Arrivée comme une outsider, la Squadra Azzurra s’est progressivement affirmée comme potentielle championne et suscite aujourd’hui l’admiration du grand public. Stefano Zinno nous explique ce qui fait le charme de cette équipe magique qui défiera l’Angleterre ce soir à Wembley…

L’Italie est en finale de l’Euro et force naturellement le respect. Pourquoi ?

Moi, ce qui m’impressionne avant tout, c’est le staff qui est sur le banc de touche italien. Tu as vu tous ces anciens grands joueurs ? On peut pratiquement faire une équipe ! On a Mancini, Vialli, Oriali, Evani Lombardo… Si toi to ene zouere dans sa lekip la, couma to pou osé faire la bouss ek zot ? (Rires) Ils ont une telle expérience que ça se ressent dans l’équipe qui est sur le terrain. En demifinale, contre l’Espagne, j’ai remarqué cette différence aussi : avant de tirer les penalties les Espagnols étaient stressés, très sérieux. Côté italien ? Tou dimoune ti pé riyé, ti relax ! Une décontraction extrême.

Visiblement, c’est un groupe qui vit très bien oui. Roberto Mancini a rebâti l’édifice plus vite que prévu n’estce pas ?

Mancini a su aller chercher des joueurs qui n’étaient même pas titulaires dans leur club. De vrais ouvriers. Des gars qui viennent de clubs anonymes, comme Sassuolo. Là, tu vois le VRAI travail d’entraîneur. Il a fait d’une équipe nationale une équipe qui ressemble à un club, je ne pensais pas que c’était possible. On voit une vraie solidarité entre tous les joueurs. A chaque match, ils sont tous très impliqués dans le pressing. Pas un qui rechigne à bosser. Ca me rappelle le grand Milan de Sacchi…

L’Italie revient pourtant de loin…

Quand elle ne s’est pas qualifiée pour le dernier Mondial c’était un drame national. Cyclone classe 5 ! Mancini est reparti avec des miettes, chapeau à lui ! D’habitude, tu as toujours des grands joueurs dans une équipe et l’entraîneur amène 25 à 30% de la recette qui fait gagner. Là, c’est Mancini qui fait tout, sans aucune star, mais il a su instaurer ce staff avec des grands joueurs. Il a été très malin dessus… C’est rare de voir ça.

Les Azzurri semblent animés par une rage, dès l’hymne national. Qu’est-ce que ça vous inspire ?

L’Italie était dans une merde pas possible avant. Aujourd’hui, on sent qu’ils se donnent à fond. Ils sont comme en transe. Dès l’hymne national oui, c’est fou. A la fin de la demi-finale, tout le monde pleurait quand ils ont chanté : « Spina ! Spina ! » En hommage à Spinazolla, blessé au tendon d’Achille et qui ne rejouera pas avant 6 mois. C’est beau… 

La finale, contre l’Angleterre, se jouera à Wembley. En terre hostile. Ca ne vous inquiète pas ?

A ce niveau-là, peu importe où tu joues, c’est une finale. Wembley ou pas: rien à foutre, tu donnes 100%.

Vous retenez quoi de cette compétition ?

Avant l’Euro et pendant le premier tour, beaucoup ont critiqué l’Italie et ont dit qu’ils ne battaient que des petites équipes ! Mais à ce niveau-là vous croyez qu’il y a des petites équipes ? Pour moi tout le monde est au même niveau dès qu’on est dans les matchs à élimination directe. Par contre, j’ai regardé un peu la Copa America, c’est très en dessous… Sinon, j’ai trouvé cet Euro très sympa à voir. La demi-finale contre l’Espagne a été marquée par un fair- play extraordinaire des deux côtés, sur le banc et sur le terrain.

Quelle est la plus belle équipe de l’Euro ?

Je suis Italien, c’est clair que c’est difficile de dire une autre équipe… (rires) Mais sans rire, j’ai été épaté dès leur premier match, je l’ai dit à des expat’ avec qui on échangeait. C’est une équipe d’ouvriers, pas de patrons. Il n’y a pas de tireurs au flanc. Ce sont des gens qui bossent. Qui se tuent sur le terrain. C’est ça qui fait la différence. Il n’y a pas de grandes individualités comme l’Allemagne, la Hollande ou la Belgique. L’autre belle équipe, c’est la France. Elle a les individualités, mais ils n’avancent pas en groupe… Je pense qu’à la fin dans le sport, quand tu mets le cœur ça remplace tout. C’est magnifique. Respect Mancini, qu’on appelle affectueusement ‘Mancho !’

Qui est le meilleur joueur de cet Euro ?

(silence) Au dernier Mondial, on disait Mbappé. Il avait été vraiment impressionnant. Cette fois, je ne vois personne qui sorte du lot. Sinon le meilleur italien aura été Spinazolla mais il s’est blessé. Jorginho et Verratti ont fait un travail extra au milieu. J’adore aussi Lukaku, un gros bosseur aussi…

Et l’Angleterre, votre adversaire en finale ce soir vous n’en parlez pas ?

Elle est très rapide. Les Anglais ont eu un peu de chance à certains moments. Mais on va gagner. L’Italie doit faire plaisir à tout un peuple. Les joueurs nous doivent une revanche par rapport au Covid-19…