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Ehsan Juman: «Les fonctionnaires exécutent mais doivent ensuite répondre de leurs décisions»
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Ehsan Juman: «Les fonctionnaires exécutent mais doivent ensuite répondre de leurs décisions»
Vous affirmez qu’une cargaison de Tocilizumab a été livrée par CPN Distributors au ministère de la Santé le 3 décembre alors que le contrat d’achat a été signé le 7 décembre. En avez-vous la preuve ?
J’ai fait état d’informations dont je n’ai aucune raison de douter de l’authenticité. C’est aux autorités d’enquêter. Cette livraison super rapide pose deux questions : est-ce que CPN Distributors n’avait même pas les moyens de conserver ces médicaments à la température voulue qu’elle les a livrés directement au ministère ? Comment se fait-il que la livraison ait été faite avant la signature du contrat ?
Vous affirmez aussi que la personne responsable au ministère de la Santé avait refusé, avec raison selon vous, de réceptionner cette livraison en l’absence des documents nécessaires et que Dalida Allagapen est intervenue pour forcer ce fonctionnaire à prendre les médicaments. En êtesvous sûr ?
Absolument ! Je sais aussi que Dalida Allagapen a, à son tour, reçu l’ordre du ministre Kailesh Jagutpal de faire prendre ces médicaments.
Le ministère de la Santé agirait-il donc comme «store keeper» de CPN ?
Pas juste comme store keeper mais aussi comme intermédiaire entre CPN et les pharmacies et autorités réunionnaises.
Ces différentes chaînes de commandement – du ministre à la SCE et de cette dernière au «store keeper» – semblent être «off-record»...
C’est tout le drame des fonctionnaires. Certains ont tendance à exécuter des ordres verbaux et lorsqu’il y a un souci, ce sont eux, malheureusement, qui sont appelés à en répondre. C’est pour cela qu’ils doivent agir dans les paramètres établis, et ne pas aller au-delà de leurs attributions.
Vous parlez d’une discussion pour ne pas dire dispute entre les ministres Callichurn et Padayachy vendredi. Que s’est-il passé ?
Selon mes informations, Callichurn n’était pas content que l’affaire de subsides aux importateurs de lait ait fuité vers l’opposition. Cela prouve qu’il y a fort heureusement des fonctionnaires qui commencent à tirer la sonnette d’alarme. C’est la preuve aussi que les ministres se méfient les uns des autres. Dans ce cas, d’après notre source, les deux ministres ont fait fi des recommandations du technical committee.
Des policiers commencent aussi à parler…
Plusieurs fonctionnaires dans différents ministères n’aiment pas la façon de faire du gouvernement et veulent dénoncer. Imaginons que ces fonctionnaires n’aient pas sonné le tocsin. C’est peut-être pour cette raison que c’est l’ICAC qui a «hérité» de l’affaire d’achat du Molnupiravir car il est clair qu’en haut lieu, on craint que des policiers balancent des informations. Alors qu’à l’ICAC, c’est plus hermétique. C’est pourquoi je lance un appel aux enquêteurs de l’ICAC à se ressaisir et d’écouter leur conscience. Qu’ils pensent au pays et aux nombreux Mauriciens morts pour rien par manque de médicaments.
Justement, «l’express» a été témoin de plusieurs décès dans les hôpitaux de personnes qui n’auraient pas reçu le traitement nécessaire quand il le fallait, que leurs proches ont dû se procurer les médicaments. Ces incidents ont-ils pu être causés par l’attente que des contrats soient accordés à des copains ?
Je ne veux pas m’aventurer dans de telles conclusions. Ce serait à une éventuelle commission d’enquête de le faire… Tout ce que l’on voit n’est que le sommet de l’iceberg. Il faut mettre sur pied une commission d’enquête sur tous les achats faits sous les emergency procedures.
Pourquoi Dalida Allagapen a-t-elle été autorisée à partir en préretraite alors que deux autres hauts fonctionnaires ont été suspendus ?
Je me pose toujours la question, d’autant qu’à première vue, c’est elle qui est responsable techniquement de ces achats remplis de zones d’ombre.
Un autre sujet pour clore. Êtesvous satisfait de la réponse de Padayachy sur le bureau de l’Economic Development Board (EDB) à Tokyo ?
D’abord, le ministre des Finances a déposé une seule feuille contenant trois chiffres alors qu’il aurait pu donner plus de détails. Sur le fond, son explication que «la présence sur place au Japon d’une équipe de l’EDB a grandement facilité la signature de ces accords» me fait rire. À l’heure où tout se fait par Internet, est-il raisonnable de dépenser Rs 2,8 m par an pour un bureau à Tokyo qui a juste facilité une signature d’accords ?
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