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Nirvan Veerasamy, fondateur du YU Lounge: «Le Premier ministre a été induit en erreur»
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Nirvan Veerasamy, fondateur du YU Lounge: «Le Premier ministre a été induit en erreur»
Depuis la mise en demeure d’Airports of Mauritius Ltd (AML), le 10 septembre, vous informant qu’elle mettait fin à son bail de location, quelle est la situation ?
Comme vous le savez, on a été surpris de recevoir une mise en demeure d’AML nous sommant de vider les lieux et de «remettre le terrain dans l’état qu’il était en 2007». D’après cette mise en demeure, nous sommes appelés à démolir le bâtiment abritant le YU Lounge, le hangar et toutes les infrastructures dans lesquelles nous avons investi autour de Rs 300 millions depuis 2007, soit pendant plus de 14 ans. Cette sommation légale n’avait aucune raison d’être. YU Lounge opère en toute légalité, au vu et au su de tous.
Y a t-il eu des pourparlers entre les deux parties ?
Depuis cette mise en demeure, nous avons eu des rencontres avec plusieurs parties prenantes, qui nous ont assuré qu’une solution serait trouvée très prochainement. Cependant, nous notons que, dans les faits, rien n’a évolué alors que nous recevons des demandes de réservations que nous devons refuser. Ce manque de visibilité impacte le moral de l’ensemble des collaborateurs et des clients du YU Lounge et pénalise la destination Maurice alors que nous venons d’ouvrir nos frontières et que le pays a un besoin accru de devises étrangères.
Le YU Lounge n'est donc toujours pas opérationnel?
Depuis octobre 2020, le YU Lounge n’est pas autorisé à opérer normalement. Depuis, la famille entière du YU Lounge, qui comprend environ une cinquantaine de personnes, n’a cessé de multiplier les démarches auprès du gouvernement, des députés, des amis et d’autres personnes bienveillantes pour nous aider à retrouver notre droit, qui est celui d’opérer normalement et de gagner notre vie. Il est important de faire un récapitulatif des faits depuis la fermeture du YU Lounge afin de prendre la pleine mesure de notre sentiment incompréhension. Le 1er octobre 2020 et à la réouverture partielle de nos frontières, le YU Lounge a recommencé à opérer après avoir eu toutes les approbations nécessaires, y compris après avoir reçu la visite d’une importante délégation du ministère de la Santé, dirigée par le Dr Ashwamed Dinassing, le 2 septembre 2020. Le but de cette visite était de vérifier les protocoles sanitaires mis en place par le YU Lounge pour cette réouverture. Aucun changement ne nous a été demandé et cela a été aussi le cas quand ce même protocole sanitaire a été revu et validé par le Dr Catherine Gaud en 2021. On se souviendra que le 3 octobre, à l’arrivée de l’avion d'Emirates, il y a eu un cafouillage au terminal principal en raison d’un non-respect des protocoles mis en place. Au YU Lounge par contre, tout s’est bien passé, tant pour les vols commerciaux que pour les arrivées et départs d’avions d’affaires. Toutefois, le 16 octobre 2020, on reçoit une lettre d’AML nous sommant de transférer tous nos clients vers le terminal principal «pour des raisons de contrôle sanitaire». Evidemment, le YU Lounge s’est immédiatement soumis à cette directive, bien que cela a été très compliqué financièrement. On a entretemps concentré nos efforts sur les évacuations sanitaires et les rapatriements.
Que s'est-il passé ensuite ?
Nous nous sommes très vite mis en relation avec l'adjoint au Premier ministre et ministre du Tourisme afin de décanter la situation et le 29 octobre 2020, j’apprends la colère des membres du High Powered Comittee, ayant été informés que «n’importe qui entre et sort par le YU Lounge». Je suis reçu deux heures plus tard par l'adjoint au PM et il ne m’a fallu que quelques minutes pour lui donner la preuve que le YU Lounge avait toutes les approbations nécessaires (AML, le département de l’aviation civile, le ministère de la Santé, la police, etc.) pour opérer. J’ai eu l’occasion de produire sur une feuille A4, la liste des passagers, qui sont passés par le YU Lounge, les noms des personnes du ministère de la Santé, qui ont fait la prise de l’écouvillonnage (pour le test PCR) de chaque passager, l’immatriculation des voitures et les noms des chauffeurs, qui ont été responsables de l’acheminement des voyageurs vers leurs lieux de quarantaine et même le nom des policiers, qui ont accompagné ces voyageurs. De plus, le YU Lounge a réinvesti, en août 2020, dans un équipement technologique dernier cri pour la surveillance vidéo 24/7, qui est sous le contrôle d’AML, soit le prestataire de service pour tout ce qui concerne la sécurité et l’accès au YU Lounge. C’est absolument regrettable d’en arriver là.
Y-a-t-il eu d'autre avertissement d'AML après la mise en demeure ?
Depuis la mise en demeure, nous avons essayé d’avoir des rencontres et avons fait plusieurs propositions à AML, sans résultat concluant. Il faut dire que cette situation date de 2008 et que l’actuel gouvernement saura faire l’arbitrage afin de résoudre ce problème. Toutefois, nous regrettons un manque de réactivité pour trouver une solution.
AML vous réclame surtout une ardoise considérable…
Il est clair que la source de nos tribulations a été le non-paiement de certaines sommes dues à AML. Le YU Lounge admet que depuis le début de 2020, nous n’avons pu effectuer les paiements pour la location du terrain, car on a été durement affecté par la fermeture des frontières du pays. Toutefois, je tiens à faire ressortir que le YU Lounge a été un excellent locataire depuis 2008 et nous avons payé environ Rs 105 millions à AML pour la location du terrain et pour ses services de sécurité. À ce jour, notre passif est en dessous de Rs 10 millions (après avoir tenu en compte des sommes que nous doivent encore la Mauritius Duty-Free Paradise pour la location de son espace au YU Lounge). On a demandé, à plusieurs reprises, une concession commerciale à AML du fait que nous n’avons pu opérer depuis octobre 2020 et que nous ne pensions pas que c’était raisonnable d’avoir à payer pour la location du terrain pendant ce temps. Suite à l’absence de réponse, on a proposé un paiement par phases après notre réouverture et on a même fait un paiement de Rs 600 000 pour montrer notre bonne foi. Cette somme nous a été retournée sans aucune explication.
De plus, nous avons eu des difficultés quand une nouvelle politique pour le paiement des services essentiels nous a été communiquée. Bien que cela augmente nos coûts d’opération, nous avons toujours accepté le principe de payer pour ces services à condition que ceux-ci soient réglementés. Il nous paraît très dangereux de payer pour des services essentiels à des taux, qui ne sont pas régulés par l’Etat car cela peut éventuellement prêter à des conclusions malsaines. On a été très heureux de voir qu’en août 2021, cela a été fait par voie de réglementations. Toutefois, on a été surpris que le YU Lounge ait été omis de la liste des Port of Entry, malgré le fait que nous opérons depuis 2008 et que les services essentiels ont été fournis sans interruption aux clients du YU Lounge. Pour résumer, il me semble le Premier ministre a été malheureusement induit en erreur, d'autant plus qu’un General Agreement for Terminal Operations (GATO) a été signé le 23 août 2021, dans lequel YU Lounge a accepté l’ensemble des conditions imposées par AML.
Début octobre, les trois députés de la majorité de la circonscription no. 12 ont visité le YU Lounge. Quel en était le but ?
Nous avons accueilli la nouvelle de la visite de deux ministres et d’un député comme un signal clair et fort du gouvernement qu’une solution a été trouvée pour permettre la réouverture du YU Lounge. D’ailleurs, dans son discours aux dirigeants et membres du personnel, le ministre Bobby Hurreeram a loué les efforts d’entreprenariat, d’innovation, de prise de risque, d’investissement dans un domaine aussi important de l’économie. Il a aussi rassuré les membres du personnel en leur demandant explicitement de ne pas démissionner de leur poste, affirmant que tout rentrerait dans l’ordre le lundi suivant, soit le 11 octobre. Sauf qu'on est toujours sans nouvelle.
Une nouvelle société, qui devrait proposer des services pour jets et hélicoptères privés, vient d'être créée sous l'Airport Holdings. Pensez-vous qu'elle a été créée pour remplacer le YU Lounge ?
Comme beaucoup d’entre vous, j’ai appris cette nouvelle par voie de presse, le lundi 11 octobre. Bien évidemment, je ne suis pas au courant du Business plan de cette société. Toutefois, je suis heureux que l’Etat reconnaisse la valeur ajoutée que l’on peut avoir à travers des services d’hélicoptères et d’avions d’affaires. Cela fait plus de 20 ans que le YU Lounge véhicule l’idée qu’un pays, qui se veut moderne, doit absolument se doter de services d’hélicoptères et d’avions privés. Pendant le confinement, on a pu voir la nécessité d’avoir accès à des avions privés pour organiser des vols médicalisés et des rapatriements de plusieurs personnes au départ ou vers Maurice. On a aussi besoin d’avoir des hélicoptères ambulances pour transférer en urgences des personnes à l’intérieur du pays et de l’île vers d’autres lieux ou inversement. À la conception même du YU Lounge, on avait prévu une porte d’accès, qui donne directement au tarmac, et ce, afin de minimiser le temps de transfert. On a aussi un énorme enjeu, qui est de faire venir beaucoup plus de visiteurs, qui utilisent les avions d’affaires. En regardant ce qui s’est passé aux Maldives récemment, on se rend compte de leur succès pour attirer des personnes, qui peuvent dépenser des sommes astronomiques par semaine, et de ce fait, de présenter une grosse opportunité de recevoir beaucoup de devises en peu de temps. On se doit d’exploiter ce créneau et le YU Lounge est très bien placé pour attirer cette clientèle avec un terminal privé et un hangar pouvant abriter plusieurs avions. Pour répondre à votre question, je ne suis pas convaincu que la société dont vous faites référence a été créée pour remplacer le YU Lounge. Il n’y a que deux façons de remplacer le YU Lounge, soit de le nationaliser ou de le spolier. Je suis convaincu que ce n’est pas à l’agenda du gouvernement. Le YU Lounge a tout pour réussir. Il suffit qu’on nous laisse travailler en paix.
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