un autre métier. Je ne veux pas que les gens me comprennent mal. Mais il faut que certaines personnes soient plus raisonnables et justes. On ne peut gagner à chaque fois. Tenez, je vous cite un exemple. Je suis en selle sur Ron’s Joy. Je parle de sa première victoire. Je prends la décision de faire un move au 600m. Je remporte la course. Qu’est ce qui se serait passé si le cheval avait plafonné dans les 25 derniers mètres ?
(On sent une certaine émotion dans sa voix) Je suis souvent accompagné de mon épouse et de mes enfants et le fait qu’ils doivent entendre ces commentaires qui comportent des jurons ne me fait pas plaisir du tout. Mais je dois dire que j’ai toujours eu le soutien de mon entraîneur Gilbert Rousset et Soodesh Seesurrun pendant ces moments, ce qui compte le plus pour moi.
Abordons plutôt des moments plus intéressants. Qu’est-ce qui vous a fait le plus plaisir en 2020 ?
Je dirai la victoire de Patrol Officer dans la Coupe des Présidents. L’entraîneur avait tenté un pari osé en l’alignant sur plus long et en plus forte compagnie, mais le cheval a gagné comme un très bon coursier. Je profite de vos colonnes pour féliciter ses propriétaires pour le titre de Cheval de l’Année.
Justement, l’entraîneur Gilbert Rousset a récemment déclaré dans nos colonnes que vous serez encore une fois son jockey attitré pour 2012 et qu’il espérait seulement que vous ne lui demanderez pas une hausse de salaire (Rires) ?
(Grand éclat de rire) Je suis également bien motivé de travailler encore une saison pour le compte de Gilbert Rousset. Cette année nous avons remporté le championnat mais nous n’avons pas eu beaucoup de chance dans les classiques. On va essayer d’en gagner la saison prochaine.
Vous avez monté à Singapour où le concept de club jockey marche très bien. Pensez-vous qu’on peut envisager d’introduire ce concept à Maurice ?
(Pensif) Je pense que ce concept marcherait très bien à Maurice. Reste que le Mauritius Turf Club se trouve dans une situation financière difficile et il lui sera un peu compliqué d’aller dans ce sens. Mais si le gouvernement donnait un coup de main au Mauritius Turf Club dans ce projet, cela aurait été une très bonne chose. Avec le concept de club jockey, les cavaliers sont obligés d’avoir un certain pourcentage de réussite pour voir leur contrat être renouvelé, il n’y a aussi pas de place pour des écarts de conduite.
Votre frère Tejash vous a emboîté le pas et on peut dire qu’il se débrouille bien avec une cinquantaine de réussites. Un commentaire sur ses performances…
Je pense qu’il va progresser pour devenir un bon jockey. Il a bien fait lors de son apprentissage. Il a le désavantage d’être mon frère. Les gens s’attendent des fois plus de lui. Mais il devrait montrer son potentiel une fois qu’il obtiendra des montes plus valables. Il sera à Maurice l’an prochain, comme il a déjà terminé son apprentissage.
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