Ils ne passeront pas les fêtes dans leur maison. Plusieurs Rodriguais et résidents de Rodrigues sont toujours bloqués à Maurice, certains depuis mars. Au même moment, dit-on, des proches du gouvernement régional de Rodrigues auraient eu l’occasion de venir faire un séjour à Maurice avant de retourner dans leur île natale.

Malgré leur tourment, les Rodriguais ont peur des représailles politiques. Ils ne racontent pas leur histoire à visage découvert, mais un groupe appelé le Mouvement Support Rodriguais milite désormais pour eux. D’ailleurs, le porte-parole de ce groupe, Yovin Poorun, a déposé une lettre et une liste des personnes bloquées au bureau du Premier ministre, lundi. Dans le document, il exhorte le Premier ministre, Pravind Jugnauth, à prendre le dossier en main, accusant le gouvernement de l’Organisation du Peuple de Rodrigues de mal gérer ce dossier. Un individu a déposé une plainte au bureau de la commission anticorruption pour favoritisme tout dernièrement.

Yovin Poorun, dont le père, Premchand, un résident de Rodrigues, affirme que ceux bloqués à Maurice vivent dans la peur et le désespoir. «Mon père était venu à Maurice pour compléter les formalités afin de prendre sa retraite de la fonction publique, mais il n’a jamais pu rentrer chez lui. Il a sa maison dans l’île et a investi dans un bateau. Sa demeure a été cambriolée en son absence. Il est vrai que le gouvernement rodriguais l’avait contacté en septembre pour partir en quarantaine, mais il avait eu un problème de santé. Il y a même une attestation pour le prouver. Toutefois, le gouvernement régional de Rodrigues fait croire qu’il a refusé. C’est totalement faux», dit-il.

Yovin Poorun milite pour que tout le monde puisse rentrer. «Il y a beaucoup de Rodriguais qui passent par des moments difficiles à Maurice, mais le gouvernement rodriguais semble avoir donné priorité aux proches de leurs partisans à la veille des élections régionales», ajoute-t-il.

Au cours de la semaine écoulée, une liste de passagers en circulation a permis de découvrir qu’une proche d’un politicien était parmi ceux rapatriés après qu’elle a fait un court séjour à Maurice. Parmi les Rodriguais bloqués loin de chez eux, il y a Onery Augustin. Cet homme de 79 ans avait lancé un appel de détresse sur les réseaux sociaux pour rentrer chez lui, mais il nous revient qu’il a été admis à l’hôpital, lundi. «Il est désespéré. Il était dans une détresse totale. C’est le stress et le chagrin qui l’ont conduit à l’hôpital», raconte Yovin Poorun.

Nous sommes en présence d’une liste de passagers en attente de rapatriement. À côté de chaque nom, il y a une histoire. Il y a celle de cette femme de 70 ans arrivée à Maurice en février. Elle entame des démarches depuis mai pour rentrer, mais en vain. Nous apprenons qu’entre-temps, un de ses neveux était venu en vacances à Maurice et qu'il a pu repartir. L’histoire de ce couple mauricien qui a tout vendu pour s’établir à Rodrigues est également touchante. Leurs vêtements et leurs biens sont déjà partis, mais eux, ils attendent depuis mars. Ils paient même le loyer à Rodrigues.

Le Mouvement Support Rodriguais accompagne également ceux qui sont dans la détresse. Ruby Ramasawmy, membre de cette organisation, affirme que beaucoup d’entre eux manquent de nourriture et qu’il y a également des malades qui ont besoin de couches ou encore des Rodriguais sans logement. Ruby Ramasawmy affirme qu’une jeune Rodriguaise a même failli être abusée sexuellement par le propriétaire d’une maison. «Elle louait une maison en compagnie d’autres jeunes qui ont pu rentrer chez eux. Malheureusement, elle n’avait pas les moyens de payer une maison toute seule. Le propriétaire lui a fait des propositions indécentes. Finalement, j’ai pu la placer chez un couple français», raconte-t-elle. Parmi les Rodriguais en difficulté, il y a des étudiants et des malades.

<p>Air Mauritius fera deux vols de rapatriement demain. Toutefois, ceux qui seront à bord ne pourront pas passer la fête de Noël en famille. Ils doivent effectuer sept jours de quarantaine. D&rsquo;ailleurs, ceux qui sont arrivés par le vol de rapatriement les 15 et 16 décembre devraient sortir de la quarantaine ce matin et demain respectivement. Toutefois, d&rsquo;après certaines informations non confirmées, il y a eu trois passagers testés positifs au Covid-19 parmi eux.</p>