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Nasser Essa, président de la Nurses’ Union: «Le manque d’effectifs dans les hôpitaux est critique...»

21 novembre 2021, 16:00

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Nasser Essa, président de la Nurses’ Union: «Le manque d’effectifs dans les hôpitaux est critique...»

Vous avez tenu une conférence de presse, mardi, où vous avez parlé du manque accru de personnel dans les hôpitaux. Qu’en est-il ?

Nous le maintenons. Le manque d’effectifs dans les hôpitaux est critique et la situation n’a nullement changé depuis notre point de presse mais je pense que le ministère de la Santé a été alerté. D’où d’ailleurs, la décision d’annuler les congés et vacation leaves, qui n’est, soulignons-le, pas compréhensible. Le personnel a besoin d’un break, surtout en ces temps de crise sanitaire, pour se refaire une santé physique et morale. Avec cette décision, la situation sera encore plus désastreuse car ces infirmiers se retrouveront dans un état encore plus lamentable. Déjà qu’ils sont en complete burn-out. Ils sont des humains et ont aussi besoin de repos comme tout le monde. Personne dans le milieu n’a de vie sociale depuis plus d’un an. Plusieurs sont des parents qui voulaient des congés pour passer du temps avec leurs enfants, pendant les prochaines vacances scolaires et d’autres avec leur famille. Il n’en sera rien.... Puis, il y a eu un nouveau protocole vendredi après-midi que nous peinons à comprendre.

Quel nouveau protocole ?

Il est dit que le personnel dont le(s) proche(s) est/sont testé(s) positif(s), doit quand même se rendre au travail au lieu d’être en auto-isolement. Ainsi, durant les sept prochains jours de travail, il sera testé sur place. C’est seulement si un employé est testé positif qu’il ira en isolement. Cela vient en quelque sorte confirmer effectivement le manque de personnel. Cela veut aussi dire que l’infirmier doit travailler jusqu’à ce qu’il soit malade car le virus peut se manifester après plusieurs jours de contact avec une personne contagieuse. Nous trouvons aussi que cela démontre une politique de deux poids deux mesures du ministère car il n’en est rien pour les autres grades de travailleurs des hôpitaux. Pourquoi appliquer ce protocole uniquement aux infirmiers ?

Comment peut-on pallier le manque de personnel dans les hôpitaux ?

Il faut savoir que c’est un problème qui perdure et même avant le Covid. Il faut impérativement recruter. Il y a d’ores et déjà 35 étudiants de Polytechnics Mauritius qui attendent d’être embuachés. On aurait pu lancer la procédure et rechercher des travailleurs étrangers pour nous épauler entre-temps. Il faut savoir qu’il faut trois ans pour former un infirmier ; donc même si le gouvernement recrute massivement, ce ne sera pas pour maintenant. Be nou aster ki nou pou fer ? C’est maintenant que l’on a besoin de personnel.

Qu’en est-il de vos collègues qui étaient dans un état sérieux, aux soins intensifs ?

Grace à Dieu, celui de l’hôpital Jeetoo est négatif depuis peu mais il était toujours aux soins intensifs (NdlR, à vendredi). Selon nos informations, il y deux autres à l’hôpital ENT et à Flacq. Mais nous continuons à avoir du personnel qui est testé positif au Covid au quotidien. Rien que ce matin (NdlR, vendredi), nous avons eu trois cas positifs parmi les infirmiers. Il y a des cas dans plusieurs établissements hospitaliers.

Comment expliquez-vous que ces employés contractent le virus malgré les précautions ?

On ne le sait pas. Le ministère aurait dû mener une enquête, voire une étude sur comment ces employés contractent le virus sur leur lieu de travail. Mais jusqu’ici rien. Plusieurs facteurs peuvent toutefois y contribuer. Comme le fait que le personnel est dépassé et en situation de burn-out, de fatigue extrême, leur système immunitaire est fragilisé ; donc il n’est plus à l’abri d’une infection ou autre. Cela l’affecte physiquement et psychologiquement. Simple exemple, un infirmier est appelé à travailler dans une flu clinic de 18 heures à 7 h 30 le lendemain matin, avec deux heures de repos et une pause de 30 à 45 minutes pour le dîner. Cela se répète sur deux à trois nuits. Normal dimounn-la so lekor pa pou parey...

Vous avez aussi d’autres tâches additionnelles depuis peu…

Transporter les corps de ceux décédés à la morgue et les remettre, entre autres, à leurs proches ou effectuer des électrocardiogrammes dans les Covid-19 wards, car des techniciens refusent de s’y rendre, par peur d’être contaminés. Ils ne veulent pas prendre de risques alors que nous sommes en permanence en contact avec des cas positifs.

Justement comment se passe le travail dans les Covid-19 «wards» ?

Il y a trois infirmiers et une charge nurse le matin et trois autres infirmiers et une autre charge nurse le soir. Il y a entre 20 et 30 lits par salle. Il n’y a pas d’isolement pour le personnel qui a été en contact pendant des heures avec des patients positifs au Covid. Celui-ci rentre à la maison, par bus, pour certains, après le shift. Pour revenir le lendemain. Alors que le protocole à l’hôpital ENT diffère. Le personnel était en auto-isolement sur place pendant sept jours. Pourquoi ?

Vous avez demandé une rencontre avec le Premier ministre. De quoi voulez-vous discuter avec lui ?

Nous avons demandé une rencontre avec Pravind Jugnauth, dans une lettre que nous lui avons envoyée et lors de notre conférence de presse, mardi. Mais nous n’avons eu aucun retour. Peut-être qu’il est occupé à des choses plus importantes... Nous voulions lui faire part de la situation des infirmiers dans les hôpitaux, flu clinics et autres, en ce moment. Des doléances et du stress de ces employés, en ces temps difficiles. Mais aussi lui demander de mettre sur pied un high-powered committee pour que l’on puisse faire entendre notre voix.

Vous avez également écrit au directeur du Pay Research Bureau (PRB). À quel propos ?

Il n’a pas tenu compte de nos recommandations dans le dernier rapport. Nou challenge li pou vinn pass enn zour ek nou swa dan flu clinic, swa dan Covid ward, swa dan ENT... Et il verra ainsi si notre métier est aussi facile. Nous ne demandons pas grand-chose. Si ce n’est que de nous donner une risk allowance et de revoir notre salaire. Nous avons un diplôme tertiaire et nous estimons que nous aurions dû avoir le même salaire que d’autres avec un diplôme semblable dans la fonction publique. On demande que cela soit inclus dans l’Errors, Omissions and Anomalies Committee Report.