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Manque de médicaments contre le Covid: les allégations de pénurie artificielle font tiquer

11 janvier 2022, 18:00

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Manque de médicaments contre le Covid: les allégations de pénurie artificielle font tiquer

La déclaration à l’Independent Commission against Corruption (ICAC) de Raj Naeck, Chief Pharmacist du gouvernement, que l’on aurait, en haut lieu, créé une pénurie artificielle de médicaments contre le Covid pour déclencher les procédures d’urgence d’achat, aurait choqué en premier les enquêteurs de la commission anticorruption eux-mêmes. Alors qu’une enquête est en cours, des proches de patients décédés du Covid se font également entendre.

Lorsque Brijendrasingh Naeck, dit Raj, a fait cette déclaration, le jeudi 6 janvier, aux enquêteurs de la commission anticorruption, ces derniers auraient refermé leur cahier et ordinateur sur le champ. Tout en informant Naeck qu’il pouvait rentrer et que l’ICAC lui ferait signe quand il devrait revenir. Pourtant, la déposition ne faisait que commencer… Qu’est-ce qui s’est passé pour que celle-ci soit stoppée aussi abruptement ? On devine les raisons, surtout si l’on se rappelle que l’institution a sa manière particulière de mener certaines enquêtes.

On ne sait si Naeck a dit la vérité. Si c’est le cas, ce serait extrêmement grave de la part des décideurs. «On a déjà entendu parler de fausses pétitions venant du public et même de manifestations encouragées pour justifier des travaux d’urgence d’infrastructure. Mais laisser mourir les gens pour déclencher des procédures d’urgence, c’est gravissime et c’est de l’assassinat», nous dit un haut-fonctionnaire.

L’express est en présence de témoignages de proches de décédés du Covid qui ont dû faire des démarches eux-mêmes pour acheter des médicaments qui manquaient à l’hôpital. Une proche d’Ajay Ramanarain, décédé le 14 novembre 2021, nous raconte comment la famille a attendu en vain que l’hôpital procure à ce dernier un médicament et le temps qu’une proche en achète, il était trop tard pour lui. Idem pour Ismet Abdoolah, emporté par le Covid le 22 novembre. Ses proches ont dû débourser Rs 60 000 pour importer du Tocilizumab de l’île de la Réunion. Quand le médicament est arrivé, Ismet était déjà décédé, et dans des conditions indignes.

Pour Anil Ramnarain, le frère du décédé, si ce qu’a avancé Brijendrasingh Naeck à propos de la création d’une situation artificielle de pénurie est vrai, «une enquête judiciaire s’impose, d’autant plus que l’affaire contiendrait des éléments de préméditation et inclurait, tout comme dans l’affaire Kistnen, des transactions louches avec des fournisseurs. Cela dépasserait de loin la négligence médicale». Pour un proche d’Ismet Abdoolah, si on a laissé mourir ce dernier dans des conditions inhumaines juste pour déclencher des procédures d’urgence, «dans quel pays vivons-nous ? Et le ministre responsable qui s’amuse alors que des patients sont morts de manière suspecte… Et je ne parle pas des dialysés !».

Ehsan Juman, député travailliste qui suit de près cette affaire de Molnupiravir et la situation du Covid en général, est outré. «Cela ne m’étonnerait pas que l’on ait laissé mourir des gens pour pouvoir faire du business. C’est un modus operandi bien rodé utilisé avec d’autres fournisseurs. L’affaire Molcovir n’est que le sommet de l’iceberg.» Le député est convaincu que le ministre Jagutpal et la SCE Dalida Allagapen étaient au courant de cette transaction. «Savez-vous que pour les procédures d’urgence, le ministre de la Santé doit informer le ministère des Finances pour tout paiement en dépassement du budget ?» De plus, Ehsan Juman ne comprend pas pourquoi, alors que le Dr Reesaul avait recommandé l’achat de 1,2 million de doses, le ministère en a finalement acquis 3 millions. C’est pour ces raisons, entre autres, qu’il pense que cette affaire est très grave et aura beaucoup d’implications.

Not for sale

Normalement, tous les médicaments vendus au ministère de la Santé doivent obligatoirement contenir l’indication Not For Sale. Or, selon Ehsan Juman, le Molcovir importé par CPN Distributors Ltd n’en porte pas. Pourquoi ? On ne le sait pas. En tout cas, l’absence de cette indication serait une flagrante violation des conditions imposées par le ministère de la Santé. Pourtant, le Molcovir a bien été réceptionné et distribué aux hôpitaux. Cependant, on vient d’apprendre qu’un mémo a été émis samedi demandant à tous les hôpitaux de retourner ces Molcovir de CPN. Pourquoi ? Selon Ehsan Juman, c’est peut-être en raison du refus du gouvernement de payer CPN. En tout cas, ajoute-t-il, alors que Jagutpal défendait l’urgence de cette commande, voilà qu’elle ne l’est plus.