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Guerre en Ukraine - Kevin Allagapen et sa fiancée Tatiana: «Nos heures sont comptées…»
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Guerre en Ukraine - Kevin Allagapen et sa fiancée Tatiana: «Nos heures sont comptées…»
Terrorisé et complètement attristé par la situation prévalant en Ukraine, le Mauricien Kevin Allagapen, 36 ans, qui se trouve actuellement à Kharkiv dans ce pays, ne sait plus à quel saint se vouer pour pouvoir s’enfuir de ce cauchemar avec sa famille. Ils ont trouvé refuge dans un bunker dans une station de métro, où avec eux se cachent encore environ 2 000 Ukrainiens. La voix nouée par la peur, le jeune homme demande de l’aide à l’État mauricien pour qu’au moins son enfant et sa fiancée ukrainienne puissent rentrer à Maurice. «Pour l’instant on est sains et saufs mais on ne sait pas pour combien de temps. La situation est très critique. Mo demann l’État Morisien silvouple mem mwa mo reste li pa grav me sov mo zanfan ek mo fam silvouple.»
Sa famille et lui ont quitté leur domicile jeudi après la première attaque. Dans une vidéo qu’il nous a envoyée, avant de se réfugier dans le bunker, on les voit, Tatiana et lui, avec le petit dans les bras, en train de marcher dans le froid pour trouver refuge alors que les missiles s’écrasent au loin. La peur se lit sur leurs visages et une profonde tristesse aussi...
Récemment revenu en Ukraine pour être aux côtés de sa compagne Tatiana et de son fils de trois ans, qu’il n’avait pas vus depuis plus de deux ans à cause de la crise sanitaire, Kevin Allagapen ne s’attendait pas à ce que le rêve qu’il chérissait tant se transforme en cauchemar. Il pensait que ses peines allaient prendre fin en arrivant en Ukraine en décembre 2021, et qu’il pourrait enfin se marier et vivre tranquillement avec Tatiana mais voilà que l’avenir est devenu incertain pour ce couple. «Là j’ai tout laissé, la maison que nous avons achetée, mes affaires, tout tout tout. Il ne nous reste presque plus rien. Nous ne savons même pas si notre maison est encore debout.»
Pour le trentenaire, toutefois, l’important est que son enfant et sa fiancée soient en sécurité. Ces deux personnes sont toute sa vie, confie-t-il. Et s’il faut choisir entre sa vie et les siennes, il préfère se sacrifier. Tatiana, qui a échangé quelques mots avec nous, a le cœur brisé. Voir son pays, sa ville, sa patrie, s’effondrer comme cela à coups d’armes et de missiles, lui fait très mal. Et rien que le fait d’imaginer de pouvoir perdre à n’importe quel moment son fiancé ou son enfant, la met dans tous ses états.
Vers 14 heures, elle nous a envoyé une photo, tout près du bunker, d’un missile qui s’est écrasé mais qui n’a pas explosé. «Nous avons eu de la chance mais nous ne savons pas pour combien de temps. Là celui-là, il n’a pas explosé mais on ne sait pas ce qu’il adviendra s’il y a un autre. Les heures sont comptées. Jusqu’ici, où nous sommes, c’était l’endroit le plus sûr mais nous comprenons qu’il ne l’est plus vraiment», déclare Tatiana avec peur.
Selon Kevin Allagapen, il est impossible pour eux de s’enfuir à l’heure où il nous parlait. Les militaires ayant déjà commencé à envahir les alentours, marcher dehors serait une mission suicide. «C’est pour cela que je demande de l’aide, rien que pour ma famille...»
Des mauriciens en Pologne prêts à aider s’ils arrivent jusqu’à la frontière Polonaise
«Je suis prêt à offrir un toit aux Mauriciens qui se trouvent actuellement en Ukraine et qui ont besoin d’un endroit pour se réfugier», confie Shubhum Dooluthsing, 26 ans et qui est établi en Pologne depuis trois ans. «Nous sommes un petit groupe de Mauriciens ici qui sont prêts à accueillir si besoin est.» Conscient qu’il sera peut-être difficile de venir en Pologne et de passer les frontières, le jeune homme assure que quoi qu’il en soit, les quelques Mauriciens et lui-même restent sur le qui-vive et prêts à aider ou à récupérer quiconque en a besoin, à la frontière, à n’importe quel moment.
Certains Ukrainiens ont des difficultés à entrer en contact avec leurs proches
Ils ont le cœur en miettes. Plusieurs Ukrainiens qui vivent à Maurice sont très inquiets de la situation actuelle dans leur pays d’origine. Selon la ressortissante ukrainienne Liubov Harel, la situation est très critique. «Certains d’entre nous ont du mal à entrer en contact avec nos proches soit parce qu’ils n’ont plus de batteries soit parce qu’il n’y a plus de réseau dans les bunkers.»
Elle raconte que plusieurs familles actuellement à Maurice y compris elle-même sont dans la tourmente à cause des événements actuels surtout que des familles se brisent. «À certaines frontières, on n’accepte que les femmes et les enfants. Les hommes entre 18 et 60 ans doivent rester pour combattre au front. C’est arrivé à ma cousine et son époux. Elle a dû laisser son époux sans savoir s’ils se reverront...»
Chandan Jankee: «J’ai conseillé à Allagapen de rester sur place»
L’ambassadeur de Maurice en Russie, Chandan Jankee, dit suivre la situation des Mauriciens en Ukraine de près. S’agissant de Kevin Allagapen, Chandan Jankee dit lui avoir parlé hier matin et lui avoir conseillé de rester chez lui à Kharkiv. «Maintenant s’il veut partir pour la frontière de la Pologne, c’est à lui de décider.»
L’ambassadeur mauricien ajoute qu’il a été en contact avec quatre étudiants mauriciens. «Deux sont partis en Angleterre et deux autres avaient l’intention de partir vers la Pologne. À ces deux Mauriciens, qui étudient la médecine, j’ai les ai conseillés de rester à leur université, car une fois qu’ils quittent le campus, ils ne seront plus sous la responsabilité de la direction de l’université.» Chandan Jankee soutient qu’avant l’invasion de la Russie en Ukraine, il avait demandé aux Mauriciens de se faire connaître et d’indiquer s’ils veulent une aide. Maintenant, dit-il, comme il n’y a aucun vol international, il est difficile de rapatrier ceux qui le désirent. Selon lui, il n’y a pas beaucoup de Mauriciens et faute d’un enregistrement bien établi, il est difficile de connaître leur nombre exact. Du côté de la Russie, il n’y a aucune inquiétude de la part des Mauriciens qui s’y trouvent. «Evidemment ceux qui ont des proches en Ukraine ont des craintes.»
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