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Arvin Boolell: «Non à l’autocratie !»

28 octobre 2021, 14:00

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Arvin Boolell: «Non à l’autocratie !»

Le chef de file des Rouges, expulsé du Parlement, s’inquiète du manque de séparation des pouvoirs. Il s’interroge sur les motifs du projet de loi sur l’exploitation du pétrole. Davantage, c’est notre Constitution et les «Standing Orders» qu’il s’agit de revoir pour mettre un frein à la tyrannie d’un Premier ministre tout-puissant.

Vous serez de retour au Parlement dans un mois. Comment vivez-vous cette suspension ? 
Je suis un élu du peuple. J’ai donc la légitimité d’être au Parlement. Même si une suspension est justifiée, elle ne peut pas être disproportionnée et injuste. Je retrouverai ma place le 30 novembre. En attendant, je laisse la justice trancher car mes droits constitutionnels ont été bafoués. 

Le Parlement c’est le temple de la démocratie et on ne peut imposer le silence aux parlementaires de l’opposition, surtout quand l’exécutif est acculé. La population n’apprécie pas cette duplicité de l’arme de l’exécutif qu’est devenu le speaker de l’Assemblée nationale. Monsieur Phokeer était l’agent principal du MSM à Montagne-Blanche aux dernières élections. Il n’est plus membre d’un parti politique, autant que je sache. The Chair should not vacillate.

Est-ce normal que le speaker continue à siéger après l’épisode «Look at your face» ? 
Cette remarque choquante en dit long sur ce personnage grossier, vulgaire et qui mérite le mépris de la population. Mais il a le soutien tacite du Leader of the House, qui n’est autre que le Premier ministre. Le silence du PM et des membres du gouvernement les rend coupables. Pourtant, ils se gargarisent de leur soi-disant politique de société inclusive. 

C’est un gouvernement autocrate et la ligne de démarcation entre le régime et les institutions demeure floue. La séparation des pouvoirs, législatif, exécutif et judiciaire n’est également pas respectée. Un exemple de démocratie parlementaire ? Repassez s’il vous plaît. Monsieur le président est bien calé dans sa chaise pour des raisons évidentes : «J’y suis j’y reste.»

Pourquoi cet empressement pour l’«Offshore Petroleum Bill» à quelques jours de la COP26 ? 
Heureusement que les débats ont été reportés. Mais qu’on le veuille ou non c’est un signal contradictoire d’introduire ce projet de loi avec un certificat d’urgence «on the threshold» de la conférence sur le climat, qui va être un tournant pour le bien de l’humanité. Nous avons soumis notre Nationaly Defined Contribution pour être partie prenante de cette décision collective afin d’être carbon neutral au plus tard en 2050. 

Or, on a choisi la voie de l’acidification de notre océan pour plaire aux concessionnaires déjà connus des rangs du gouvernement. Ils vont s’aligner en file indienne pour obtenir le contrat. L’État-océan c’est le bien de la population. La nouvelle joaillerie de l’Etat – la richesse de la nation – va être allouée sans aucune provision dans le projet de loi concernant l’Auction bid. La clause 16 fait d’un PM le seigneur tout-puissant («unfettered powers»), donc c’est lock, stock and barrel et la voie mène à accroître le trésor de guerre du Sun Trust. Money politics is the name of the game. 

Le soupçon quant à la présentation de ce texte de loi est justifié par le manque de transparence. Le bien de la population n’appartient pas aux locataires de l’hôtel du gouvernement. On aurait dû consolider le travail abattu sous le gouvernement travailliste pour définir toute la politique de l’économie bleue. J’ai proposé un White Paper pour sensibiliser la population sur toute la question du cadre juridique. Tirons les leçons des problèmes qu’a connus PetroSeychelles, une société d’État, avec Afren et son partenaire Avana, compagnie pétrolière, après des études sismiques. 

La responsabilité collective est primordiale. Les lacunes nous sautent aux yeux. Il est temps de revoir notre Constitution et les Standing Orders de l’Assemblée nationale, pour en finir avec la tyrannie du nombre au Parlement avec un système de Prime Ministership où le PM is first amongst the equals.

Le ministre Kailesh Jagutpal a donné hier quelques chiffres par rapport à la situation du Covid-19. Y voyez-vous plus clair ? 
Le ministre de la Santé est aussi confus que ses chiffres. On ne peut pas escamoter la vérité. L’accès à l’information est un droit. Le variant Delta du Covid- 19 est mortel et n’épargne pas les jeunes. Attention à une accélération du nombre de cas, même si on espère que cette pandémie devienne une endémie. La guerre des vaccins et la politique de vaccination nous interpellent. 

C’est la raison pour laquelle, en tant que parlementaire et leader de l’opposition, j’avais fait un appel au Premier ministre début mars 2020, avant la fermeture des frontières, pour mettre sur pied un comité national qui transcende les différences, pour nous unir face à cette infection qui nuit à notre santé physique et économique. Mon appel n’a pas été entendu pour des raisons bassement politiques. Malheureusement, on ne peut empêcher que les virologues, les médecins, la société civile, nos frères de Rodrigues et d’Agalega et mon ami Xavier- Luc Duval, en tant que leader de l’opposition, exigent la vérité et rien que la vérité de la part du ministre. N’oubliez pas que depuis l’ouverture de nos frontières surtout, les chiffres sur les variants et l’incidence des cas ne peuvent être dissimulés.

Y a-t-il une pression sur vous pour reprendre le poste de leader de l’opposition, maintenant que Xavier Duval et le PMSD ont perdu un élu ? 
Non mais la situation a évolué. En tant que chef de file de mon parti, je me plie aux instances. J’ai aussi mes droits et obligations envers mes amis parlementaires. Il ne faut pas oublier qu’on a demandé à Shakeel Mohamed de remettre son tablier de whip de l’opposition et que je continuais à assumer le poste de leader de l’opposition à la demande des parlementaires du MMM et du PMSD momentanément. Le Parti travailliste n’a jamais été un parti de sursis. Je n’accepterai jamais. Vous avez raison de dire que les données ont changé, mais on ne précipite rien, et tout doit se faire dans le respect. Mes amis du MMM et PMSD, le député Nando Bodha et ceux hors du Parlement savent pertinemment bien que nous avons un régime mercantile qui ne croit pas dans la moralité politique et peut tout faire. Conjuguons nos efforts pour dire non à l’autocratie.