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Moi, Sandrine, dialysée en quarantaine

11 avril 2021, 22:25

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Moi, Sandrine, dialysée en quarantaine

Depuis deux semaines, ce sont les patients dialysés qui décèdent le plus du Covid-19. A hier, six d’entre eux avaient perdu la vie, dont quatre étaient positifs au coronavirus. Sandrine, elle, est toujours en quarantaine. Récit.

C’est à l’hôtel Tamassa qu’elle est en quarantaine. Sandrine (prénom d’emprunt), âgée de 41 ans, en est à son seizième jour d’isolement en ce dimanche. Elle compte chaque jour, chaque minute, chaque seconde qui la sépare de ses proches et de son foyer. Si tout va bien, elle pourra quitter sa chambre, sa prison, dans cinq jours...

Pour elle, cette quarantaine est une autre épreuve de la vie. Une expérience lors de laquelle elle doit faire preuve de courage, de force et de patience. Des traits de caractère qu’elle a su forger depuis 2013. L’année où elle apprend à son réveil que ses reins ne fonctionnent plus après s’être évanouie.

Lorsque Sandrine apprend qu’une infirmière de l’hôpital de Souillac, où elle fait sa dialyse depuis huit ans, est infectée, même si la nouvelle est comme un coup de massue, elle tente de garder son calme. Toutefois, impossible de ne pas penser au pire. Des questions et des appréhensions, elle en avait des tonnes. Ainsi que la boule au ventre et de la tristesse. «Noun bien soke sirtou ki bann personel swagnan ti pe pran extra pre- kosion. Ziska zordi nou pann kone si se enn pasian kinn infekte infirmier-la ou vice versa.»

Pour Sandrine, sur ces 16 jours «kapav ekrir enn livre !» Car en ce laps de temps, elle a subi quatre tests PCR, perdu cinq de ses amis et a appris à vivre dans la crainte tout en continuant à faire sa dialyse deux fois par semaine et à apprécier le fait d’être toujours en vie malgré ces circonstances. En effet, en tant que patiente dialysée, elle a toujours su que sa vie est fragile, très fragile. Désormais, elle essaie d’en profiter, chaque bouffée d’air frais compte. Mais elle ne peut plus serrer personne dans ses bras, elle qui chérit tant le contact physique. C’est nouveau pour elle. Mais Sandrine est consciente du fait que tout peut basculer, si elle ne prend pas plus de précautions qu’avant. «Moman kan monn gagn plis per se kan monn aprann ki mo de kamarad ki ti pe fer dialyse mem sesion ki moi ti pozitif. Noun voyaz ansam pou al fer dialyse detrwa zour avan kone zot pozitif et ki zot mor... Rien ne laissait présager que c’était la dernière fois que je les voyais...»

Les moments qui font battre son cœur un peu plus rapidement que d’habitude, pendant cette quarantaine ? Lorsque retentit la sonnerie de son téléphone et qu’un de ses proches l’appelle. Le fait de pouvoir entendre la douce voix de son époux, de sa mère ou de ses frères, adoucit ses craintes. «Même si je suis triste d’être loin d’eux, je me sens comme une héroïne qui affronte un périple pour protéger sa famille. Eux, que j’aime tant.» Cependant, malheureusement ces coups de fil ne sont pas les seules choses qui influent sur son pouls. Sandrine avoue que chaque matin, voir les officiers en combinaison de la tête au pied l’angoisse beaucoup. Surtout les jours où il fallait attendre les résultats de ses tests PCR. Le stress était au rendez-vous. Il l’est toujours d’ailleurs.

«Je me souviens aussi lorsque je venais d’arriver, pendant quatre jours environ, on recevait de la nourriture pas du tout adaptée à notre état.» En effet, au début de sa quarantaine elle avait mangé du briyani, elle avait vomi... Les jours suivants, ce n’était pas mieux. Au menu : des nouilles bien épicées ou encore des salades de concombre, qu’elle ne peut absolument pas manger. «La banane aussi est indigeste pour la dialysée que je suis. On aurait bien pu aussi nous dire d’avaler du poison ! Et tous les matins, c’est ce à quoi j’avais droit pour le petit-déjeuner. Je devais le jeter à la poubelle. Ce qui me brisait le cœur. Heureusement qu’après ils ont su quoi nous donner.»

Maintenant que le jour de sa sortie approche, Sandrine n’a qu’une seule chose en tête : «Pous revans pou bann manze mo pann gagne, kan mo rant lakaz», dit-elle en riant. Et au fond d’elle, elle prie, espère, et souhaite de tout son cœur que rien ne brisera ce rêve de retrouver sa maison, ses proches. Et la santé.