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Mauritius Africa Fund: Fonds destiné à l’Afrique mais dépensé à Maurice
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Mauritius Africa Fund: Fonds destiné à l’Afrique mais dépensé à Maurice
Peut-être par manque de projets, ou par besoin de montrer qu’il sert à quelque chose, ou les deux à la fois, le Mauritius Africa Fund vient de sortir un projet de son chapeau et qui semble être loin, très loin, des objectifs africains de ce fonds : la construction d’un immeuble de 50 étages dans la circonscription du Premier ministre, à Côte-d’Or.
La vue dégagée sur le soleil couchant à Côte-d’Or risque d’être un peu plus assombrie, cachée même et gâ- chée en tout cas par un projet d’immeuble de 50 étages du Mauritius Africa Fund (MAF) sur quatre hectares. Des centaines de millions de roupies sont injectées chaque année dans le MAF. Personne ne questionnait trop l’existence de cet organisme, le projet ayant tout l’air de venir en aide aux investisseurs mauriciens intéressés par des aventures africaines.
Le MAF devrait servir aussi à faire de Maurice l’archi-ressassé «gateway to Africa» ou de tremplin pour des investisseurs chinois ou indiens. On ne sait combien de millions de roupies ont été investies en Afrique en tout et combien ont-elles rapporté. On ne sait pas non plus ce qui a été fait de concret.
Justement, du «concrete», il y en aura donc bientôt mais pas en Afrique, plutôt à Maurice, plus exactement à Côte-d’Or. Le MAF vient de lancer un appel à expression d’intérêt à l’international pour la construction d’un immeuble de 50 étages. Cette fois-ci, c’est le privé qui financera. Mais il est entendu que le MAF mettra aussi la main à la poche en se posant comme partenaire de l’investisseur attendu. Landscope financera les autres travaux d’infrastructures.
Mais combien mettra le MAF ? «Il faudra attendre le 30 avril pour savoir si on a reçu des expressions d’intérêt», nous répond Yash Manick, le CEO du MAF. Nous sommes revenus vers lui le 12 mai pour savoir combien d’expressions d’intérêt il a reçues pour ce projet. Il nous a référés aux réponses du ministre des Finances du lendemain, mardi. Le ministre, lui, a repassé la boule à Yash Manick en réponse à Khushal Lobine : «J’attends d’avoir plus d’informations du MAF.»
Projet Mammouth blanc
À l’heure où les bureaux sont vides, le travail à domicile étant fermement ancré dans les habitudes, on se demande si ce projet de nouveaux espaces bureaux est viable. Une étude de viabilité et de faisabilité a-t-elle été entreprise avant de lancer un appel à des expressions d’intérêt ? a voulu savoir Khushal Lobine mardi, tout en ajoutant : «Is it a priority of this Government within the Mauritius Africa Fund to go with such a mammoth project for Mauritius ?»
Pas de réponse claire du ministre qui s’est lancé dans une longue tirade vantant le projet d’immeuble tout en soulignant : «Il nous faut aussi travailler sur des projets immenses pour notre pays.» Le ton est donné et a d’ailleurs déjà été donné: plus c’est grand, mieux c’est. Comme le complexe sportif du même lieu ?
Mais quelle sera la vocation de cet immeuble ? Selon l’annonce publiée, il y aura un centre commercial, une salle d’expositions, des espaces bureau grade A, un hôtel cinq-étoiles, des résidences privées, une salle à manger, des facilités pour les loisirs et fitness et l’inévitable salle de conférences. Mais quel lien avec la politique africaine tant vantée ? avons-nous demandé à Yash Manick… «The key feature of the Côte-d’Or project is the iconic Business Tower, serving as the visible and recognizable symbol of regional economic leadership that Mauritius aspires to… It will undoubtedly project the vitality of Mauritius as a serious trade hub for Africa with global connectivity backed by a strong financial centre, a vibrant freeport and a high-performing port.» Un symbole de 50 étages donc ?
Et à Reza Uteem qui demandait au ministre Padayachy «the vocation of the Mauritius Africa Fund is to encourage Mauritian entrepreneurs to invest in Africa. So, is not the hon. Minister of Finance agreeable that instead of trying to go into real estate business, MAF should concentrate on its primary objective of helping Mauritians to go and invest in Africa? La réponse : «Nous n’avons même plus d’avions qui desservent le continent africain actuellement, comment faire pour que le MAF continue à se développer ?» Rappelons que dans le discours du Budget 2020-2021, le gouvernement avait prévu à travers la MIC de mettre encore Rs 10 milliards dans le MAF «to invest in African projects, including SEZ projects under a G2G framework».
Nous avons demandé à Yash Manick s’il y a de bonnes perspectives pour l’hôtel cinqétoiles inclus dans le projet, de même que pour le secteur offshore qualifié par MAF de «strong», pour un énième centre de conférences, alors que nous en avons déjà beaucoup sans compter les salles de conférences des hôtels qui sont d’ailleurs préférées même pour les activités gouvernementales et aussi sur la pertinence d’inclure un centre commercial en ces temps difficiles pour le commerce ? Nous attendons sa réponse à défaut des réponses ministérielles qu’il nous avait promises.
World Trade Center mauricien
Xavier-Luc Duval nous rappelle que c’est lui qui a mis sur pied le MAF dans le but d’accompagner les investisseurs mauriciens en Afrique et de crédibiliser leur projet en incluant le gouvernement comme leur partenaire à hauteur de 10 %. Or, nous dit-il, «le nouveau gouvernement a complètement dévié de cet objectif en privilégiant l’investissement dans l’immobilier en Afrique et maintenant à Maurice». Il nous rappelle que lorsqu’il a indiqué au ministre Padayachy que les projets partenariat publicprivé(PPP) n’ont jamais marché à Maurice, celui-ci a répondu par un argument inouï : «Ce qui est intéressant aussi, c’est le fait de pouvoir, même si cela n’a pas été fait dans le passé, réussir sur un projet, et un projet iconique.» Voilà ! Une nouvelle tentative de PPP pour un World Trade Center mauricien.
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