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Enquête judiciaire: Vinay Appanna était-il à Ebène le 16 octobre ?

3 mars 2021, 14:22

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Vinay Appanna a-t-il tellement de téléphones portables qu’il les confond ? Trop de voitures ? Trop de lieux de résidence qu’il ne sait parfois même pas de laquelle on parle ? Trop de compagnies –18, selon lui – qu’il s’y perd lui-même ? Trop d’employés ? Ses réponses ont été presque invariablement ponctuées de «probablement». À moins qu’il ne veuille se la jouer prudent pour ne pas se mouiller ?

C’est l’avocat du DPP, Me Azam Neerooa, qui a commencé l’interrogatoire de Vinay Appanna hier en lui demandant pourquoi il n’a pas donné à la MCIT, tous les numéros de portables qu’il utilise, qu’ils soient à son nom, au nom d’une de ses multiples compagnies ou au nom de son épouse. 

- Vinay Appanna (VA) : «Je croyais que l’on me demandait les téléphones qui m’appartiennent.» 
- Azam Neerooa (AN) : «Vous vouliez induire la police en erreur ?» 
- VA : «Non, je dis la vérité aujourd’hui parce que je sais que je suis sous serment alors que j’étais très stressé devant les policiers», tente-t-il de justifier. 
- AN : «Stressé, même si vous étiez accompagné de deux avocats à la MCIT ?» 
- VA : «Je disais aussi la vérité à la MCIT, enfin, autant que ma mémoire me le permettait.» 

Ce genre de propos approximatifs émaillera les réponses d’Appanna toute la journée. Mais c’était sans compter la vivacité d’esprit de l’avocat du DPP qui rétorque : «Qui nous dit que vous ne renierez pas plus tard vos réponses, que vous dites sincères en cour aujourd’hui, en remettant en cause votre mémoire une nouvelle fois ?» 

Pas de réponse. 

Florilège des autres répliques de Vinay Appanna : «Probably and most probably.» 

- AN : «Avez-vous rencontréYogida Sawmynaden dernièrement ?» 
- VA : «Uniquement durant le confinement, probablement. Je ne me rappelle pas pour après le confinement.» 
- AN : «Pour qui travaille Narendra Samod ?» 
- VA : «Pour Deepak Bonomally. Mais parfois aussi pour mon père.» 
- AN : «Où étiez-vous le 16 octobre 2020 ?» 
- VA : «Au numéro 13, Cybervillage, Ebène. Probablement.» 
- AN : «Où est votre téléphone portable actuellement ?» 
- VA : «Probablement avec mon chauffeur.» 

Et quand on lui rappelle qu’il ne peut dire «probably» à chaque fois, Appanna précise en riant : «Most probably alors.» Après la pause déjeuner, le témoin veut revenir sur son emploi du temps du 16 octobre car dit-il, «je me rappelle mieux maintenant». Et quand il dit qu’il est resté chez lui ce soir-là, Me Neerooa le confronte à une assertion de Deepak Bonomally, qui a déclaré que lorsqu’il s’est rendu chez Appanna ce jour-là, ce dernier n’était pas chez lui. 

- «Qui s’est trompé alors, Bonomally ou vous ?» lui demande Me Neerooa. 
- VA : «Deepak Bonomally, probablement.» 
- AN : «Vous avez parlé à votre banquier de chez vous ?» 
- VA : «Oui, de chez moi, Probablement.»

 

 

Les lieux de résidence d’Appanna

<p>Quand Vinay Appanna déclare à Me Neerooa que son lieu de résidence est <em>&laquo;Au Bout du Monde&raquo;</em> mais aussi au 27, Cybervillage, la magistrate intervient. :<em> &laquo;Je croyais que c&rsquo;était seulement au 27, Cybervillage !&raquo;</em> Et l&rsquo;avocat du DPP de s&rsquo;interroger : <em>&laquo;Pas à Anahita ?&raquo;</em> Réponse d&rsquo;Appanna : <em>&laquo;Non, je n&rsquo;y suis parti qu&rsquo;une seule fois.&raquo; </em>Cependant, pour avoir caché l&rsquo;adresse d&rsquo;<em>&laquo;Au Bout du Monde&raquo;</em>, l&rsquo;avocat requiert un avertissement que la magistrate lance alors à Appanna. On apprend aussi que le témoin, en plus d&rsquo;être propriétaire d&rsquo;une maison en construction à Bagatelle, loue une maison donc <em>&laquo;Au Bout du Monde&raquo;</em>, et que de temps en temps, il vient habiter au 27, Cybervillage chez son papa. Et que l&rsquo;autre appartement au 13, Cybervillage a été converti en bureau. Mais il ne donne pas le nom du propriétaire de la maison du <em>&laquo;Bout du Monde&raquo;</em>, se contentant de l&rsquo;écrire sur un bout de papier pour ne pas attirer des problèmes audit propriétaire, dit-il.</p>


Bagatelle pour un anniversaire 

<p>Comment être sûr que Vinay Appanna n&rsquo;a pas quitté son domicile ce jour-là ? <em>&laquo;C&rsquo;est mon beau-frère Jonathanrao Ramasamy qui est venu prendre mon épouse et mon enfant pour les emmener à un anniversaire à Bagatelle.&raquo;</em> Ses alibis donc : le directeur de la <em>State Trading Corporation</em> et son papa, entre autres. Et lorsque l&rsquo;avocat du DPP veut bien savoir pourquoi Appanna a déclaré à la MCIT qu&rsquo;il est passé à Bagatelle vers 17 h 30, sa réponse est en forme de question, <em>&laquo;Pourquoi ?&raquo;</em> Ce qui irritera l&rsquo;avocat, qui lui rappelle que c&rsquo;est lui qui pose les questions pas le témoin. Il racontera alors qu&rsquo;il n&rsquo;est pas sûr qu&rsquo;il soit parti à Bagatelle.</p>


Les allées et venues dans le bureau/domicile du patron d’AV Techno-World

<p>Me Roshi Bhadain ira lui droit au but, en demandant tout de go à Vinay Appanna s&rsquo;il a tué Soopramanien Kistnen ou non.&nbsp;<br />
	<strong>- VA :</strong> &laquo;Non.&raquo;&nbsp;<br />
	<strong>- Roshi Bhadain (RB) :</strong> &laquo;Avez-vous fait tuer Kistnen ?&raquo;&nbsp;<br />
	<strong>- VA :</strong> &laquo;Non.&raquo;&nbsp;</p>

<p>Commencent alors des demandes d&rsquo;éclaircissements de la part de Bhadain sur les voitures d&rsquo;Appanna et sur les visiteurs à ses domiciles et à ses bureaux sis au 13 et 27, Cybervillage à Ebène. L&rsquo;avocat veut savoir si toutes les allées et venues sont notées par la sécurité à l&rsquo;entrée du Gated Community. <em>&laquo;Pas toutes&raquo;</em>, répond Appanna, qui veut faire croire que le contenu du livret n&rsquo;est point fiable. Il fournit même l&rsquo;exemple de quelqu&rsquo;un qui lui a rendu visite mais dont le nom ne figure pas sur le livret des gardiens. <em>&laquo;Et c&rsquo;est qui, ce quelqu&rsquo;un ?&raquo;</em>, lui demande Rodhi Bhadain.&nbsp;</p>

<p><strong>- VA : </strong>&laquo;C&rsquo;est Jonathan Ramasamy.&raquo;&nbsp;<br />
	<strong>- RB : </strong>&laquo;Et pourquoi avez-vous vérifié le contenu du livret des gardiens ?&raquo; Vinay Appanna prend son temps, réfléchit, choisit ses mots :&nbsp;<br />
	<strong>- VA : </strong>&laquo;Je voulais savoir à quelle heure un de mes employés avait quitté le travail.&raquo;&nbsp;</p>

<p>Et lorsque Me Bhadain, non satisfait de cette réponse, lui rappelle que c&rsquo;est important, vu que c&rsquo;est ce jour-là qu&rsquo;est mort Kistnen, Vinay Appanna admettra qu&rsquo;en fait c&rsquo;était à la suite de son interrogatoire par la MCIT, le 15 décembre dernier. Et en disant cela, il rigole. Ce qui ne fait pas plaisir aux proches de feu Kistnen présents en cour. Appanna ment-il ou se trompe-til ? Réponse dans les jours qui viennent.</p>



Qu’est-il arrivé aux images des caméras de Safe City à La Louise le 5 septembre 2020 ?

Pourquoi a-t-on déconnecté l’ancien système de CCTV le 5 septembre 2020 à La Louise alors que le nouveau, Safe City, n’était pas encore prêt ? Nous avons voulu savoir auprès d’un responsable de Safe City. «Ces caméras étaient devenues obsolètes. Les pièces de rechange étaient introuvables. Sa maintenance coûtait beaucoup trop alors que nous avons un nouveau système performant qu’est Safe City.» 

Le DCP Krishna Jhugroo est venu confirmer le 25 février que l’ancien système de CCTV a bien été désactivé le 5 septembre. Alors que les nouvelles caméras de Safe City n’ont été activées à La Louise que le 29 octobre 2020 après avoir été installées le 21 octobre. «Kaya a choisi le mauvais moment pour mourir», nous dit un proche du défunt Soopramanien Kistnen, ou alors «l’on a choisi le bon moment pour l’assassiner». 

On a également obtenu confirmation de la bouche du DCP Jhugroo que Safe City ne conserve les données que pour 30 jours. Et qu’il n’y a pas de back-up dans le cloud ou ailleurs. Encore une fois, pas de chance pour feu Kistnen. Le DCP a bien affirmé que, s’il y a de la place sur les serveurs en raison de la non-installation de toutes les 4 000 caméras, on pourrait recouvrir les images du 16 octobre à La Louise. Mais voilà, la cadence d’installation a augmenté sensiblement depuis, pour passer de 2 500 en octobre à 3 270 en février 2021. Les images ont donc été effacées ‘malheureusement’, par manque de place. Le DCP rassure cependant : les images récupérées et visionnées où aucune trace de Kistnen n’a été vue ont, elles, bien été sauvegardées. Celui-ci a promis qu’il les remettrait à la cour. 

Autre information capitale livrée par le DCP Jhugroo : les images sont stockées au Government Online Service qui dépend du ministère des Technologies de la communication et de l’innovation. Donc, pas au Main Command Centre de la police. 

Et la reconnaissance faciale tant vantée du système de Safe City ? «Pas encore opérationnelle», répond Krishna Jhuboo à Me Roshi Bhadain, ajoutant «Mauritius Telecom y travaille en ce moment.» Pour être rassurant…

Question : Cherche-t-on avec les réponses fuyantes sur les caméras Safe City à nous cacher autre chose que la mort de Kistnen ? Par exemple, que le système n’est pas prêt depuis tout ce temps ? 

Quant à Huawei, ils nous ont donné la réponse suivante : «Huawei is the equipment provider for Mauritius Safe City project. The project owner has the rights to decide the activation and use of specific functions of the equipment, not Huawei. In regard to the ongoing court hearings on a widely reported case, Huawei has already been cooperating with the relevant department and provided necessary information to assist with the investigation. As you know, this issue is before the court and, as such, it would not be appropriate to provide detailed comment.»