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Rashid Mir: «C’est IBL qui a donné le bâton qui a servi à tabasser mon fils»
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Rashid Mir: «C’est IBL qui a donné le bâton qui a servi à tabasser mon fils»
Le match est lancé. Le Senior Counsel Patrice Doger de Spéville et Roshi Bhadain face à deux ogres du barreau : Maxime Sauzier et Gavin Glover. L’enjeu: Rs 2 milliards, rien que ça. C’est la somme que réclame Rashid Mir au groupe IBL, son ex-subsidiaire Gray Security Services, l’assureur Eagle Insurance, et au meurtrier de son fils Mujeeb, Prabhakar Takah. Le tout arbitré par le très calme juge Denis Mootoo.
Le père de Mujeeb Mir a été entendu pendant toute la journée d’hier, jeudi 18 novembre, en Cour suprême, dans le procès qu’il intente au groupe. Celui-ci se poursuit aujourd’hui.
Mujeeb Mir avait été torturé et assassiné dans la nuit du 31 janvier 2005 lors de l’exécution d’un plan concocté par Takah, agent de sécurité posté à la résidence de Mujeeb Mir. Ce dernier a été tabassé, écrasé avec sa propre voiture, avant d’être brûlé vif sous celle-ci. Quatre hommes dont Takah ont été condamnés à diverses peines d’emprisonnement.
Près de 16 ans après, Rashid Mir estime que la responsabilité d’IBL, le plus grand groupe des compagnies de Maurice, est engagée. Selon lui, IBL en tant que compagnie-mère de Gray Security Services connaissait le profil malhonnête de Takah – ce dernier avait déjà volé les cartes de crédit de son supérieur – mais elle l’a quand même affecté à la résidence de Mujeeb Mir. Et le soir du meurtre, Gray Security Services a n’a pas réagi quand l’alarme a envoyé un signal à son QG.
«Un employé de mon fils est allé sur place soir-là», a raconté Rashid Mir (RM) à la barre hier après que son avocat Patrice Doger de Spéville a remis à la cour une copie du contrat liant Gray Security Services à Mujeeb Mir. Ce contrat stipule que Mujeeb Mir allait bénéficier d’un agent de sécurité en uniforme, équipé d’une radio et d’un bâton, et un night shift patrol. «Mais Takah, vêtu de l’uniforme de Gray, lui a dit que tout allait bien et que Mujeeb n’était pas là. L’autorité que confère cet uniforme, c’est IBL qui le lui a donné. Le bâton qui a servi à tabasser mon fils, c’est IBL qui le lui a donné.»
«Comment savez-vous tout cela ?» lui demande Patrice Doger de Spéville (PDS). «Après le décès de notre fils, nous avons enquêté avec l’aide d’un employé ici et un avocat du nom de Samad Goolamally. Nous avons échangé des correspondances avec la police qui a confirmé que le permis de compagnie de gardiennage a été alloué à IBL. Et puis tout est dans le procès criminel intenté aux meurtriers.»
«Depuis le meurtre, ma femme n’a plus quitté sa chambre.
PDS: «Pourquoi votre fils a-t-il retenu les services de Gray ?»
RM : «Gray assurait déjà la sécurité de ses compagnies et showrooms au port franc. C’était logique. En plus, Gray, qui était soidisant affilié avec la compagnie sud-africaine du même nom, se présentait comme le meilleur du secteur. Vous voulez le meilleur pour votre sécurité, n’est-ce pas ? Un agent de sécurité chez vous peut ouvrir les portes de votre chambre et vous voudriez faire confiance aux meilleurs.»
PDS : «Comment qualifierez-vous le meurtre de votre fils ?»
RM : «Vous pensez que je peux vous répondre après la torture qu’il a vécue ? Je ne sais pas si vous accepterez que je dise cela Monsieur le Juge» (le compatissant Denis Mootoo hoche la tête derrière le masque). «Depuis le meurtre, ma femme n’a plus quitté sa chambre. Elle me tient pour responsable car elle pense que c’est moi qui ai envoyé notre fils à Maurice. Elle n’est pas folle. Elle ne fait que prier en regardant les photos de Mujeeb. Maintenant vous voulez que je qualifie ce meurtre ?» (NdlR, dans notre édition d’hier nous avions écrit que la mère de Mujeeb Mir était dans la salle d’audience mercredi. Il s’agissait en fait de la tante de la victime).
C’était la seule fois où Rashid Mir a semblé démontrer une certaine fébrilité émotionnelle. Même quand il a été question du décès d’une de ses filles dans un accident de voiture à Dubaï, Rashid Mir n’a pas semblé flancher. «Elle était initialement une des plaignantes comme moi et elle attendait ce procès avec impatience. Mais elle est morte dans un accident de la route, et nous avons dû enlever son nom de la plainte.»
Lucide
En revanche, à chaque fois qu’il était question de la structure d’IBL et de Gray Security Services, Rashid Mir semblait très lucide. «IBL is a huge Mammoth organisation who shares the same address as Gray Security Services.» Ce commentaire a été émis en toute connaissance de cause car l’argument principal d’IBL dans cette affaire, c’est qu’elle avait déjà vendu Gray Security Services à des acheteurs français bien avant janvier 2005 et que donc sa responsabilité n’était pas engagée. C’était d’ailleurs la ligne de questions de Maxime Sauzier (avocat d’IBL) à Rashid Mir hier.
Gavin Glover, l’avocat d’Eagle Insurance (également une subsidiaire d’IBL), a, lui, expliqué à la cour et au plaignant que son client était uniquement l’assureur de Gray Security et non IBL et puisque Gray Security a été vendue, son client ne peut pas faire partie de ce procès en tant qu’assureur d’IBL. Ce à quoi Rashid Mir a répondu que selon lui, Eagle Insurance, ainsi que Gray Security Services sont tous contrôlés par IBL, et que celle-ci faute d’être assurée devra payer.
Lors de l’audience d’hier, Rashid Mir a également longuement expliqué comment son fils Mujeeb a transformé l’entreprise familiale au point où il est devenu l’homme clé de tout l’empire. Aujourd’hui, c’est Roshi Bhadain, l’avocat des compagnies de Mujeeb Mir, qui interrogera Rashid Mir. Il sera question des pertes encourues par ces compagnies après l’assassinat de Mujeeb Mir.
Tout s’est déroulé sous l’œil attentif de Prabhakar Takah, qui, menotté et entouré de deux policiers armés, est resté scotché à son siège. Il a tout le temps regardé en direction de la barre des témoins quand Rashid Mir prenait la parole. Mais dans le camp des Mir, tous semblaient indifférents vis-à-vis de lui.
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