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Scandale Molnupiravir: Akash Chuttoo arrêté bientôt pour fausse facture ?

17 décembre 2021, 22:00

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Scandale Molnupiravir: Akash Chuttoo arrêté bientôt pour fausse facture ?

Après la suspension au ministère de la Santé de Bijendrasingh Naeck et de Parmanand Mawah ainsi que le départ à la retraite anticipée de Dalida Allagapen et Harry Krishna Bucktowar, l’affaire Molnupiravir a atteint une autre étape avec la découverte que CPN aurait menti sur le prix du médicament.

La démarche d’Ehsan Juman auprès d’Optimus Pharma de l’Inde, le fournisseur de CPN, aura permis aux enquêteurs d’apprendre que le prix du médicament anti-Covid serait de 0,40 dollar soit Rs 17,00 et non USD 1,65 ou Rs 72 par comprimé, comme le clamait Akash Chuttoo de CPN Distributors. Selon nos informations, les enquêteurs au ministère auraient aussi obtenu confirmation du prix de Rs 17 et cela aurait été l’élément décisif pour décider de la suspension du chef du Pharmacy Board, Bijendrasingh Naeck, et celle de P. Mawah, le secrétaire permanent. Swaraj Ramasawmy n’est pas concerné, «pour le moment», nous dit-on.

Il faut noter que dans un communiqué en date du 12 décembre, CPN affirmait qu’elle avait payé ce médicament générique à Rs 72 d’Optimus Pharma pour le revendre à Rs 79,92 au ministère de la Santé. Akash Chuttoo, le directeur de CPN, affirmait le 14 décembre, qu’il n’avait réalisé que 11% de marge. Il a ajouté que s’il n’avait fait que de modestes profits, c’était pour sauver des vies.

On ne sait pas pour l’heure sous quelle charge ont été suspendus Naeck et Mawah et l’on ne sait pas non plus si l’ICAC les arrêtera. Concernant Harry Krishna Bucktowar, qui a pris sa retraite, il faut savoir que la commission anticorruption le recherchait depuis quelques jours pour l’arrêter à la suite d’un mandat émis par le commissaire de police. Selon l’ICAC, le suspect évitait l’arrestation en «avançant des raisons de santé». Ce qui est sûr, c’est qu’il n’est pas recherché pour l’affaire du Molnupiravir mais pour une affaire datant de deux ans. On ne connaît pas la raison exacte du départ à la retraite de l’ancien chef du Pharmacy Board. Est-il lié au Molnupiravir ou à cette affaire datant de deux ans qui concernerait sans doute l’achat d’autres médicaments ?

Et Dalida Allagapen ? Son départ à la retraite la met-elle hors de cause ? Pour Me Shakeel Mohamed, la demande de partir à la retraite aurait dû être refusée jusqu’à ce que l’enquête soit bouclée. De plus, ajoute le député rouge, «ces retraités percevront leur pension et autres revenus même en cas de culpabilité dans cette affaire». Quant aux suspensions des deux autres hauts fonctionnaires, «il y a beaucoup de personnes qui ont également participé à ce complot mais qui n’ont pas été suspendues», ajoute Shakeel Mohamed.

Selon nos informations, Kailesh Jagutpal est considéré par les enquêteurs «blanc comme neige» et même victime collatérale d’une machination. «Mais peut-on être aussi candide dans une telle situation ?» avons-nous demandé à un haut placé du gouvernement.

Réponse : «Le ministre ne s’ingère pas dans les procédures d’achats.» Et le High Level Committee (HLC) que Yogida Sawmynaden avait affirmé avoir décidé d’octroyer un contrat en 2020 à Bo Digital ? «Cela, c’était parce que c’était la STC – exemptée des procédures d’appels d’offres – qui s’occupait de ces achats d’urgence.» Mais la STC n’avait-elle pas affirmé qu’elle n’agissait que comme paying agent ? avons-nous objecté. Notre interlocuteur change de tactique : «En fait, Yogida Sawmynaden avait menti lors de l’enquête judiciaire sur la mort de Kistnen pour se défendre en jetant tout le blâme sur le HLC.»

Le flair d’Akash Chuttoo

<p>Dans un communiqué du 12 décembre, Jay Kumar Chuttoo, de CPN Distributors, justifie le gros stock de Molnupiravir en sa possession en arguant que ce stock était au départ destiné aux pharmacies du privé. Or, pour que les pharmacies en vendent en grand nombre, il aurait fallu que, premièrement, <em>le Drugs and Therapeutics Committee</em> approuve son usage contre le Covid. Jagutpal a annoncé cette approbation le 9 novembre au Parlement sans mentionner la date. Le ministre a ajouté le même jour que <em>&laquo;Mauritius is the second country after UK to have approved the treatment of Covid-19 patients with Ronapreve and Molnupiravir&raquo;.</em> Comme l&rsquo;Angleterre l&rsquo;a approuvé le 4 novembre 2021, le <em>Drugs and Therapeutics Committee </em>mauricien ne peut l&rsquo;avoir fait qu&rsquo;entre le 4 et le 9 novembre 2021. CPN Distributors a reçu ces médicaments le 30 novembre 2021. Aucun importateur n&rsquo;était au courant, selon Xavier Duval, de cette approbation. Seule donc CPN l&rsquo;était ? Deuxièmement, pour importer le Molnupiravir, il faut obligatoirement avoir un permis d&rsquo;importation. Quand CPN l&rsquo;a-t-elle reçu? Le Dr Jagutpal a finalement déposé la liste de ces permis le 14 décembre d&rsquo;où l&rsquo;on peut voir que CPN a obtenu, avec d&rsquo;autres, le permis le 9 novembre, c&rsquo;est-à-dire, le jour même où Jagutpal annonçait que les permis avaient déjà été délivrés. On ignore l&rsquo;heure de cet octroi de permis. Il faut noter également que le ministre de la Santé affirmait ce même 9 novembre <em>qu&rsquo;&laquo;as regards the other drugs, namely Ronapreve and Molnupiravir, these drugs are not available on the local market and even on the international market&hellip;&raquo;</em> Pourtant, on apprend que CPN avait déjà livré 5 000 doses à l&rsquo;ENT.</p>

Comment les lois ont été contournées

<p>Même les procédures d&rsquo;urgence qui pourtant &laquo;facilitent&raquo; normalement les magouilles auraient été contournées. On accuse des hauts fonctionnaires. Mais le ministre Jagutpal ne peut pas se dédouaner, selon l&rsquo;opposition. On nous rappelle que le ministre avait d&rsquo;ailleurs mis toute son énergie et sa hargne à défendre vendredi dernier la transaction avec CPN Distributors. Selon nos informations, CPN Distributors n&rsquo;a pas participé à la <em>&laquo;restricted bidding&raquo;,</em> auquel quatre soumissionnaires ont participé, Akash Chuttoo sachant probablement qu&rsquo;il n&rsquo;allait pas le remporter car présentant le prix le plus élevé, nous dit-on. Il aurait attendu que <em>Mauritius Pharmacy</em> le remporte pour ensuite lancer une <em>&laquo;unsolicited bid&raquo;. </em>En vertu de l&rsquo;alinéa (f), son offre de vente de 999 000 comprimés Molnupiravir à Rs 79,92 l&rsquo;unité est acceptée le lendemain même, soit le 7 décembre. Et entraîne la perte de Rs 70 millions de l&rsquo;argent du contribuable. Qui est responsable ? <em>&laquo;Ce n&rsquo;est pas moi, c&rsquo;est lui&raquo;,</em> répond tout le monde. L&rsquo;utilisation de l&rsquo;alinéa (f) est-elle justifiée ? Qui en a approuvé le recours ? La commande en urgence auprès de CPN était-elle justifiée? Selon le leader de l&rsquo;opposition et le Dr Gujadhur, il n&rsquo;y avait pas d&rsquo;urgence. Comment CPN a-t-elle pu obtenir le permis d&rsquo;importation, procéder à l&rsquo;importation de ces médicaments et les tenir prêts pour les offrir sur-le-champ sous l&rsquo;alinéa (f) du GN 280, qui, rappelons-le, venait d&rsquo;être promulgué le 20 novembre ? Des questions qui demeurent sans réponses jusqu&rsquo;ici.</p>

La police renvoie la balle à l’ICAC

<p>Me Rama Valayden a reçu hier une drôle de lettre du DCP Heman Jangi lui demandant de se tourner vers l&rsquo;ICAC et non à la police pour le délit allégué de <em>&laquo;conspiracy to defraud the state&raquo;.</em> L&rsquo;avocat attirait l&rsquo;attention du DCP sur une rencontre qui aurait eu lieu le 14 décembre dans un bungalow à Pointe-aux-Canonniers entre Kailesh Jagutpal, Swaraj Ramasawmy, B. R. Gowreesungkur, Dalida Allagapen et Akash Chuttoo. Cela juste après la déposition de ce dernier à l&rsquo;ICAC un peu plus tôt. Selon Rama Valayden, si cette rencontre a bien eu lieu, cela signifierait qu&rsquo;il y aurait un autre complot, celui d&rsquo;entrave à la justice. Il demande à la police de sécuriser les images de <em>Safe City</em> avant qu&rsquo;elles ne soient effacées automatiquement. Pour un avocat que nous avons contacté, l&rsquo;affaire de Molnupiravir concerne aussi et surtout un complot visant à détourner des fonds de l&rsquo;État, crime tombant sous le code pénal et la police. <em>&laquo;L&rsquo;ICAC ne s&rsquo;occupe que de corruption et de blanchiment d&rsquo;argent, entre autres&raquo;, </em>nous rappelle notre interlocuteur. Il est possible que la police ait voulu que le dossier soit transféré à l&rsquo;ICAC qui s&rsquo;occupe déjà du volet corruption. <em>&laquo;Cependant, je pense que la police a plutôt préféré se débarrasser de cette patate chaude.&raquo;</em></p>