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Covid-19: le décès de Keira laisse également sceptiques des professionnels de santé
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Covid-19: le décès de Keira laisse également sceptiques des professionnels de santé
Adieux déchirants à l’hôpital Jeetoo, vendredi après-midi. Le décès de la petite Keirah Esther, 15 mois, aux petites heures du matin jeudi, a ému la population. Non seulement elle est le premier enfant positif au Covid-19 à mourir, mais les circonstances de ce décès restent aussi floues pour sa famille que pour des membres du corps médical…
«Je n’aurai jamais cru que je la perdrais lorsque j’ai franchi le seuil de l’hôpital le lundi 30 août. Tout s’est passé si vite et si affreusement…» pleure Samia Esther. Pour cette jeune mère de 18 ans, il est difficile de s’imaginer que sa petite Keira, celle qui illuminait sa vie au quotidien, n’est plus de ce monde. Le mal qu’elle ressent est bien plus martyrisant pour son corps et son esprit que le Covid-19 ne l’a été. Chaque pas qu’elle fait dans sa demeure à Résidence La Cure, lui brise le cœur. Et elle n’est pas la seule dans le cas.
Le père de la petite, David, et sa grand-mère, Kursla Henri, en souffrent aussi énormément. «Comme si tout bonheur s’était évaporé. Nou touzour dan sok», révèle cette dernière. Les jouets de Keira sont encore éparpillés par terre ; difficile de s’en défaire. Ses couvertures portent toujours son odeur et les murs, son art, comme si elle était juste allée se promener et qu’elle reviendra bientôt. «La dernière fois que j’avais mon enfant dans les bras elle n’était pas bien et c’est la dernière image que j’ai d’elle malheureusement. C’est vraiment très dur à encaisser. De plus, je n’ai même pas pu voir son visage une dernière fois et lui dire au revoir», regrette avec colère Samia.
«Si c’était le Covid-19 la première cause de décès, ce serait seulement une pneumonie qui l’aurait tuée.»
Le cauchemar a commencé le lundi 30 août. La petite Keira vomissait et ne voulait rien avaler. Samia décide alors de l’emmener pour une consultation. Cependant, arrivée à l’hôpital, après un test antigénique rapide, le personnel soignant annonce à Samia qu’elle est positive au virus. «On m’a annoncé que j’avais le Covid-19 et que je devais être admise en salle d’isolement. Ma fille aussi a effectué un test antigénique mais on m’a dit qu’il était négatif. Cependant, on l’a quand même mise avec moi dans la salle d’isolement où il y avait d’autres patients du Covid-19, alors qu’elle souffrait d’une gastro-entérite.» Selon Samia, bien qu’elle ait affirmé que David ou sa mère pouvait rester avec l’enfant, on lui a dit que Keira resterait dans cette salle. Salle que la petite quittera quatre jours plus tard pour l’unité néonatale de soins intensifs où elle rendra l’âme par la suite.
La famille de Keira affirme être autant dans la tourmente que dans la tristesse. Comment expliquer qu’il y ait eu deux certificats de décès et pourquoi leur a-t-on refusé une autopsie ? Pourquoi est-ce que c’est quand l’état de la petite s’est détérioré, quatre jours après son admission, que le corps médical a annoncé à la mère que Keira était positive ? Pourquoi après la mort de l’enfant, a-t-on dit à la famille qu’elle n’était morte du Covid-19 pour ensuite affirmer le contraire ? Pour tous ces pourquoi et comment, la famille a décidé de poursuivre l’hôpital pour négligence médicale.
D’ailleurs, le ministre de la Santé, Kailesh Jagutpal, pendant la conférence de presse du National Communication Committee vendredi, a déclaré que deux enquêtes seront initiées, au niveau du ministère et de la police et que «ce n’est pas possible» que deux médecins produisent deux certificats différents et qu’ils devront s’expliquer à ce sujet. Tout en soutenant que le décès de la petite a bien été attribué au Covid-19.
Cela diffère de la déclaration du directeur de l’hôpital ENT, le Dr Soobaraj Sok Appadu, dans le journal télévisé de la MBC, jeudi soir. Il a expliqué que la petite est morte d’une pneumonie par aspiration. Il a souligné qu’elle était négative à son admission à l’hôpital Jeetoo et qu’à la suite d’une dégradation de son état de santé le 2 septembre et d’un test PCR, les résultats se sont avérés positifs. Ce qui diffère des explications du ministère de la Santé par la suite.
«L’enfant n’aurait pas dû être admise avec sa mère et avec d’autres patients du Covid-19. Il est prouvé que dans une salle avec des patients du Covid, le virus circule dans l’air.»
D’autres médecins à qui nous avons parlé, trouvent que les enquêtes promises sont une décision appropriée. Pour un pédiatre travaillant dans le public, il y a beaucoup de confusion et un manque de communication dans cette affaire. Comme l’explique une autre source médicale proche du dossier, l’état de Keira se serait détérioré dans la salle d’isolement après un incident digestif commun chez beaucoup de jeunes enfants. «La petite a malencontreusement avalé son vomi et elle a commencé à s’étouffer. C’est pour cela qu’on l’a transférée d’urgence en soins intensifs néonatals.»
Selon ce pédiatre, on appelle cela une aspiration pneunomia, qui figurait d’ailleurs comme cause dans le premier acte de décès délivré par le médecin de garde à la mort de Keira. «Pour moi personnellement, cet acte de décès est le bon», indique le pédiatre. «Le Covid-19 ne peut à aucun moment causer une aspiration pneunomia. Si c’était le Covid-19 la première cause de décès, ce serait seulement une pneumonie qui l’aurait tuée. Mais cette enfant a eu une pneumonie par aspiration. Son contenu gastrique régurgité est malheureusement allé dans sa trachée et dans ses poumons, qui étaient encore petits, et a causé un manque d’oxygène. C’est d’ailleurs cela qui a aussi causé une hypoxic brain injury, un manque d’oxygène au cerveau, qui figure comme la troisième cause de décès sur les deux certificats. Certes, l’enfant était positive au virus mais ce n’est pas ce qui a causé sa mort.»
Selon notre source médicale proche du dossier, «les pressions» parentales pour une autopsie sur l’enfant, jeudi, auraient amené la pédiatre, qui a suivi Keira depuis son admission, à délivrer un nouvel acte de décès avec le Covid-19 comme première cause. «La pédiatre aurait réexaminé son dossier», affirme-t-on. En ce qui concerne le fait que l’enfant a été admise avec sa mère en salle d’isolement, notre source affirme que c’est la procédure de «ne pas séparer un enfant de sa mère». Même s’il est négatif ? «S’il est malade, oui», en ajoutant que Keira avait été testée positive au test PCR effectué le jour de son admission et les résultats avaient été délivrés le jour même. Ce qui diffère de la déclaration du Dr Sok Appadu à la MBC, jeudi soir. Quoi qu’il en soit, pourquoi Samia n’at-elle été informée que sa fille portait le virus que quatre jours plus tard ou deux jours après, selon la version du Dr Sok Appadu ? «Manque de communication. Un problème récurrent dans notre service en ce moment», soupirera notre source.
La petite aurait-elle pu être plus vulnérable à une forte exposition du virus dans la salle ? Selon le pédiatre, il était trop tôt, eu égard au nombre de jours entre son admission et son transfert à la neonatal intensive care unit, pour que le virus ait pu détériorer son état de santé. «À Maurice, jusqu’ici nous avons toujours eu des cas asymptomatiques ou avec des mild symptoms chez les enfants ou même les nourrissons. Ce bébé est le premier à mourir en étant positif au Covid-19.»
Toutefois, une autre pédiatre pense que «l’enfant n’aurait pas dû être admise avec sa mère et avec d’autres patients du Covid-19. Il est prouvé que dans une salle avec des patients du Covid, le virus circule dans l’air. So system iminiter ti deza inn tro afebli avek gastro ek anplis de sa li pa ti pe aliment li. Mo pa kone si vreman linn atrap sa virus la dan lopital ou avan me pa ti enn bon lide met li dan sa lasal-la. Parski pa ziss covid-19 ki ena dan enn lasal adultes en isolation. Ena bann lezot bakteri ki pa bon pou enn zanfan. Pa pou nanye ena lasal zanfan ek lasal adulte séparé antan normal».
Concernant la demande de la famille qui souhaitait qu’une autopsie soit pratiquée pour connaître les raisons exactes de la mort – demande qui a été refusée – des médecins interrogés soutiennent que l’autopsie d’un patient décédé du Covid-19 est difficile, coûteuse et n’est pas sûre d’être concluante. «Nous parlons d’un virus. Riské pa trouv nanié mem si ouver. Premièrement, nous n’avons pas la technologie adéquate pour le faire à Maurice et même si les tests sont envoyés à l’étranger, rien ne garantit que les résultats seront concluants. De plus, l’autopsie des patients positifs n’est faite que rarement à l’étranger également.»
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