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À pied d’œuvre pour les fêtes: dur d’être loin des siens pendant que les autres s’amusent
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À pied d’œuvre pour les fêtes: dur d’être loin des siens pendant que les autres s’amusent
Dan* est policier depuis quelque 20 ans. Il est âgé de 45 ans. Depuis qu’il a intégré la force policière, il a passé la plupart des fêtes sur son lieu de travail. «C’est vrai qu’en cette période le coeur n’y est pas, mais on n’y peut rien. J’ai choisi ce métier. Ce n’est quand même pas facile», raconte cet habitant du Nord. Il essaye de se rattraper le lendemain, en passant un maximum de temps avec ses enfants et pour rendre visite à des proches. Mais pas cette année, en raison de la hausse des cas de Covid. Ils iront seulement chez les grands-parents.
Au début, son épouse ne comprenait pas cette situation. «À l’approche des fêtes, elle boudait et me disait que je préférais mon travail à notre famille. Les deux sont importants pour moi, sauf que j’ai le sens du devoir. Le public aussi a besoin de nous. Souvent, il y a des incidents en période de fêtes et la police doit être parée à toute situation.» Avec la naissance de son premier enfant, cela lui causait davantage de tristesse. «Auparavant, la technologie n’était pas aussi avancée que maintenant. Je devais attendre d’être à la maison pour que mon épouse me raconte comment s’étaient passées les fêtes, quel était le sentiment de mon enfant en ouvrant son cadeau.»
Mieux indemnisé
Il n’a jamais eu la chance de s’habiller en Père Noël pour surprendre ses enfants. À chaque fois, sa famille part réveillonner chez des proches. «Quand j’ai pu passer Noël avec mes enfants, ils avaient déjà grandi. Ils ne croyaient plus au Père Noël», relate Dan. «Depuis le début du mois, je m’organise pour trouver le cadeau idéal pour mes enfants. Je suis attentif à ce qu’ils me disent afin de ne pas les décevoir. C’est un réconfort qu’ils soient contents de leurs cadeaux même si moi, je ne suis pas avec eux.»
Tant bien que mal, ses collègues et lui essayent d’organiser une petite fête sur leur lieu de travail. Ils ont déjà commandé dans un restaurant proche. Et il y aurait même un échange de cadeaux.
Mais Dan est d’avis que le travail pendant les fêtes aurait dû être plus valorisé surtout en cette période de Covid. «On se sacrifie. On aurait pu être mieux indemnisé.»
Pour Kevin, ce sera un jour comme un autre. Il est séparé de son épouse depuis deux ans. Depuis, il n’aime pas se retrouver seul à la maison pour les fêtes. Alors il demande à ses collègues qui ont des enfants de changer leur shift avec lui. «Pour moi, c’est un jour comme un autre. Mon épouse ne veut pas me voir et mes enfants non plus.» Ce policier de 34 ans passera Noël et le Nouvel An dans un poste de police sur le littoral. Tout comme Dan, les collègues de Kevin aussi préparent une petite fête. «C’est vrai que c’est un jour spécial et au travail, j’essaye de jouer le jeu.»
Accident de voiture
Outre leur petite fête, ils devront patrouiller dans la localité pour assurer la sécurité. La première année que ce policier de 34 ans a passée loin de sa famille, il y avait un accident impliquant plusieurs jeunes, dont deux avaient péri. Donc lui et son équipe essayent de redoubler de vigilance afin que les autres ne gardent pas un mauvais souvenir des fêtes.
Wendy est âgée de 25 ans. Elle est célibataire. Elle a été appelée à travailler pour le réveillon de Noël et le jour de la Saint Sylvestre. C’est la troisième fois qu’elle sera loin de sa mère. Très jeune, elle a perdu son père. Elle passait tout le temps les fêtes avec sa mère, Sandra. Cette dernière est à chaque fois triste de voir sa fille quitter la maison avec l’uniforme bleu. «Elle a peur que quelque chose de mauvais se produise, mais j’essaye de la rassurer», explique Wendy.
Pendant que sa mère est seule à la maison, Wendy n’arrête pas de penser à elle. «J’aime mon travail, je donnerai tout pour ce métier, mais je ne peux m’empêcher d’avoir le coeur gros en ce jour. Dès que je rentre sur mon lieu de travail, j’appelle ma mère pour l’informer. Elle se met aussitôt au lit. Même si elle ne va pas fermer l’oeil de la nuit, elle ne va pas trinquer sans moi.» Elle attendra avec impatience le matin pour pouvoir la serrer dans ses bras.
Femme battue
Cette habitante de Cassis tente de se préparer moralement pendant cette période des fêtes. Cette année, comme chaque année, Wendy quittera sa maison après avoir fait une prière. Elle compte prier pour que tout se passe bien. Pendant les trois années durant lesquelles elle a été de service, tout n’a pas été calme.
Elle se souvient de la fois où une mère avait été battue par son fils le jour de la Saint Sylvestre. Elle avait accouru au poste de police, pieds nus. Elle portait des ecchymoses car son fils, qui était sous l’emprise de la drogue, voulait qu’elle lui donne de l’argent pour qu’il achète davantage de stupéfiants pour partager avec ses amis. «Souvent, nous avons des cas comme cela. Il faut se préparer à toute éventualité.»
Pour Sooyan, pompier depuis les trente dernières années, c’est normal de travailler pendant la nuit du réveillon. Même si cela n’a pas toujours été le cas, au fil du temps, ce sentiment amer qu’il avait a changé. «Kan mo ti zenes, mo bann kamarad pe amize, mwa mo ti pe bizin travay. Apre, kan inn gagn madam ek zenfan osi pa ti fasil. Me apre sa sentiman la in sanze. Monn met dan mo latet ki travay li inportan, si pena travay pa pu kapav nouri zanfan», philosophe ce sergent du feu qui s’apprête à prendre la retraite. Il se réjouit de pouvoir prochainement passer les fêtes avec ses petits-enfants.
Sauver les animaux
Cet habitant des hautes Plaines- Wilhems donne la chance aux jeunes qui ont des enfants de fêter les réveillons avec leur famille. «Lontan pa ti ena sa sans la, bann sef la ti sever.» Quand on n’a pas la tête au travail, on peut se retrouver en danger. «Nous pompiers, nous devons avoir la tête sur les épaules. Nous sommes là pour sauver la vie des gens. Si notre esprit n’est pas là nous ne pouvons pas travailler. Nous devons être toujours en alerte. Mais certains ne peuvent pas changer leur jour de travail et nous les consolons.» Ses collègues organisent, comme chaque année, une fête. Cela aide à resserrer les liens.
Outre les incendies et les accidents, les Fire Services sont aussi appelés à secourir les animaux qui, par peur des pétarades, se sauvent et se retrouvent en danger.
Alors que beaucoup vont célébrer Noël et le Nouvel An avec leur famille, beaucoup seront coupés de leur proche. Comme les policiers, ceux opérant dans le service hospitalier devront être de garde ou à l’hôpital. Bien que beaucoup d’entre eux aient reçu l’ordre de ne pas s’adresser à la presse, il demeure important de saluer le travail de ces centaines de médecins, infirmiers et employés de la santé qui ont vécu deux terribles années avec la pandémie du Covid-19 qui a aussi touché leurs proches.
Pour le médecin spécialiste Oomar Yehiya, qui travaille dans une clinique, Noël c’est avant tout un moment de partage qu’il tente de maintenir avec ses petits enfants à qui il offre de cadeaux. «Je suis de foi musulmane mais la Noël bien que religieuse, est une fête où nous donnons des cadeaux aux enfants. C’est l’occasion de redonner le sourire aux petits anges.»
Le docteur Oomar ne sera pas à la clinique mais bien de garde, pour parer à toute éventualité. Il a déjà eu à se rendre à la clinique un jour de Noël. «L’année dernière, j’ai dû quitter ma maison vers 23 h 30 pour une intervention très importante et délicate. Un jeune avait eu l’artère sectionnée. J’ai terminé cette opération vers 2 h 30. Ce sont les aléas du métier mais, avec le temps, ma famille s’est habituée. Ils savent qu’à tout moment, je devrai bouger.»
Cette année, il va limiter ses achats de pétards, par solidarité envers ses collègues mais aussi avec ces infirmières ou docteurs qui ont perdu la vie suite au Covid 19. «Kapav mo pou pran bann ti petar la ki pa fer bel tapaz pou bann zanfan zwe zwe me pa bel zafer. Bann tizanfan pou amize me mo pou gard a ker bann koleg ki pe fight kont covid. Nou tret par milion pasian. Kapav ena enn de ki pa dakor ar nou ou pa kontan me nou sap lavi dimounn.» Le docteur Oomar conclut en souhaitant joyeux Noël et bonne année à ses collègues.
Infirmière solidaire
Moira Racoute travaille depuis dix ans dans le service hospitalier en tant qu’infirmière. Mère d’un fils, elle s’est déjà préparée à l’idée de travailler le jour de Noël. «J’ai été approchée pour travailler la nuit et durant le weekend dans une clinique privée. Normalement, je ne travaille qu’en matinée, durant ce qu’on appelle les «office hours», vu que je bosse dans un centre médical.» Moira, 32 ans, explique que durant cette période, les membres du personnel hospitalier doivent se montrer plus attentionnés envers les patients qui sont hospitalisés, donc loin de leur famille.
«La pandémie ne rend pas les choses faciles. Nous savons que cela pèse sur le moral des patients. Chez moi, à la maison, ils sont habitués à ce que je bosse à des heures tardives. Néanmoins, cela m’attriste, surtout pour mon fils, car je ne serai avec lui que la veille de Noël. Mais je sais qu’il sera entouré des autres membres de la famille, ça aide et me rend la vie plus facile.»
Dans toute situation se glisse du positif…
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