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Décès de Loganaden Govinden: end of the road for Angus?
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Décès de Loganaden Govinden: end of the road for Angus?
La mort de celui qui avait payé pour le terrain du Premier ministre risque fort de changer la suite que voulaient donner les détracteurs de Pravind Jugnauth au scandale Angus Road. Loganaden Govinden emporte avec lui ses secrets. Pourquoi était-il crucial dans le scandale d’Angus Road ? Mise en perspective avec, au centre, le duo Govinden-Jugnauth.
(Re)comprendre le scandale
Vous avez sans doute lu de nombreux articles de presse mentionnant Angus Road et il y a de quoi s’y perdre. Pourtant, l’affaire se résume très simplement. En 2001, Loganaden Govinden paie Rs 20 millions à Bel Air Sugar Estate (BASE) pour un terrain de 7 023 m2 à Angus Road, Vacoas. Mais rien ne se fait devant notaire. Il n’y a pas un seul document signé où BASE reconnaît avoir reçu cette somme et pour quel motif. Le bien immobilier n’est jamais transféré officiellement à Govinden. En 2008, Pravind Jugnauth et son épouse (comme acquéreurs) et un représentant de BASE (le vendeur) comparaissent devant le notaire Jérôme Koenig pour signer l’acte de vente. Tous signent et jurent que le couple Jugnauth a payé Rs 20 millions et Pravind et Kobita Jugnauth en deviennent à partir de ce jour-là, les propriétaires. Ces faits ont été confirmés par Pravind Jugnauth lui-même. Toutefois, le Premier ministre (PM) prétend ne s’être intéressé à ce bien qu’en 2008 ; et que de 2008 à 2013, il a remboursé Govinden «sou par sou».
Pourquoi le deal Govinden-Jugnauth-BASE est litigieux
Parce que Pravind et Kobita Jugnauth ne disent pas les faits exacts dans l’acte notarié quand ils prétendent avoir payé le vendeur. Techniquement, c’est Govinden qui a payé, et l’acte notarié devrait en faire mention. C’est loin d’être un détail. C’est un fait qui semble avoir été volontairement dissimulé dans un acte notarié. Le mobile du mensonge pourrait bien constituer la clé du scandale. Ensuite, les Rs 20 millions ont été payées en Angleterre en 2001. Ce paiement de Govinden au compte bancaire britannique d’un actionnaire de BASE (il y a déjà là une entorse comptable) fait l’objet d’une enquête des autorités britanniques sur un potentiel blanchiment d’argent.
Autre point (moindrement litigieux, mais tout de même controversé), la valeur du terrain. S’il valait Rs 20 millions en 2001, il est étonnant que sa valeur n’ait pas évolué en sept ans. En 2008, Pravind Jugnauth paie la taxe sur Rs 20 millions. Enfin, à l’express, Loganaden Govinden a expliqué avoir «acheté» le terrain en 2001 et l’avoir revendu à Pravind Jugnauth. Mais aucun acte notarié ne l’atteste. Acheter un terrain sans passer devant notaire est impossible. C’est aussi affreusement risqué pour l’acheteur qui ne détient aucun titre de propriété; un risque que Govinden a étrangement pris.
Les soupçons de mensonge de Pravind Jugnauth
Pravind Jugnauth affirme que ce n’est qu’en 2008 qu’il s’est intéressé audit terrain et qu’il a entrepris des démarches pour «l’acheter» de Govinden (même si sur papier il l’achète de BASE). Le problème dans cette version c’est qu’en 2004, son épouse et lui signaient déjà comme acquéreurs un «site plan de vente», qui a été publié plusieurs fois. Mis devant ce fait, Pravind Jugnauth avait balancé une énorme couleuvre face à toute la presse en expliquant qu’il avait signé comme voisin.
La théorie non prouvée
Pourquoi Pravind Jugnauth ne veut-il pas reconnaître qu’il avait porté un intérêt pour ce terrain bien avant 2008 ? Pourquoi ne reconnaît-il pas qu’il a signé comme acquéreur en 2004 ? Certes, c’est une folle théorie, mais dans certains milieux on pense que Pravind Jugnauth n’est pas étranger aux Rs 20 millions initialement payées par Govinden à Rountree, dès 2001. Un témoin aurait même dit à l’ICAC que c’est Pravind Jugnauth qui aurait dès 2001, expliqué à BASE qu’il achèterait le terrain, mais que c’est Govinden qui allait payer.
Pour l’heure, cette théorie n’a pas encore été prouvée. Mais on se souviendra qu’un journal dirigé par Rudy Veeramundur (aujourd’hui conseiller au PMO et directeur du Government Information Service) avait enquêté sur un dénommé A. G., imputant des liens financiers importants entre Pravind Jugnauth et Loganaden Govinden. L’article insinuait que ce dernier avait agi comme «courtier» entre la Mauritius Duty Free Paradise (MDFP) et Heinemann, qui a obtenu sous deux gouvernements MSM, le contrat pour fournir la MDFP. L’article avait qualifié Pravind Jugnauth de lobbyiste pour Heinemann en insinuant qu’Alan Govinden agissait comme prête-nom pour Pravind Jugnauth. Dans une déclaration à l’express, Rudy Veeramundur affirmait que l’article avait été rédigé par un collaborateur mais il avait refusé de répondre sur les méthodes de vérification avant sa publication.
Ce que Govinden emportera dans la tombe
Aujourd’hui, la parole de Pravind Jugnauth sur tous les faits et suppositions évoqués plus haut vaut de l’or. Le décès de Loganaden Govinden vient bouleverser le scandale Angus Road parce qu’il ne sera jamais dans un box des témoins pour répondre aux questions suivantes :
- D’où proviennent les Rs 20 millions qu’il a déboursées en 2001 ? (Même les autorités britanniques qui enquêtent sur ce deal et ont sollicité l’aide mauricienne ne le sauront peut-être jamais).
- Est-ce vrai que Pravind Jugnauth était derrière le deal dès 2001 ? Aurait-il pu être le prête-nom du PM ?
- Pravind Jugnauth n’a fait que montrer, à 10 mètres des caméras, des documents qui prouveraient qu’il a entièrement remboursé Govinden. Est-ce vrai ? Combien a-t-il remboursé à chaque fois et à quels intervalles ?
- Comment un businessman aguerri comme Govinden peut-il prendre le risque de payer Rs 20 millions pour un terrain sans jamais comparaître devant notaire et accepter ensuite qu’un tiers lui rembourse ces Rs 20 millions sans intérêt ?
Rama Valayden demande une enquête à la «National Crime Agency» du Royaume-Uni
<p>Le chef de file des <em>«Avengers» </em>n’a pas tardé à réagir à l’annonce du décès de Loganaden Govinden en Angleterre. Plus connu comme Alan Govinden, ce proche de la famille Jugnauth était mêlé de très près à l’affaire Angus Road. C’est pour cela que Me Valayden a jugé bon d’écrire à Graeme Biggar, le patron de la <em>«National Crime Agency»</em> britannique, pour lui demander d’initier une enquête sur la cause du décès de Govinden. L’avocat cite d’autres cas de morts suspectes récemment, dont celui de Soopramanien Kistnen, pour appuyer sa demande. Dans sa lettre, Me Rama Valayden énumère les questions, demandes d’informations et enquêtes sur l’affaire Angus Road qui demeurent pour lui sans réponses convaincantes du Premier ministre. Il souligne le rôle joué par Alan Govinden dans cette sombre affaire d’achat de terrains à Angus Road, rappelant qu’une grande partie de cette transaction a été conclue en Angleterre bien que les acquéreurs et le terrain se trouvent à Maurice. Une façon pour Me Valayden de réveiller par la même occasion la demande d’assistance faite par le bureau de l’<em>Attorney General</em> (AG) en 2012 auprès des autorités britanniques et qui a été annulée par l’AG Ravi Yerrigadoo en 2015. Me Rama Valayden a adressé une copie de la correspondance à la secrétaire d’État à l’intérieur britannique, Priti Patel, et à l’ambassadeur des États-Unis à Maurice.</p>
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